SAURIN

Numéro

739

Prénom

Joseph

Naissance

1655

Décès

1737

1. État-civil

D'une famille protestante très ancienne, Joseph Saurin appartenait à la branche du Dauphiné, l'autre branche étant établie en Languedoc. Son père, Pierre Saurin, pasteur, était en poste à Courthézon (Vaucluse), quand Joseph naquit le 1er septembre 1655 ; sa mère se nommait Suzanne Matté. Il avait un frère aîné, Elie, qui fut pasteur en Hollande et grand théologien. Il épousa à l'âge de vingt-cinq ou vingt-six ans Demoiselle de Crousaz du Pays de Vaud, qui le rejoignit à Paris après bien des péripéties. Un fils est mentionné comme ayant été abandonné avec sa mère en Suisse. Un autre fils, né à Paris en 1706, Bernard Joseph Saurin, se fit connaître comme poète dramatique. S. est mort à Paris le 29 décembre 1737 d'une fièvre léthargique.

2. Formation

II fit des études pour devenir pasteur.

3. Carrière

Pasteur à Eurre en Dauphiné, il tint des discours séditieux et fut obligé de s'exiler en Suisse où il fut ministre à Bercher, près d'Yverdon. Là il dut signer la Formula consensus, exigée des pasteurs d'origine française dont les pasteurs suisses se méfiaient. Nouvelles imprudences en chaire en 1686. Il gagne la Hollande où était son frère, en abandonnant femme et enfant. «Les disputes théologiques l'y poursuivirent et lui suscitèrent de nouveaux chagrins. Lassé de ces persécutions, il écrivit à M. Bossuet pour conférer avec lui sur la religion » (Rozier). II obtint alors un sauf-conduit et vint abjurer auprès de Bossuet, le 21 septembre 1690. Louis XIV à qui il fut présenté le gratifia d'une pension de 1500 £ ; il fut admis à l'Académie des sciences et y fit une carrière rapide : élève géomètre le 10 mars 1707, il est déjà pensionnaire le 13 mai 1707 et accède à la vétérance le 1 o juillet 1731. Les travaux de S. portent sur la géométrie, mais il s'est aussi occupé d'horlogerie.

5. Opinions

Il défendit dès 1703 Descartes contre une objection de Huygens, et fut mêlé à la querelle des infiniment petits : controverse avec Rolle dans le Journal des savants. Il y eut aussi une «dispute» avec le chevalier de Louville en 1721-1722. «Il allait au café [le café Laurent], son principal et presque unique divertissement». Là éclata «l'affaire Rousseau » autour de couplets orduriers écrits par J.B. Rousseau dans lesquels des auteurs et personnages divers se sont vus attaqués.

Dans cette histoire avec le poète Rousseau, née rappelons-le d'une délation, S. fut accusé par Rousseau et fit de la prison. Puis il accusa lui-même Rousseau que le tribunal condamna à l'exil à perpétuité, tandis que S. était absous par un arrêt du Parlement. Suivant les auteurs S. a été différemment jugé. Pour Haag, pour Sabatier de Castres, c'est un apostat et les accusations de vol et de forfaiture qu'on a portées contre lui sur les véritables causes de son départ de Suisse sont considérées comme vraies, l'argument étant que l'article et la soi-disant lettre où il s'accuse de vol parurent en 1736 dans le Mercure suisse, alors qu'il était encore en vie. Il ne démentit pas, c'est donc que tout était vrai. Voltaire mena son enquête ; voir l'article «Joseph Saurin» dans Le Siècle de Louis XIV (éd. Pléiade, p. 1206-1208). En 1758, l'affaire rebondit et c'est la famille Saurin qui est éclaboussée. Voltaire intervient encore par une Réfutation d'un écrit anonyme contre la mémoire de feu M. Joseph Saurin. Selon Voltaire, c'est J.B. Rousseau qui a lancé, alors qu'il était en Suisse toutes ces fausses accusations (on trouve aussi de nombreux échos de ce conflit dans la correspondance de Voltaire). Il ne semble pas qu'aucun des deux partis ait désarmé : il est difficile d'être un converti. «On aurait dit qu'il était né pour éprouver des altercations [...]. Débarrassé de l'inculpation suscitée contre lui par ses ennemis, il se renferma dans son cabinet & ne s'occupa plus que de sciences» (Rozier).

Il est certain qu'il s'était fait des amis à Paris : M. de Meaux qui avait aidé à sa conversion, le marquis de L'Hôpital, le P. Malebranche, Houdar de La Motte et Fontenelle (Eloge).

6. Activités journalistiques

6. Journal des savants. La Table indique que S. participe «depuis 1702 jusqu'au 18 juillet 1708», ajoute qu'il «étoit frère du ministre Elie Saurin», mais qu'il avait abjuré. «Il ne paraît plus aux assemblées après le 25 mai 1741 », renseignement curieux puisque S. est mort en 1737. Articles : «Réponse à l'écrit de M. Rolle de l'Académie des Sciences», 1702 ; «Défense de la réponse à M. Rolle contre la Réplique de cet auteur».

Mémoires de Trévoux, addition pour novembre-décembre 1702 : «Démonstration des théorèmes que M. Hugens a proposez dans son Traité de la pendule sur la force centrifuge des corps mus circulairement».

7. Publications diverses

Liste des différents mémoires parus dans les Mémoires de l'Académie des sciences dans les Tables établies par Rozier (t. IV). – Lettre critique de M * à M *** sur le «Traité de mathématique du P.C. [Père Castel] et les extraits qu'il a faits dans les Journaux de Trévoux des Mémoires de l'Académie des sciences de l'année 1725, Paris, 1730. – Mémoire pour le sieur Saurin contre le sieur Rousseau, s.d. [1712].

8. Bibliographie

8. B.Un. ; N.B.G. ; Haag ; D.S.B. – Archives de l'Académie des sciences, dossier « Joseph Saurin ». – « Éloge de Saurin » par Fontenelle, Histoire de l'Académie des sciences pour l'année 1737, p.110-120 (réédition : Fontenelle, Œuvres complètes, éd. Alain Niderst, Paris, Fayard, coll. "Corpus des œuvres de philosophie", 1996, t. VII, p.271-283). – Rozier, Table des articles contenus dans les volumes de l'Académie royale des sciences de Paris depuis 1666 jusqu'en 1770, 1776.