PACIUS DE LA MOTTE

Numéro

610

Prénom

Charles

Naissance

?

Décès

1751

1. État-civil

Ses lettres, réunies à Londres (B.L., add. mss. 4286-4287), à Paris (B.H.P., ms. 295) et à Lausanne (B.V., fonds Crousaz), mentionnent souvent son adresse : «Groot Leydse Dwarsstraat», près de Spiegelstraat à Amsterdam, ce qui permet de l'identifier parmi ses nombreux homonymes : le 26 juillet 1751 est inhumé dans l'église wallonne Charles Pacius de La Motte, résidant à cette adresse (A.M. d'Amsterdam, renseignement communiqué par I.H. van Eeghen). Il avait été inscrit à l'église wallonne le 13 novembre 1689 sous le nom de Charles Paejeus, et devenait citoyen d'Amsterdam le 15 novembre 1689, sous l'identité de «Charles Pacius de la Motte, de Montpellier, rentier». On peut en inférer qu'il quitta Montpellier pour gagner le Refuge vers 1685 ; mais ce nom pourrait désigner son père ou son grand-père. Une lettre de Jean Deschamps de 1747 le qualifie de «vieillard octogénaire», ce qui ferait remonter sa naissance aux environs de 1667 (L1, p. 79).

2. Formation

Certainement très cultivé dans le domaine de l'histoire, de la politique et de la théologie protestante. Avant de se rendre aux Pays-Bas, il aurait fait un séjour à Genève, en compagnie d'Antoine Teissier (L2 p. 148).

3. Carrière

Sa correspondance se situe entre 1703 et 1745 ; ses lettres sont adressées d'Amsterdam. Il interrompt partiellement ses activités de 1734 à 1736 pour cause de maladie et de fatigue des yeux (B.H.P., ms. 295, lettre de P. Coste du 28 novembre 1734 ; lettre de Desmaizeaux du 24 septembre 1736 ; lettre de Barbeyrac à Turettin d'oct. 1735, L1, p. 81) ; le contrat passé avec Prévost L'Eschevelé en 1735 le dit «valétudinaire» ; il subit une attaque de paralysie en 1743 (lettre de La Chapelle, 11 févr. 1743, ms. 295). A partir de 1689, il semble avoir passé toute son existence à Amsterdam.

4. Situation de fortune

«Mr. de La Motte est un de mes anciens amis, habitué à Amsterdam depuis le Refuge. Il aime les Lettres, et se fait un plaisir de rendre service aux gens de lettres, et même de se charger de la correction des Ouvrages qu'ils font imprimer. Aussi s'adresse-t-on à lui de toutes parts...» (lettre de Desmaizeaux à Bouhier, s.d., B.N., ms.fr. 24410, f° 422-423). P., correcteur protestant d'Amsterdam qui exerça entre 1689 et 1745 environ, fut certainement le plus célèbre des correcteurs et «courtiers littéraires» de Hollande (L1, p. 83 et suiv.). Chargé des intérêts des auteurs de langue française auprès des imprimeurs hollandais, il est à la fois correcteur, agent d'édition, rédacteur ou directeur de publication. Il travaille pour le compte de Wettstein et Smith, mais aussi de Changuion, Humbert, Paupie, Châtelain, Mortier, etc. C'est lui qui négocie entre Desmaizeaux, Marchand et le libraire Fritsch le contrat d'édition des Lettres de Bayle (BS1, p. 83 et suiv.).

Menacé de cécité, il s'associe à Prévost L'Eschevelé (ou L'Esclave, si l'on en croit une lettre de Rousset de Missy citée par Lagarrigue («Les coulisses de la presse...», p. 82) par contrat passé le 15 avril 1735 pour la durée d'un an en vue d'un partage des ouvrages à corriger (six lettres de J.B. Le Prévost à C. de La Motte, 11 mars 1735 - 6 mars 1738, Catalogue des manuscrits de la collection Prosper Marchand par C. Berkvens-Stevelinck, Brill, Leiden, 1988, p. 11) ; il rompt avec lui par un acte de liquidation le 29 mai 1736 ; le partage des oeuvres en chantier donne lieu à d'âpres querelles (voir le dossier «J.B. Le Prévost», march.2, publié dans Sgard, Prévost romancier, p. 626-640 - mais il ne s'agissait pas, comme je l'ai cru, de Prévost le romancier ; voir à ce sujet la mise au point de S. Larkin dans «Voltaire and Prévost »). Persécuté par P., qui «faissoit ce qu'il pouvoit pour detourner les libraires de luy donner du travail», Prévost l'Eschevelé obtient la protection du marquis d'Argens, et grâce à lui, de Voltaire (lettre du marquis à P. Marchand, 31 janv. 1737, dans Correspondance, éd. Larkin, p. 100). Voltaire lui confie effectivement la correction des Eléments de la philosophie de Newton (voir J. Vercruysse, Voltaire en Hollande, S.V.E.C. 46, 1966).

5. Opinions

Il est surtout lié avec les intellectuels protestants de Londres, de Genève et de Lausanne : Desmaizeaux, Beausobre, La Chapelle, Barbeyrac, Crousaz, Vernet. Il a entretenu une longue amitié avec P. Coste, dont il avait édité le Dictionnaire en 1716 ; (BS2, p. 82, contrat du 14 août 1716) et qui l'inscrit sur son testament, en compagnie de Barbeyrac (lettre de Coste à La Motte, 6 mars 1740, ms. 295). L'inventaire de sa correspondance, qui comprend 127 lettres, a été établi par B. Lagarrigue L2).

6. Activités journalistiques

Sans qu'on puisse affirmer que P. a rédigé des articles de presse, il a joué, en qualité de correcteur, un rôle important dans la gestion de plusieurs périodiques (Journal des savants, Bibliothèque germanique). Il eut certainement un rôle de premier plan dans le choix des articles repris dans l'édition hollandaise du Journal des savants en 1716 (L1 p. 92-93). Son rôle dans la gestion de la Bibliothèque germanique, dont il dirigea l'édition jusqu'au tome L, est attesté à partir de 1723 (ibid., p. 94). Il a également joué un rôle dans la Bibliothèque raisonnée (ibid., p. 95-97), mais n'a pas écrit d'articles : la correspondance de P. et Barbeyrac (ms. 295 à la B.H.P.F.) a permis de compléter l'attribution d'une vingtaine d'articles de ce journal à Barbeyrac, mais elle ne permet pas d'établir une participation de P. (voir L2). Il a eu une part active à la publication de la Nouvelle Bibliothèque «ou Histoire littéraire des principaux écrits qui se publient», La Haye, Paupie, 1738-1742 ; Gosse, 1742-1744, 16 vol. (D.P.1 1006). Il ne semble pas avoir écrit d'articles ; en avril 1739, il écrit à Desmaizeaux : «Je ne saurois vous dire qui sont les Auteurs de la N. Bibliothèque de La Haye ; ils sont plusieurs qui y travaillent, le Marquis d'Argens en est un» (cité par Larkin, Correspondance, p.86, n. d). Quatre ans plus tard, il écrit : «En général, quoique j'aie eu en gros l'inspection de ce journal pendant 1742, je n'ai pu le mettre sur le pied où je l'aurais souhaité parce que les affaires de Paupie allaient assez mal [...]. Les affaires du libraire étaient tout à fait dérangées vers la fin de décembre, force lui a été de vendre sa Bibliothèque à Gosse» (ms. 295, lettre de P. à La Chapelle, 11 fév. 1743). D'Argens, principal rédacteur du journal pour le compte de Paupie, lui avait donné un tour satirique et irréligieux ; P. recrute ses collaborateurs parmi les érudits protestants qu'il connaît (Chais, Barbeyrac).

8. Bibliographie

Sgard, J., Prévost romancier, Paris, Corti, 1968, annexe II, p. 626-640. – Larkin S., «Voltaire and Prévost, a reappraisal», S.V.E.C.E. 160, 1976, p. 7-135. – Id. (éd.) Correspondance entre Prosper Marchand et la marquis d’Argens, S.V.E.C. 222, 1984. – (BS1) Berkvens-Stevelinck C., Prosper Marchand et l’histoire du livre, Bruges, rikkerji Sint Catarina, 1978. – (BS2) Id., Catalogue des manuscrit de la collection Prosper Marchand, Leiden, Brill, 1988. – (L1) Lagarrigue B.P.L., «Les coulisses de la presse de langue française dans les Provinces-Unies pendant la première moitié du XVIIIe siècle d'après la correspondance inédite de Charles de La Motte (1667?-1751), correcteur à Amsterdam», Documentatieblad werkgroep achttiende euuw, t. XXII, 1990, p. 77-110. – (L2) Id., «La correspondance inédite de Charles Pacius de La Motte (1667?-1751) : source remarquable pour l'histoire du livre et du jourrnalisme de la première moitié du XVIIIe siècle», LIAS, t. XVII, 1990, p. 147-158. – Id., Un Temple de la culture européenne (1728-1753). L'Histoire externe de la Bibliothèque raisonnée des ouvrages des savants de l'Europe, thèse, U. de Nimègue, 1993.

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