MORAND

Numéro

590

Prénom

Pierre de

Naissance

1701

Décès

1757

1. État-civil

Pierre de Morand est né à Arles le 8 février 1701 : il était fils de Daniel de Morand, assesseur civil et criminel de la vigie d'Arles. Il a épousé, avant 1736, Marguerite de Chiavary (Moreri). II est mort à Paris le 3 août 175 7 et fut inhumé dans la paroisse de Saint-Sulpice (B.V. Arles, ms. 759, f° 192).

2. Formation

Il fut élève du collège des Jésuites de Lyon (Nouvelles de la Cour, 20 déc. 1736), fit ensuite des études de droit et fut reçu avocat au Parlement d'Aix. En 1731, il était acteur dans un groupe d'amateurs de théâtre à Nîmes (Mercure, févr. 1732). De 1739 à 1755, il est avocat au Parlement de Paris. Il a été membre de l'Académie d'Arles.

3. Carrière

Vers 1736, il quitte sa femme et se rend à Paris où il assiste, à la fin de l'année, à la représentation de Childéric. Pour avoir «jeté son chapeau dans le parterre» et manifesté son dépit lors de l'échec de L'Esprit de divorce en 1738, il est emmené à For-l'Evêque (B.N., n.a.fr. 10782, f° 175). On perd ensuite sa trace pendant dix ans. En juillet 1749, il loge Baculard d'Arnaud dans son appartement rue de Vaugirard (Ars., ms. 11683, f° 55). En 1750, il habite à l'hôtel de Médoc, rue des Cordeliers (n.a.fr. 10782, f° 175 ; Ars., ms. 10302, déc). Il est à cette époque 1'«agent» de Mme Doublet (Ars.,ms. 10783, f° 31). Un dossier de police du 1er septembre 1751 signale qu'il «est à la tête d'une petite assemblée qui se tient toutes les semaines sous le nom de petite académie dans un appartement loué exprès» (n.a.fr. 10782, f° 175). Peut-être y prononce-t-il le discours de réception du 28 juillet 1748 (Théâtre et œuvres diverses, t. II, p. 375). En 1749 selon Fréron, plus probablement à la fin de 1750, il devient agent littéraire du roi de Prusse en remplacement de Baculard d'Arnaud. Darget l'aurait fait nommer pour rendre «un service de plus» à d'Arnaud (lettre à Marshall, 29 mars 1751, D4429). Voltaire mentionne ce poste pour la première fois dans une lettre du 4 janvier 1751 (D4335). Au début de l'été 1752 M. est invité par le roi à se rendre à Berlin (f.fr. 22157, f° 82, 1er juin 1752) : Voltaire l'attend avec impatience (D4933), mais Darget est opposé à ce projet (D4941), qui ne se réalisera pas. A la fin de 1753. il perd sa charge d'agent du roi. La même année, sans doute, commencent ses fonctions de «mouche» (n.a.fr. 10782, f° 175). En 1757, il est correspondant littéraire de Caroline Louise, margrave de Bade-Dourlac.

4. Situation de fortune

L'héritage de son père se montait à «plus de 12 000 livres de rente» (L'Année littéraire, t. VI, 1757, p. 46), mais la rupture avec sa famille et le procès que lui intenta sa belle-mère lui firent perdre tous ses biens (ibid.). En 1750, il gagnait, en qualité d'agent du roi de Prusse, 1200 £ (n.a.fr. 10782, f° 175).

5. Opinions

Il fut «admis aux réunions littéraires du comte de Clermont et à la petite cour de la duchesse du Maine» (B.Un.), fut le commensal de Mme Doublet, et fut très lié à Baculard d'Arnaud.

6. Activités journalistiques

Correspondant littéraire de Frédéric II de 1750 à 1753 (voir Estrée, p. 314 ; Krieger, p. 184), il cesse ses fonctions sans doute en décembre 1753. Les rapports de la police de la Librairie signalent ses bulletins le 30 mars 1753 (f.fr. 22158, f° 125) et le 9 octobre (ibid., f° 178) ; une note du 15 janvier 1754 déclare : «on dit que de Morand le poète a perdu l'agence de Prusse à cause de sa lettre critique contre Rousseau parce que le roi de Prusse aime passionnément la musique italienne» (f.fr. 22136, f° 354 ; cf. f° 357). La brochure de M., Justification de la musique française, avait été publiée en décembre 1753 (f.fr. 22158, f° 199, 19 déc. 1753) sous la date de 1754. La correspondance littéraire de M. avec le roi de Prusse et avec la margrave de Bade-Dourlac est en cours d'inventaire.

Mellinet aîné mentionne « Morande » comme un des colla­borateurs du Journal encyclopédique (J.E.) en 1756 (L'Esprit des journaux, mai 1817, p. 246 ; voir Charlier et Mortier,p. 46). Morand ne fut pas fondateur du J.E., mais il était en 1756 l'un des deux correspondants du journal à Paris, l'autre étant Prévost de La Caussade. Ils furent tous deux remplacés l'année suivante par le chevalier de Méhégan (J.E., 1er janv. 1774, art. de P. Rousseau : renseignement fourni par P. Matthieu).

7. Publications diverses

Voir Brenner et Cior 18, n° 47170-47181. Y ajouter Les Amours des grands hommes, livret d'opéra, musique de Des Roziers (extraits dans Le Pour et contre, t. XI, p. 20-21 ; t. XII, P- 75-79) et Le Pot de chambre cassé, «tragédie pour rire ou comédie pour pleurer», Paris, s.d. [1749], vendue chez Clouzier (n.a.fr. 10782, f° 175).

8. Bibliographie

Moreri ; B.Un. ; N.B.G. ; Brenner : Cior 18. – Voltaire, Correspondence, éd. Besterman. – L'Année littéraire, t. VI, p. 44-51. – Flammermont J., Les Correspondances des agents diplomatiques étrangers en France avant la Révolution,Paris, 1896. – Estrée P. d', «Un auteur incompris, Pierre de Morand, l'homme et l'œuvre (1701-175 7)», R.H.L.F., t. XVI, 1909, p. 302-328. – Krieger B., «Die literarischen Korrespondenten Friedrichs des Grossen in Paris», Hohenzollern Jahrbuch, t. XVI, 1912, p. 184. – Le « Journal encyclopédique » (1750-1793) : une suite de l'«Encyclopédie», Notes, documents et extraits réunis par G. Charlier et R. Mortier, Bruxelles, Paris, 1952. – Froidcourt G. de, Pierre Rousseau et le Journal encyclopédique à Liège (1756-1759), Liège, 1953.

9. Additif

Carrière : Selon Jochen Schlobach, Morand avait été, au début des années quarante l’un des informateurs de Mme Doublet. Grâce à ses relations avec Baculard d’Arnaud, il entra au service de Frédéric II, et assura pendant plus de deux ans (de 1750 à 1753) sa correspondance littéraire. Selon L. Bongie, Morand est vers 1752 l’un des agents secrets à Paris de Frédéric II ; Pidansat de Mairobert lui fournit des nouvelles ; il est en même temps surveillé par Fréron, qui informe l’inspecteur d’Hémery de ses activités (Laurence Bongie, La Bastille des pauvres diables, PUPS, 2010, p. 79-80). À partir de janvier 1757, il rédige la correspondance littéraire de la marquise de Bade-Dourlac, dite « correspondance littéraire de Karlsruhe », mais il meurt le 3 août 1757 et sera remplacé par Maillet-Duclairon (Voir le recueil dirigé par J. Schlobach, Correspondances littéraires inédites, Champion-Slatkine, Paris-Genève, 1987, p. 61 et suiv.) (J.S.).