LUCAS

Numéro

531

Prénom

Jean

Naissance

1646

Décès

1697

1. État-civil

Jean Maximilien Lucas est né à Rouen en 1646 ; il était probablement fils du pasteur Lucas-Janssen de Rouen (Van Eeghen, p. 228). Il s'établit en Hollande vers 1667, devient membre de l'Eglise wallonne le 9 juin 1669 avec une attestation de Rouen datée du 2 mars 1667. Il acquiert la qualité de citoyen d'Amsterdam le 19 août 1670. Le 9 novembre 1674 sont publiés les bans de Jean Maximilien Lucas et de Maria Verjannen, née le 15 mars 1658 à Oude Kerk de Willem Verjannen, maître d'école, et de Catharina Deckers. De ce mariage naissent une fille, Catharina (i mai 1676) et un garçon, Willem (7 janv. 1680). L. a été enterré à La Haye le 28 février 1697 (B.W. ; Van Eeghen, p. 228).

3. Carrière

Citoyen d'Amsterdam en qualité de libraire le 19 août 1670, inscrit à la guilde le 6 octobre 1671, L. travaille d'abord, semble-t-il, en association avec le libraire Hieronymus Sweerts, à l'adresse de Wakende Hond sur le Dam : en 1674, il est imposé à 10 florins, à la suite de Sweerts, imposé pour 15 florins ; ils louent, l'un et l'autre, une maison à la veuve Hondius d'Utrecht. De 1673 à 1677, «Jean-Maximilien Lucas, marchand libraire tenant son magazin sur le Dam» publie sous son nom divers textes français et latins tels Receptio publica unius juvenis medici, in academia burlesca, Joannis Baptistae Molière (1673), les œuvres du médecin Thomas Willis (1676), les Délices de la France de W. Croone (1677). Le 11 janvier 1678, il est frappé d'une amende de 6,6 florins au sujet de l'édition d'un texte latin. Le 30 août 1680, un curateur est désigné pour la liquidation de ses biens, dont l'inventaire est dressé le 14 septembre. La vente judiciaire, le 3 janvier 1681, produit 443,4 florins, dont 375 sont attribués à son logeur, Frederick de Wit. L. se consacre alors à des éditions plus ou moins clandestines. En 1683, il est visé par Chavigny dans un pamphlet intitulé : « Les francs fripons dans Mercure au gibet et le libraire banqueroutier», et demande à être entendu par le bailli, le 2 octobre 1683.

L. serait alors associé à Jean Crosnier, auteur de « lardons » (voir art. «Crosnier» et «Chavigny de La Bretonnière»). Le 31 décembre 1685, L. passe un contrat avec Isaac de Later pour une gazette (non identifiée). Il est condamné, au cours de l'été 1686, pour impression de gazettes, puis, le 12 décembre 1686, pour impression et diffusion de livres interdits ; le 19 décembre, un arrêt le condamne à 630 florins d'amende et à trois ans de bannissement ; le 27 avril 1688, il est de nouveau condamné pour infraction à la sentence rendue (Van Eeghen, p. 229). Le 4 mars 1694, il sera enfin condamné, pour avoir imprimé la Quintessence, à quatre ans de bannissement et finira ses jours à La Haye.

5. Opinions

L. passe pour avoir été «ami et disciple de Spinoza» (Nouvelles littéraires de 1719, citées par G. Cohen, «Le séjour de Saint-Evremond en Hollande, 1665-1670», R.L.C., 1925­-1926, p. 65) ; mais Du Sauzet, directeur des Nouvelles littéraires hésite, pour l'attribution de la Vie de M. Benoît de Spinoza, entre L. et Ceinglen ; M. Francès opte pour Ceinglen (voir ce nom). Sur le milieu intellectuel de L., voir G. Cohen (art. cité) et P. Vernière (Spinoza et la pensée française avant la Révolution, Paris, P.U.F., 1954,1.1, p. 26 et suiv.).

6. Activités journalistiques

L. entreprend de travailler à la Gazette d'Amsterdam sans doute à la fin de 1685. Le 21 février 1686, les gazettes françaises sont interdites à la demande de l'ambassadeur de France, le comte d'Avaux qui écrit au roi, le 14 juillet 1686 : « Il me paraît que Messieurs d'Amsterdam sont dans de très bonnes dispositions ; ils ont marqué dans le châtiment de Lucas, leur gazetier, l'envie qu'ils ont de plaire à Votre Majesté» (cité dans G.H., p. 96). Aucune trace n'a été gardée de ce «châtiment» (Van Eeghen, p. 229) et les gazettes continuent de paraître clandestinement.

Quintessence des nouvelles historiques, critiques, politiques, morales et galantes, La Haye et Amsterdam, 1688-1730, in-folio : L. crée le journal vers septembre 1688 ; les premiers numéros connus datent de 1689 (D.P.1 1153). En tête du numéro du 4 octobre 1723, on peut lire : «Le sieur Lucas, son fondateur, écrivait Dieu sait comment ; son style bas, sa fade poésie et les flots d'impertinences qu'il répandait sur le parti qu'il pouvait insulter impunément, font son caractère » (cité dans G.H., p. 183). A sa mort, Bayle écrit à l'abbé Dubos : «Vous avez su sans doute la mort de Lucas, le fameux auteur de la Quintessence des Nouvelles, qui a publié pendant tant d'années un si horrible détail de satires infamantes et grossièrement fabuleuses» (lettre du 2 mai 1697, publiée par F.P. Denis, «Lettres inédites de P. Bayle», R.H.L.F., t. XIX, 1912, p. 929). On connaît des exemplaires de la Quintessence datés de septembre 1688 ; le journal paraît alors deux fois par semaine (Van Eeghen, p. 230). L. semble le publier régulièrement jusqu'en 1694. Le 1er mars 1694, il est arrêté et interrogé ; il déclare que l'auteur-imprimeur de la Quintessence est Seljeer (en français Chayer), et que le journal est diffusé par Oossen, Mortier, Wolfgang, Brunei et quelques autres, à La Haye et Amsterdam. Interrogé le lendemain sur ses informateurs, il cite «Dumon» ou «Bomon», Dubreuil, qui lui fournit des nouvelles de Paris, Dorval, «Tienne le Feebeere» (Van Eeghen, p. 229). II est condamné, le 4 mars 1694, à quatre ans de bannissement.

8. Bibliographie

8. G.H. – Van Eeghen I.H., De Amsterdamse boekhandel (1680-1725), Amsterdam, 1960-1967, t. IV, p. 228-230.

Auteurs

9. Additif

Jean Maximilien Lucas, né à Quevilly le 19 avril 1647, était le huitième des dix-huit enfants du libraire rouennais Centurion Lucas (1608-1678) et de Judith Mauclerc.  Reçu maître à Rouen en février 1665, il s'installa avant 1669 aux Pays-Bas, où le rejoignit son frère Abraham, également membre de la corporation des imprimeurs de Rouen. Certains frères passèrent quant à eux en Angleterre. (Gerard Lemmens, d’après les Archives départementales de Seine-Maritime et Jean-Dominique Mellot, L'Édition rouennaise et ses marchés, Paris,  École des Chartes 1998, p. 242, 278-280)