LENFANT

Numéro

497

Prénom

Jacques

Naissance

1661

Décès

1728

1. État-civil

Né à Bazoches-en-Beauce le 13 avril 1661, il est fils de Paul Lenfant, ministre à Châtillon-sur-Loing, mort à Marbourg en juin 1686, et d'Anne Dergnoust de Pressinville, morte à Berlin le 6 décembre 1692. Ses parents avaient donc émigré au moment de la Révocation. Il épousa en 1705 Emilie Gourgeaud (ou Gourjault, selon Haag) de Venours, «d'une maison illustre du Poitou». Ils n'eurent pas d'enfants. Il mourut le 7 août 1728 à Berlin, et fut inhumé au pied de la chaire de l'église française du Werder.

2. Formation

L. étudia la théologie à Saumur ; il logeait chez Jacques Cappel, professeur d'hébreu ; il continua ses études à Genève, où il fut compagnon du frère de Bayle, Joseph (L2, p. 187). Il espérait s'y faire recevoir ministre, mais le consistoire genevois, à qui il fut dénoncé comme socinien, lui refusa l'ordination (Haag, p. 549 ; son père était universaliste, et grand ami de Pajon : voir L2, p. 155, n. 91). Il passa donc à Heidelberg, où il reçut l'imposition des mains en août 1684.

3. Carrière

Saumur, Genève, Heidelberg. Chapelain de l'électrice douairière palatine, et pasteur ordinaire de l'église française de Heidelberg, il dut quitter cette ville en octobre 1688, lors de l'invasion du Palatinat par les Français. Arrivé à Berlin en novembre 1688, il reçoit de l'électeur de Brandebourg, Frédéric-Guillaume, vocation pour desservir les églises françaises de la ville, et commence ses fonctions le 21 mars 1689. Il fut, avec Isaac de Beausobre, chapelain de Sophie-Charlotte, reine de Prusse, puis du roi (voir art. «Beausobre»). Lorsque les pasteurs français furent affectés à des paroisses particulières (1715), il reçut celle du Werder, où il prêcha jusqu'à sa mort.

Il fut conseiller du Consistoire Supérieur, membre du Conseil français (qui dirigeait les affaires générales de la communauté française), membre de l'Académie des Sciences de Berlin depuis le 2 mars 1724.

Voyage en Hollande et en Angleterre en 1707 (il prêcha devant la reine Anne) ; à Helmstad, 1712, Leipzig, 1715, Breslau, 1725. Il destinait ces voyages à la recherche de livres rares et de manuscrits, pour la préparation de ses ouvrages d'histoire ecclésiastique et religieuse.

5. Opinions

Toute l'oeuvre de L. est celle d'un érudit calviniste, de tendance latitudinaire. Il poursuivit plusieurs polémiques savantes (voir «Réponse aux remarques de M. de la Monnoye sur le Poggiana», Bibliothèque germanique, t. IV, art. 2) ou confessionnelles (il repousse l'accusation de socianisme : Réponse de M. Lenfant à M. Dartis au sujet du socianisme, Berlin, 1712, in-4°). Ses recherches étant surtout orientées vers les préliminaires et l'histoire de la Réformation, il répondit aux critiques des Jésuites (Apologie pour l'Auteur de l'Histoire du concile de Constance contre le Journal de Trévoux du mois de décembre 1714, Amsterdam, 1716, in-4° ; Préservatif contre la réunion avec le siège de Rome, Amsterdam, 1723, 5 vol. in-8°).

Il entretint des relations épistolaires avec Bayle (L1, p. 377 ;P., p. 377 ; L2, p. 232, n. 91 ; ce fut la lettre de Bayle à L. du 26 juil. 1685 qui entraîna la rupture entre Bayle et Le Clerc ; L2, p. 262-263), Le Clerc, Leibniz, l'abbé Bignon, le chancelier d'Aguesseau. L. fait partie de la communauté européenne des chercheurs et des savants. Sur ses relations avec Barbeyrac, Chauvin, Des Vignoles, Formey, C. de Missy, voir les notices qui les concernent. La B.P.U. garde deux ensembles de lettres de lui : 1) Arch. Tronchin 42, fonds Louis Tronchin, 16 lettres de L. et une de son père, datée du 26 octobre 1683, de Chatillon-sur-Loire, pour recommander son fils au pasteur L. Tronchin ; celui-ci fut effectivement le professeur de L., d'où la correspondance échangée pendant de longues années ; 2) ms. fr. 487, fonds Turettini, f° 380 : lettres échangées de 1688 à 1725, copies d'articles, recommandations diverses, demandes de renseignements entre L. et Turetiini.

6. Activités journalistiques

Premier auteur du projet et fondateur de la Bibliothèque germanique, il réunissait chez lui tous les lundis la «société des anonymes» qui rédigeait le journal (cf. art. «Beausobre»). Il en écrivit la Préface générale, t. I, 1720, p. 3-5 (selon «Mémoire historique...», p. 122). En qualité d'auteur, il y inséra des dissertations, lettres, études diverses depuis le tome I (1720) jusqu'au tome IV (1722).

Il avait fourni auparavant des articles à la Bibliothèque choisie de Le Clerc (t. XVI, XVIII, XXI, XXIII), aux Nouvelles de la République des Lettres de J. Bernard (mai, juin, sept.1709 ; fév., mars 1710) et à l'Histoire critique de la République des Lettres de S. Masson (t. VI).

7. Publications diverses

L. n'a pas laissé moins de 17 ouvrages : éditions, traductions (dont celle de la Recherche de la vérité en latin, ou de l'Histoire de la papesse Jeanne de Spanheim), remarques critiques, controverses, sermons ; comme tant d'émigrés, L. participe activement aux travaux de la République des Lettres. Les ouvrages les plus édités, et qui lui ont valu une notoriété européenne, sont ses grandes études d'histoire ecclésiastique : comme son confrère Isaac de Beausobre, il poursuit l'enquête critique des historiens protestants, destinée à justifier la Réforme contre l'autorité romaine (Histoire du concile de Constance, Amsterdam, 1714, 2 vol. in-4° ; Histoire du concile de Pise, Amsterdam, 1724, 2 vol. in-4° ; Histoire de la guerre des Hussites et du concile de Bâle, Amsterdam, 1731, 2 vol. in-4°). On peut consulter la liste des ouvrages de L. dans les notices qui lui ont été consacrées.

8. Bibliographie

Les notices concernant L. ont toutes une origine commune : le «Mémoire historique de la vie, de la mort et des ouvrages de M. Lenfant», Bibliothèque germanique, t. XVI, 1729, p. 115 et suiv., retranscrit dans l'Histoire de la guerre des Hussites, 1731, t. I, p. 16-18. Nous n'avons fourni la référence des renseignements rassemblés ici que lorsqu'ils venaient d'autre lieu : Haag. – (L1) Labrousse E., Inventaire critique de la correspondance de Pierre Bayle, Paris, 1961, Catalogue alphabétique, art. «Lenfant», p. 377. – (L2) Id., Pierre Bayle, t. I, «Du Pays de Foix à la cité d'Erasme», La Haye, 1963.

Auteurs