HALLER

Numéro

385

Prénom

Albrecht von

Naissance

1708

Décès

1777

1. État-civil

Albrecht (ou Albert) von Haller est né à Berne en octobre 1708, sans doute le 16 (L, p. 94). Il était fils de Niklaus Emmanuel H. (1672-1720), avocat et chancelier du comté de Bade, et de Anna-Maria Engel (1681-1713). Il a épousé Marianne Wyss le 19 février 1731 à Berne (L, p. 96) ; elle meurt accidentellement en 1737. Il eut trois fils : de son premier mariage, Gottlieb Emmanuel (1735-1786) ; d'un second mariage, Rudolf Emmanuel (1747-1833), Albrecht (1758-1823). H. est mort à Berne le 12 décembre 1777.

2. Formation

Il suivit d'abord les leçons d'un précepteur, Abraham Baillodz, puis entra à l'école publique de Berne, qu'il quitta en 1722 après trois années d'enseignement. Il suivit l'enseignement du docteur en médecine J.F. Neuhaus, ami de son père, et commença des études de botanique. En 1724, il s'inscrit à l'université de Tübingen et y suit les cours d'anatomie de Johann Georg Duvernoy. Dès le 21 mars 1725, il publie son premier mémoire scientifique, une réfutation de Coschwitz (L, p. 95). Le 27 juin 1725, il s'inscrit à à la faculté de médecine de l'université de Leyde, où il suit les cours de Boerhaave et d'Albinus. Au cours de l'été 1726, il voyage dans le Nord des Provinces-Unies et rencontre J. Barbeyrac. Il soutient sa thèse de doctorat, Dissertatio inauguralis sistens Experimenta et dubia circa ductum salivalem novum Coschwizianum, le 23 mai 1727. Il se rend ensuite en Angleterre, puis à Paris, en août 1727, où il assiste à des opérations chirurgicales de Le Dran et de Wislow ; il suit à Bâle les cours de mathématiques de J. Bernoulli (I). En juillet 1728, il fait avec Gesner ses premières ascensions alpines. Il s'installe, au début de 1729, à Berne où il occupe en 1735-1736 un poste de bibliothécaire. Il est nommé en 1736 professeur d'anatomie, de chirurgie et de botanique à l'université de Göttingen, où il restera jusqu'en 1753. A cette époque, ses activités de savant, de président de la Société royale des Sciences de Göttingen et de journaliste scientifique l'ont rendu célèbre dans toute l'Europe. Il refuse l'invitation de Frédéric II, qui l'appelait à Berlin, et préfère retourner dans sa patrie. Il devient membre du Conseil des Deux-Cents. Il est nommé gouverneur de l'hôtel du Sénat de Berne et directeur des salines de Roche, près d'Aigle. Il passe à Berne ses dernières années, couvert d'honneurs : François Ier d'Autriche le crée chevalier ; Joseph II, de passage à Berne, lui rend visite ; Gustave III de Suède lui confère l'ordre de l'Etoile polaire. H. entretient avec les savants de toute l'Europe une correspondance suivie : on estime à 1100 le nombre de ses correspondants ; sa correspondance a été recensée par F. Thormann (Register zu Briefsammlung von Albrecht von Haller, in Beilage zum Bericht der Stadbibliothek [Bern], Bern, 1937).

6. Activités journalistiques

Il a collaboré régulièrement à la Bibliothèque raisonnée de 1742 à 1748 au moins : une lettre qu'il adresse à Gesner le 22 novembre 1742 précise qu'à cette date, il a déjà donné quatre comptes rendus à la B.R. ; le total de ses contributions s'élève à une cinquantaine d'articles, consacrés pour la plupart à la médecine, aux sciences naturelles, aux mathématiques, à l'histoire, aux voyages (L, p. 97-98) ; on y compte également un compte rendu très élogieux de Clarissa de Richardson. Sur le détail de cette collaboration, voir J.D. Candaux, D.P.1 169, p. 196-197, et B. Lagarrigue, p. 97-102.

Du temps de son séjour à Göttingen, Haller a fourni également de nombreux articles aux Göttingischen Zeitungen von gelehrten Sachen, dont il a été le directeur de 1747 à 1753 (v. Guthke K.S., Haller und die Literatur, Götingen, 1962).

8. Bibliographie

Dictionnaire historique et biographique de la Suisse. – Lagarrigue B., Un temple de la culture européenne (1728-1753). L'Histoire externe de la «Bibliothèque raisonnée des ouvrages des savants de l'Europe», Nimègue, 1993 : on trouvera dans cet ouvrage une bibliographie des études consacrées à la vie de Haller.

Auteurs

9. Additif

Opinions : Les recherches sur Albrecht von Haller ont considérablement progressé grâce au projet de recherche « Albrecht von Haller et la République des Lettres au XVIIIe siècle » (http://www.haller.unibe.ch/index.html) mené conjointement par l’Institut d’histoire de la médecine de l’université de Berne et par la Bibliothèque bourgeoise de Berne (sous le patronage de la Fondation Albrecht von Haller) entre les années 1990 et 2003. Une partie du projet a été consacrée aux œuvres publiées et manuscrites de Haller et à l’exploitation des données qu’elles contiennent pour la constitution d’une importante base de données (« Haller Datenbank »). C’est à Berne en effet, ville natale de Haller, que sont conservés les manuscrits et la correspondance de Haller. 13 300 lettres adressées à Albrecht von Haller ont été répertoriées ainsi que 3700 lettres rédigées par lui (http://www.haller.unibe.ch/akor_d.html). Ce dépouillement de la correspondance de Haller a permis d’évaluer le nombre de ses correspondants à 1200 dans toute l’Europe. La plupart de ces lettres proviennent d’Allemagne et de Suisse ; parmi les lieux d’expédition, viennent ensuite la France et l’Italie. Ce travail de dépouillement a abouti à la publication d’un répertoire des correspondants de Haller : Urs Boschung, Barbara Braun-Bucher, Stefan Hächler, Anne Kathrin Ott, Hubert Steinke, Martin Stuber, Repertorium der Korrespondenz Albrecht von Hallers 1723-1777, (Studia Halleriana, vol. VII), Verlag Schwabe & Co. AG, Basel, 2002, 2 vol. La liste des correspondants de Haller (avec les références à la correspondance) est accessible à l’adresse http://www.haller.unibe.ch/akor00_d.html. Quelques extraits de la correspondance de Haller ont été édités (http://www.haller.unibe.ch/bbrief_d.html)

À l’occasion de ce projet de recherche, plusieurs aspects de l’œuvre de Haller ont été explorés à travers les manuscrits retrouvés (notices préparatoires aux séminaires, observations anatomiques, extraits, etc.). On trouvera d’intéressantes introductions (en allemand) aux principaux axes de l’activité de Haller — médecine, botanique, belles-lettres — sous les adresses suivantes :

http://www.haller.unibe.ch/wmedi_d.html,

http://www.haller.unibe.ch/wbotan_d.html

http://www.haller.unibe.ch/wdicht_d.html

Activités journalistiques :  L’activité de journaliste de Albrecht von Haller concerne essentiellement les comptes rendus qu’il publia dans la Bibliothèque raisonnée ainsi que dans la revue allemande, les Göttingische Zeitungen von gelehrten Sachen. Les comptes rendus qu’il fit pour la Bibliothèque raisonnée s’élèvent à une quarantaine et sont aujourd’hui accessibles sous forme électronique à l’adresse http://www.haller.unibe.ch/hallerol.html#Sammelwerke sous la rubrique intitulée « Rezensionen ».

Haller réserva la part la plus importante de son activité critique aux feuilles savantes de Göttingen, les Göttingische Zeitungen von gelehrten Sachen, journal qui prit le titre à partir de 1753 de Göttingische Anzeigen von gelehrten Sachen. Entre 1739 — date de fondation de la revue — et 1777 — l’année où Haller mourut, il y publia environ 9000 comptes rendus. Les liens entre Haller et Göttingen remontaient à l’année 1736, lorsque celui-ci avait été nommé professeur à la chaire d’anatomie, de botanique et de chirurgie de la jeune université de Göttingen (ouverte en 1734). Dès le début, Haller avait joué un rôle clé pour le développement de cette université, ainsi que pour le réseau d’institutions qui s’était développé autour d’elle : en 1747, il était devenu rédacteur des Göttingische Zeitungen von gelehrten Sachen, puis président de l’Académie des sciences dès sa création en 1751. Haller demeura à Göttingen jusqu’en 1753, année de son retour à Berne. Malgré ce départ, il continua à rédiger de nombreux comptes rendus pour les Göttingische Anzeigen von gelehrten Sachen.

Pour situer la contribution de Haller aux feuilles de Göttingen, il faut préciser que ce journal faisait paraître entre 800 et 900 recensions par an. Entre 1771 et 1777, on estime que la moitié du journal était occupée par les comptes rendus de Haller. Grâce aux archives du journal savant conservées à l’Académie des sciences de Göttingen, on a pu reconstituer que Haller était rémunéré pour son activité de critique. Le prix des comptes rendus était, comme aujourd’hui, fonction du nombre de signes. Un cahier de comptes rendus (soit 16 pages au format in-8) revenait à 4 rthlr (avec 1 rthlr = 3,75 livres tournoi). Selon les principes fixés par les rédacteurs, le budget annuel pour les comptes rendus était fixé à 440 rthlr. Mais dans la pratique, le journal contenait souvent plus de cahiers et, par conséquent, le budget consacré aux comptes rendus pouvait être plus élevé. Ainsi en 1771, il représentait 546 rthlr, soit 40% des dépenses du journal.

Dans la mesure où les comptes rendus de Haller occupaient la moitié du journal, les sommes que celui-ci percevait étaient beaucoup plus élevées que celles que touchaient ses collègues. En 1771, il reçut pour son activité 195 rthlr et 13 gr (soit 36% du budget consacré aux comptes rendus) ce qui correspondait à la production de 1°100°100 signes (782 pages). Ses vingt collègues se partageaient la place restante, ce qui faisait une rétribution en moyenne pour chacun de 12 rthlr. En 1772, Haller perçut 210 rthlr ( pour un budget de 545 rthlr consacré aux comptes rendus) et en 1777, 246 rthlr. Ironie de l’histoire, même après sa mort, Haller du point de vue du nombre de comptes rendus et donc de la rémunération, demeurait toujours en première position (avec un total de 147 rthlr et 16 gr.). Il avait en effet rédigé tant de comptes rendus que ses articles continuèrent à remplir les colonnes des Göttingische Anzeigen von gelehrten Sachen jusqu’en 1779. Pour prendre la mesure de la somme touchée par Haller en 1771, il n’est pas inutile de savoir que le salaire que lui versait l’université de Göttingen était de 600 rthlr. Les sommes perçues par Haller pour ses comptes rendus n’étaient donc pas symboliques et on peut affirmer que l’aspect financier entrait en compte parmi les raisons qui poussaient celui-ci à publier autant dans le journal savant de Göttingen.

On trouve à l’adresse http://www.haller.unibe.ch/Rezensio.html#Verzeichnis la liste des comptes rendus de Haller dans les Göttingische Anzeigen von gelehrten Sachen portant sur des ouvrages de belles lettres. On en profite pour signaler que la revue de Göttingen est maintenant accessible en ligne dans son intégralité à l’adresse : http://rzblx1.uni-regensburg.de/ezeit/?2141947&bibid=SUBGO et à partir de 1753 http://rzblx1.uni-regensburg.de/ezeit/?2141933&bibid=SUBGO.

La publication massive de comptes rendus par Haller dans les Göttingische Anzeigen von gelehrten Sachen ne se comprend pas en dehors du cadre général de la pratique scientifique qui était la sienne. Sa contribution au journal de Göttingen reflète, de fait, son activité quotidienne de compilateur et de producteur de bibliographies. Pour chaque livre qu’il lisait, Haller rédigeait une notice contenant un bref résumé de l’ouvrage ainsi que les commentaires qu’il lui inspirait. Cette manière de faire ne concernait pas seulement les feuilles savantes de Göttingen : Haller pratiquait également la méthode de l’extrait pour les ouvrages plus anciens, qui ne pouvaient plus faire l’objet de recensions. Il consignait ces extraits dans un répertoire dénommé Judicia, qui contient des notes (en latin) relatives aux ouvrages qu’il possédait dans sa bibliothèque, et qui n’ont pas été publiées dans le cadre d’une revue. Ce répertoire, composé de 5°000 notices manuscrites classées par ordre alphabétique, constituait le squelette de sa bibliothèque. Pour la rédaction de ses ouvrages et ses grandes bibliographies — la Bibliotheca Medicina, la Bibliographia Botanica, etc. — Haller se reportait à ces extraits, qu’ils soient manuscrits ou imprimés. Un même savoir issu du livre lu se retrouvait être reproduit sous des formes différentes (compte rendu, notice, bibliographie).

Bibliographie :  Hubert Steinke, Claudia Profos (éds), Bibliographia Halleriana. verzeichnis der Schriften von und über Albrecht von Haller, Basel, Schwabe (Studia Halleriana, VIII), 2004.

- Hubert Steinke, Urs Boschung, Wolfgang Proβ (éds), Albrecht von Haller : Leben – Werk – Epoche, Göttingen, Wallstein, 2008 (pour une brève présentation, voir http://www.haller300.ch/publications.html).

- Pour une biographie en français de Haller, voir http://www.haller300.ch/quietaithaller.html.

- une importante bibliographie sur Haller et son œuvre ordonnée par genres et chronologiquement depuis 1990, est accessible sous les adresses http://www.haller.unibe.ch/bsekun_d.html et http://www.haller.unibe.ch/b1990_d.html.

- Pour la bibliographie de ses œuvres, voir http://www.haller.unibe.ch/bprim_d.html.

- Pour les œuvres de Haller accessibles sous forme électronique, voir http://www.haller.unibe.ch/hallerol.html.

- Anne Saada, « Les relations entre A. von Haller et la France observées à travers le journal savant de Göttingen », in : Michèle Crogiez (dir.), Les intellectuels de Suisse alémanique et la culture francophone du XVIIIe siècle : tropismes et identité, Genève, Slatkine, 2008, p. 175-191 ;

- Anne Saada, « La contribution de Albrecht von Haller aux Göttingische Anzeigen von gelehrten Sachen : Les archives comptables », in : Jeanne Peiffer, Jean-Pierre Vittu, à paraître (Anne Saada).