CURSAY
Numéro
Prénom
Naissance
Décès
1. État-civil
Séraphin Marie Rioult de Douilly, marquis de Cursay ou Curzay, est né après 1700 et mort après 1768. Malesherbes parle de "M. de Cursay". Il a épousé une sœur du marquis de Menilles (Ars., ms. 12236, f. 224). Dans les contrats passés à propos du Journal étranger, il est parfois nommé "Sieur de Courcelles" ; mais à propos de la même affaire, Malesherbes parle aussi d'un autre "M. de Courcelles".
3. Carrière
Lieutenant en 1718 au Royal Roussillon, il fait campagne dans les Pyrénées, passe dans le régiment de Gesvres en 1723, est nommé capitaine, obtient une compagnie en 1729 au Royal Carabiniers, fait la campagne d'ltalie en 1733-1734, celle de Bohême en 1741 (siège de Prague). On le retrouve en Belgique en 1745-1746 ; puis il passe en Italie d'où il se rend en Corse comme brigadier d'infanterie en 1749. Son rôle en Corse est diversement jugé : commandant-en-chef en l'absence de Chauvelin, il a, selon les uns, entretenu avec les Corses de bons rapports qui facilitèrent plus tard l'annexion (D.B.F). Selon d'autres, ses maladresses altérèrent les relations entre Chauvelin et Grimaldi, commissaire de la République de Gênes. Chauvelin écrit au duc de Choiseul-Praslin, le 9 juin 1764 : "Après Aix-la-Chapelle, les Corses auraient tout accepté. M. de Cursay gâta tout pour se rendre nécessaire et pour prolonger son autorité, il trompa le gouvernement et les Corses" (Recueil des instructions, t. XIX). Sur la demande de Gênes, il fut arrêté et embarqué sous escorte le 9 décembre 1752. Il assiste aux États de Bretagne et semble y avoir joué gros jeu : il tenait "table ouverte où il invitait beaucoup de monde" (B.N., f.fr. 22158, f. 193 r., renseignement transmis par H. Guénot). On trouve dans des nouvelles à la main la note suivante : "9 janvier 1753. L'on dit que Mr de Cursay est en chemin pour venir à la Bastille" (B.V. Rouen, ms. Leber 6505, f. 55).
En 1753, il loge à Paris, rue Saint-Louis du Marais ; en 1754, il commande le camp de Saint-Malo. Pendant la guerre de Sept Ans, il fit campagne en Allemagne et fut promu lieutenant-général le 25 juillet 1762. Un document de 1769 dit que ses infirmités et surtout une surdité considérable l'ont séquestré du monde et l'ont obligé depuis de longues années de se retirer du service" (Ars., ms. 12236, f. 226).
4. Situation de fortune
En juillet 1753, il semble qu'il ait prêté 10 000 £ à Favier et La Marche pour racheter le privilège du Journal étranger (ibid., f. 159). Malesherbes écrit à Belle-Isle, le 10 août 1759 : "M. de Cursay a sans doute été trompé par M. de Lamarche mais ce n'est pas ma faute, je l'ai averti la première fois que je l'ai vu il y a 6 ou 7 ans" (f.fr. 22133, f. 286). La Marche se révélant incapable de lancer le journal, Cursay (ou Courcelles) intervient de nouveau : "L'impuissance où il voyait le sieur de La Marche de vaquer par lui-même à l'exercice de son Privilège lui fit concevoir l'idée d'une riche affaire ; il se présenta avec des fonds d'une Compagnie. Il proposa au sieur de La Marche de diviser le privilège en sols ; ces termes encore barbares dans la République des Lettres, furent définis en faveur de La Marche ; ils signifiaient qu'il devait céder à Courcelles et Compagnie les quatorze-vingtièmes de la propriété du Journal étranger" (Mémoire de Moreau de Vorme pour Hugary de La Marche, f.fr. 22133, f. 263 et suiv., cité par M.R. de Labriolle, "Conditions matérielles de la publication du Journal étranger", p. 179-180). Les conventions furent signées le 20 juillet 1754. Cursay lança alors la souscription du Journal étranger, qui obtint grand succès (1514 souscripteurs) puis se débarrassa de La Marche ; il somma Chevrier, prête-nom de La Marche, de verser sa quote-part, et sur défaut de celui-ci, devint le principal actionnaire du journal.
5. Opinions
Il fut en relations avec Voltaire pour des renseignements confidentiels (voir deux lettres de Voltaire à Mme Denis, sept. et oct. 1768, D 14244 et D 14313). Il était protégé par le duc de Montmorency (B.N., f.fr. 22133, f. 329, renseignement transmis par H. Guénot). Il semble qu'il ait été arrêté à Valenciennes en avril 1764 au moment où il allait gagner la Hollande sans passeport ; entré à la Bastille le 24 avril 1764, il n'en sortit que le 4 mai 1765 (Ars., ms.12236, f. 208 et suiv.) ; il était soupçonné d'entretenir des relations avec les jansénistes d'Utrecht.
6. Activités journalistiques
Principal bailleur de fonds du Journal étranger, il élimine La Marche et Chevrier dont il avait été d'abord la dupe, et donne au journal une assise financière qui lui vaudra l'estime de Malesherbes. Il est ainsi le premier à concevoir la gestion d'un périodique par une compagnie d'actionnaires. Il ne sut pourtant pas maintenir la périodicité du journal ; la publication ayant cessé de décembre 1758 à juillet 1759, le privilège fut révoqué par arrêté du conseil le 21 juillet 1759 (Labriolle, p. 83). Cursay fit alors intervenir le maréchal de Belle-Isle mais, semble-t-il vainement (ibid., p. 84). D'après le Mémoire pour le Sieur Hugary de La Marche Courmont par Moreau de Vorme, Courcelle aurait dirigé le Journal étranger d'avril 1754 à août-septembre 1755, mais il s'agit certainement de direction commerciale : c'est à lui qu'il faut s'adresser pour les abonnements ("Derniers avis sur le Journal étranger", dans le numéro d'avril 1754).
8. Bibliographie
D.B.F. – Archives de la Bastille, Ars. ms. 12236. – B.N., f.fr. 22133 et 22158. – Labriolle M.R. de, "Conditions matrielles de la publication du Journal étranger, dans L'Étude des périodiques anciens de M. Couperus, Nizet, 1972, p. 76-84.
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