BACULARD D'ARNAUD
Numéro
Prénom
Naissance
Décès
1. État-civil
François Thomas Marie de Baculard d'Arnaud est né à Paris le 15 septembre 1718, d'une famille originaire du Comtat Venaissin, établie à Lille (Delort, p. 151 ). «D'Arnaud» est un titre qu'avait pris son père, secrétaire du roi en 1717, et de très petite noblesse (D, p. 30) ; F. Baculard signe également «Arnaud de Baculard». Il épousa, le 9 août 1770, Antoinette Berger d'Aubigny (Jal, cité par D, p. 240), après avoir eu d'elle un fils, Dominique Antoine Esprit, né vers 1766 (D, p. 240-241). Il mourut à Paris le 8 novembre 1805.
2. Formation
ll fit ses études chez les Jésuites (Delort, p. 147 ; D, p. 29) et se fit remarquer par ses dons littéraires : à l'âge de quinze ans, il aurait écrit Idoménée, Coligni, ou la St. Barthelemy et Didon, tragédies qui ne furent pas jouées (O, p. 421 ; Feller)-Weiss. En 1736, il est élève externe au collège d'Harcourt (lettre de Voltaire à Moussinot, 20 avr. 1736) et envoie des vers à Voltaire sur ses tragédies (Voltaire à B., 22 janv. 1736). Voltaire lui offre des billets de spectacle et quelques sommes d'argent (22 mai 1736, 30 nov. 1736, 20 juin 1737, 5 janv. 1738, 20 janv. 1738) sans se résoudre à le prendre comme secrétaire. Il le charge de «petites besognes» : traduction d'un ouvrage italien, rédaction d'un avertissement (D, p. 36-37). Il le recommande à Helvétius (28 janv. 1739) qui le prend à son service (Voltaire à Helvétius, D 1906, 25 févr. 1739 ; D, p. 40-41). B. se rend à Cirey «sur un cheval de louage» (Voltaire à Moussinot, 25 avr. 1739) ; accueilli par Helvétius, il semble avoir eu avec lui de bonnes relations (D, p. 42-43). Voltaire lui enverra encore plusieurs sommes d'argent (9 janv. 1740, 26 mars 1740). B. publie en 1740 Coligni, ou la St Barthelemi (Amsterdam, Du Sauzet), tragédie tirée du second chant de La Henriade, et qui passera quelque temps pour être de Voltaire lui-même, à son grand dam (D, p. 44-48).
Il fut membre des académies de Caen, Montauban, Rouen, Berlin, Saint-Petersbourg (D, p. 154-155).
3. Carrière
Il est enfermé à la Bastille le 17 février 1741 pour avoir fait imprimer «l'art de foutre», ballet comique dont l'action se situe dans un bordel. Durey de Morsan, qu'il avait connu au collège, et l'imprimeur Osmont sont également internés (Ars., ms. 11480, f° 127, 151). B., grâce à l'intervention de son père (ibid., f° 139) et à l'offre de payer sa pension, est transféré à Saint-Lazare le 8 mars (ibid., f° 223, 227) puis libéré le 18 mai (D, p. 58). Malgré le succès de son roman, Les Epoux malheureux, en 1745, il reste dans la misère. Une «épître au cul de Manon» lui vaut une nouvelle surveillance de la police au début de 1748 (Delort, p. 151) mais aussi les compliments de Voltaire (lettre à B., 27 juin 1748) et l'intérêt de Frédéric de Prusse (O, p. 422). Il devient le correspondant français des princes de Würtemberg (Voltaire à B., 27 juin 1748, 25 oct. 1748) puis de Frédéric (O, p. 422) ; Voltaire lui fournit quelques pièces (lettres à B. du 28 nov. 1748, 29 déc. 1748). En février 1750, il fait donner avec succès Le Mauvais riche, comédie jouée par Le Kain en représentation privée (D, p. 65-66). En mars, B. se rend à Berlin ; il est élu membre de l'Académie le 11 juin (Discours de M. d'[B.] prononcé à sa réception à l'Académie royale [...] le 18 juin 1750, Berlin, 1750). Voltaire, jaloux de son influence ou irrité de sa liaison avec Mme Denis, ou encore, de ses relations avec Fréron (Delort, p. 152 ; D, p. 187-190), obtient son expulsion en novembre 1750 ; les imprudences et indélicatesses de B. semblent avoir hâté ce dénouement (D, p. 202-203).
B. sollicite alors Mme de Pompadour par l'entremise de Duclos (R. Duthil et P. Dimoff, S.V.E.C. 6, 1958, p. 141-146 ; J. Brengues, Charles Duclos ou l'obsession de la vertu, p. 82, et Correspondance de Charles Duclos, Saint-Brieuc, P. U. de Bretagne, 1970, p. 29-30). Il est alors conseiller de légation à Dresde (O, p. 423), fait un voyage à Berlin au moment du départ de Voltaire, sans succès, revient à Dresde, puis accepte l'invitation du comte de Frise et retourne à Paris en juin 1754 (ibid. ; D, p. 235). Il y passe le reste de ses jours. Incarcéré en 1793 pour avoir accueilli chez lui un émigré (Feller-Weiss) ou pour propos imprudents (O, p. 424), il est relâché, obtient une pension de 1800 francs en 1802 (Delort, p. 157), mais finit dans la misère.
4. Situation de fortune
D'après Longchamp et Wagnière (cités par D, p. 31), Baculard le père avait fait banqueroute «pendant la guerre de 1741, dans quelque régie où il avait été employé». B. n'était «rien moins qu'économe» (O, p. 424) ; Voltaire échoue à le tirer de la misère. ll reçoit 1000 £ par an de Frédéric et 1000 £ des Wurtemberg pour sa correspondance (Delort, p. 151) ; Frédéric lui envoie en outre 2000 £ pour son voyage en Prusse, mais B. les dépense et doit vendre sa bibliothèque 50 louis à Durand (Delort, p. 152). Vers 1781, en qualité de secrétaire du comte d'Artois, il reçoit pourtant une rente de 1200 £, tandis que la Cour lui assure 600 £ (D, p. 248-249).
5. Opinions
B. eut une correspondance suivie avec Voltaire, et fut aussi en correspondance amoureuse avec Mme Denis (lettres inédites dans la Revue Rétrospective, 1869-1870, p. 37-46 et dans E. Charavay, L'Amateur d'autographes, 1869, p. 172-176).
Il fut, dès 1744, orateur de loges maçonniques (celles de Patel et de Pecquet) : voir P. Chevallier,La Première Profanation du Temple maçonnique, Paris, Vrin, 1968, p. 85-88. Cette influence paraît dans son oeuvre.
Impliqué dans l 'affaire Goëzman, il subit, au cours du procès, les attaques de Beaumarchais en 1773 (D, p. 245-246).
6. Activités journalistiques
Il collabora au Mercure à trois époques de sa vie : en 1740-1743 comme poète («Descartes», juin 1740 ; «Epître à M.P...», janv. 1743) ; en août 1760, pour célébrer en vers la naissance de S.A.R. le prince Frédéric («Ode à S.M. le roi de Danemark») ; en 1777-1778 comme conteur («L'Epreuve», janv. 1778) et anecdotier («Stradella», déc. 1777 ; «Sybille», janv. 1778 ; «Fong et Kiang», févr. 1778). Il reçut très probablement une pension sur le Mercure en 1769 (M.S., 2 sept. 1769, cité par D, p. 239-240).
Il fut l'un des principaux collaborateurs de Fréron à L'Année Iittéraire à partir de 1754, pour les comptes rendus d'oeurves romanesques.
Il a publié de nombreux textes, en vers ou en prose, dans L'Abeille du Parnasse, Le Discoureur, Le Perroquet de Francfort (D, p. 39). Quand l'Almanach des Muses publie son «Epitre à Ariste», qui sera suivie de nombreuses pièces en vers, il est présenté comme l'«Young français» (1770, p. 73-75).
Dans le Journal des Dames, relevons en 1762 «Couplets à Mme ** sur l'air des francs-maçons» (N. Gelbart, Feminine and opposition journalism in old regime France. Le Journal des dames, Berkley, 1987, p.110) et «Jacques ou la force du sentiment» dans le numéro de février 1766, conte moral présenté comme le récit d'un «fait vrai».
Il a eu l'heureuse fortune de voir ses ouvrages donner lieu à de nombreux et considérables comptes rendus dans les journaux de 1745 à 1789 (Le Journal encyclopédique, 16 fois ; le Mercure, 13 fois ; L'Année littéraire, 7 fois ; Le Journal des Beaux-Arts, 3 fois).
7. Publications diverses
Il est surtout connu par son roman, Les Epoux malheureux (1745), fondé sur l'histoire vraie du jeune La Bédoyère qui épousa, malgré l'interdiction de son père, une comédienne (D, p. 267-307 ; J. Sgard, «La langue particulière du coeur : Les Epoux malheureux de Baculard d'Arnaud», Beiträge zur Romanischen Philologie», 1977, p. 39-44). Plusieurs de ses récits montrent le même goût pour l'anecdote vécue (cf. La Vie de Derues «exécuté à Paris en place de Grève le 6 mai 1777», Paris, 1777). Ses Oeuvres complètes ont été publiées en 1803 à Paris (11 vol. in-8°). Liste dans Cior 18, n° 9006-9156.
8. Bibliographie
Notice nécrologique (signée O.) dans la Revue philosophique, littéraire et politique (suite de la Décade philosophique),an XlV (1806), t. XLVII, p. 420-426.– Monselet C., «Baculard d'Arnaud» dans Les Oubliés et Les Dédaignés, Paris, 1861, t. II, p. 157-172.– Delort J., Histoire de la détention des philosophes et des gens de lettres à la Bastille et à Vincennes..., Paris, 1829, t. 2, p. 145-158.– La Villehervé B. de, Baculard d'Arnaud, son théâtre et ses théories dramatiques, Paris, 1920.– Van de Louw G., Baculard d'Arnaud romancier ou vulgarisateur. Essai de sociologie littéraire, Paris, 1972.–(D)Dawson R., Baculard d'Arnaud : life and prose fiction, S.V.E.C. 141-142, 1976.– Mervaud C., «Voltaire, Baculard et le prince Ferdinand», S.V.E.C. 183 (1980), p. 7-33.
9. Additif
Activités journalistiques : correspondant du Journal helvétique et, entre 1771 et 1772, du Nouveau Journal helvétique (Timothée Léchot)
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