ROUSSEAU

Numéro

712

Prénom

Jean Jacques

Naissance

1712

Décès

1778

Jean Jacques Rousseau est né à Genève le 28 juin 1712, fils d'Isaac Rousseau et de Suzanne Bernard. Il est mort à Ermenonville le 2 juillet 1778.

6. Activités journalistiques

En 1759, Malesherbes propose à Rousseau - par l'intermédiaire de Margency (Leigh, n° 888, 15 nov.) - une place au Journal des savants. Il la refuse (O.C., 1.1, p. 513). Il estime d'ailleurs peu les «auteurs périodiques» (O.C., 1.1, p. 502) et méprise leurs ouvrages éphémères, sans mérite et sans utilité» (à Vernes, 2 avril 1755, n° 286). Il songe un moment à insérer dans la Nouvelle Héloïse (O.C., t. II, p. 234, var. c) une violente critique de la presse. Ce qui n'empêche pas ce lecteur du Spectateur français (O.C., t. IV, p. 873, var. e) de s'abonner au Mercure dès juillet 1735 (Courtois, p. 24), de s'essayer dans le genre et d'apporter, parfois de mauvaise grâce, sa contribution à des feuilles de son temps.

Il donne au Mercure une «chanson mise en musique à Chambéry» (juin 1737, t. II, p. 1419) mais il n'est pas sûr que les paroles soient de lui (O.C., t. II, p. 1906), une « Réponse au mémoire anonyme intitulé Si le monde que nous habitons est une sphère» (20 sept. 1738, non publiée), une Lettre à M. D. (Leigh, n° 50) sur sa notation musicale (févr. 1743, p. 321-333 ; l'air noté annoncé pour le numéro suivant n'a jamais paru), une lettre à l'auteur du Mercure (n° 153) datée du 25 juillet 1750 (sept. 1750, p. 64-66), L'Allée de Silvie (p. 66-71) et une chanson traduite de Métastase (p. 169-172), la Lettre à Raynal (juin 1751, t. II, p. 98­102) et une lettre sur le troisième mode musical de Blainville (p. 174-178), un mémoire sur l'utilisation des ustensiles de cuivre (juil. 1753, p. 5-13), une lettre à de Boissy (n° 331) contre la publication dans le Mercure de novembre 1755 (p. 63-68) d'une version fautive de sa lettre à Voltaire du 7 septembre (protestation non publiée et remplacée dans le volume de décembre, 1er part., p. 250, par un Avertissement de l'éditeur), une autre lettre à de Boissy (n° 340) sur une réfutation anonyme de la Lettre de M. Philopolis (janv. 1756, t. I, p. 42-45), bientôt suivie d'un court billet au même (n° 376), l'autorisant à publier la lettre d'un «bourgeois de Bordeaux» (mars 1756, p. 64), etc.

La Suite de la Clef publie en mars 1743 (t. LUI, p. 174-178) L’Epître à Bordes, suivie (p. 179-181) de la lettre à Monthenault d'Egly du 20 février (n° 51).

En 1749, il forme le projet d'une feuille hebdomadaire : Le Persifleur, sorte de bibliographie fantasque que Diderot et lui doivent faire alternativement. Cela lui vaut d'être présenté à d'Alembert mais pour des raisons inconnues (n° 143, 1), le projet n'aboutit pas (O.C., t. I, p. 347) : la première feuille, esquissée par R., reste dans ses papiers (B.P.U. Neuchâtel. ms. R 41).

A-t-il envisagé en 1754 de faire un nouveau journal avec Diderot et d'Alembert (Moultou à A. Court, 29 mars, n° 217) ? C'est plus que douteux. Il ne peut s'agir du Persifleur. C'est sans doute un écho déformé des rumeurs circulant alors sur sa collaboration et ses responsabilités au Journal étranger (Nouvelles littéraires, 29 avril 1754 et rapport de l'auteur des Nouvelles à la main, à d'Hémery, 2 mai - d'après n° 210, n. a). Sur sa demande, Grimm ébauche la «Préface» ou «Discours préliminaire» (n° 210). On ne saurait dire si R. a refondu, en compagnie de Toussaint, ce texte (I. Hugary de La Marche-Courmont, Mémoires contre le Sieur Courcelles, 1758, 2. a - qui aurait fourni les «matériaux») ou s'il s'est contenté d'y insérer quelques lignes (n° 210, notes) : ce que le «Discours préliminaire » doit à sa plume reste à déterminer. Travaillait-il encore au Journal étranger en 1756 (notes ms. de Bertin Du Rocheret, Leigh, A 94) ? On ne sait : Deleyre, nouvellement chargé de cette publication (note de R., lettre de Deleyre, 17 août 1756, n° 423) lui demande en vain un «extrait italien» de musique (23 sept., n° 444). En 1757, Deleyre quittera le Journal étranger sans avoir seulement publié VEpître de Farsetti que R. avait pourtant promis de donner (29 nov. 1765, n° 449). Chargé, semble-t-il, de fonctions importantes au Journal étranger (seule la CL. n'en dit mot), R. paraît s'être très tôt désintéressé de l'entreprise. Il promet à Vernes de collaborer au Choix littéraire (2 avril et 6 juil. 1755, n° 286 et 306, 21 nov. 1758, n° 740, et 6 janv. 1759, n° 760) mais n'envoie aucun inédit ; l'essai De l'imitation théâtrale, pourtant destiné au Choix littéraire (n° 760) n'y paraîtra jamais ; la Reine fantasque (28 mars 1756, n° 400, n. d) non plus, car son auteur veut éviter les «tracasseries». Malgré l'autorisation de R. (n° 400, n. b), Vernes ne reproduit pas l'article « Economie politique » : le jugeant digne d'une édition séparée, il le cède à Du Villard (Vernes à E. Du Villard fils, vers le mai 1758, n° 651).

II donne à J.F. Bastide, pour Le Monde, le manuscrit de l'Extrait de la paix perpétuelle (envoi du 5 déc. 1760, n° 1182) mais celui-ci choisit de le faire imprimer à part (O.C., t. I, p. 548).

Fréron, enfin, devra se livrer à des publications subreptices : il fait paraître dans L'Année littéraire (1768, t. VII, p. 4-27), le «Discours sur la vertu du héros». Trois ans plus tôt, il avait donné le texte intégral du « Mémoire au Père Boudet » (1765, t. II, p. 260-262) : les Lettres de la Montagne avaient paru depuis peu et R. jugea l'a propos de Fréron «très plaisant» (O.C., 1.1, p. 121).

Publications de ce genre (lettre à Voltaire du 7 sept. 1755 dans le Mercure de novembre, p. 63-68 ; lettre à CE. Pesselier du 3 mai 1759 dans le Journal des dames, 1769, p. 7-8 ; livret de Pygmalion dans le Mercure de janvier 1771, t. II, p. 200-209) et réimpressions à l'insu de l'auteur (reprise de Pygmalion dans le Nouveau Journal helvétique du même mois, p. 80­93 ; la Reine fantasque dans celui d'avril 1770, p. 488-514, d'après Dufour, t. I, p. 79 ; «L'Allée de Silvie» et l'«Epître à Bordes», dans le Choix littéraire, t. II, 1755, p. 209-215 et t. XXII, 1760, p. 222-226 ; Lettre à Voltaire sur la Providence dans les Lettres sur l'état présent des sciences et des mœurs de Formey, t. II, juil.-déc. 1759. n° 43-44, 259-271 et 273­288). Corancez publia dans Le Journal de Paris en 1778 de nombreux inédits de R. (Moureau ; D.P.2, art. «Corancez»). Ces nombreuses publications ne doivent rien à R. lui-même.

8. Bibliographie

R., Correspondance complète, éd. Leigh. – (O.C.) Id., Œuvres complètes, éd. M. Raymond et B. Gagnebin, Paris, Gallimard, 1959. – Dufour T., Recherches bibliographiques sur les œuvres imprimées de J.J. Rousseau, Paris, L. Giraud-Badin, 1925. – Courtois L.J., Chronologie critique de la vie et des œuvres de J.J. Rousseau, Annales de la Société J.J. Rousseau, t. XV, 1923. – Launay M., Jean-Jacques Rousseau écrivain politique, Cannes, Grenoble, C.E.L.-A.C.E.R., 1972 (biobibliographie, p. 459-467). – Le Bouler J.P., «J.J. Rousseau journaliste : Le Persifleur», Revue des sciences humaines, janv.-mars 1974. – Moureau F., «Les inédits de Rousseau et la campagne de presse de 1778», D.H.S., n° 12, 1980.

DUPIN

Numéro

276

Prénom

Claude

Naissance

1686

Décès

1769

Claude Dupin (parfois orthographié Du Pin) est né à Châteauroux, le 8 mai 1686, de Philippe Dupin, écuyer, et de Jeanne Denis (Du Pin de Beyssat, p. 18-19 ; C, 1.1, p. 552). Il est baptisé ce jour en l'église de la paroisse Saint-André (C, t. I, p. 552, qui renvoie à A.N., V2 40). Son père, décédé le 16 novembre 1720, avait été receveur des tailles en l'élection de Châteauroux. Le 7 janvier 1714, il épouse Marie Jeanne Bouilhat de Laleuf, fille d'un élu de la ville (M.C., LXXXVIII, 719).

2. Formation

On ne sait rien de ses études, sinon qu'en mars 1703 il entre au collège bénédictin de Pontlevoy, près de Blois (B.M. Blois, ms. 45, f° 101 v°, d'après Durand, p. 555), et qu'il fut avocat au Parlement de Paris (C, t. I, p. 552).

3. Carrière

Nommé, le 2 février 1706, capitaine d'infanterie au Régiment de Noailles (C. d'Hozier, 496, f° 62), il est bientôt «cassé pour avoir fait tapage à Issoudun» (C, t. I, p. 552). Lors de son premier mariage, il n'est encore que receveur des tailles de l'élection de Châteauroux (Durand, p. 341, 355). En 1722, on le retrouve receveur général des Trois-Evêchés à Metz (C, t. I, p. 552). Grâce à la protection de Samuel Bernard, il obtient, le 1er octobre 1726, une place de fermier général pour le bail Carlier. Il «demeura en ex. jusqu'au bail Prévost en 1762, qu'il se retira ayant pour lors atteint l'âge de 76 ans» (ibid.). Le 24 déc. 1728 (et non pas en 1723, comme l'affirme Beyssat, p. 19), il se voit attribuer «l'office de conseiller secrétaire du Roy, Maison, Couronne de France et des finances» (C. d'Hozier, 496, f° 66).

4. Situation de fortune

Le 9 juin 1733, il achète au prince de Condé, pour 130 000 £, la châtellenie de Chenonceaux. Ce domaine, grossi des acquisitions ultérieures de D., est estimé 340 000 £ en 1772. Le 24 avril 1738, il acquiert de la comtesse de Parabère, moyennant 555 000 £, le marquisat du Blanc et la baronnie de Cors ; le tout évalué 700 000 £ en 1772 (M.C., LXXXVIII, 734). A Paris, D. possédait une maison rue Plâtrière (actuelle rue J.J. Rousseau). Il avait également une demeure à Clichy. Quant à l'Hôtel Lambert, il dut le revendre en 1750 pour honorer une forte dette de son fils puîné : Chenonceaux avait perdu, en une seule nuit, la bagatelle de 700 000 £ au jeu (Sénéchal, p. 269-270). Lorsque, en 1749, Mme Dupin dénonce l'esclavage comme « abominable» (Launay, p. 97), elle a tôt fait d'oublier que depuis l'année précédente son mari est partie prenante dans la Société de Guinée et que c'est un «financier négrier» (Durand, p. 139 ; pour plus de détails sur la fortune des Dupin et leur train de vie, voir Durand, passim).

5. Opinions

D. est un « traittant », fier de l'être et de servir en sa charge les intérêts royaux (cf. (Economiques, éd. Aucuy). En butte à l'hostilité des «auteurs ennemis des gens de finance» : Francheville d'abord (voir LL1), Montesquieu ensuite, il trouve en Louise-Marie-Madeleine une alliée (LL2, Add. 12). Ses idées n'ont guère été étudiées, sinon par Aucuy et par Doerner ; celles de Mme Dupin commencent à être mieux connues (cf. LL3 ; sur le « salon » de Mme Dupin, ses « visités » et ses correspondants, bonne analyse et recension des sources par Durand, p. 540-541).

6. Activités journalistiques

«A Paris, le 24 octobre 1759», D. adresse une Lettre à l'Editeur du Journal œconomique : cette lettre signée «Anony-mus» (Aucuy, p. LXIII), est publiée dans le numéro de février 1760 (p. 59-61). Elle est suivie (p. 61-73) du Mémoire sur les Bleds. Dans le numéro de mars paraît (p. 103-108) le Projet d'Edit (intitulé par 1'«Editeur» : «Suite du Mémoire sur les Bleds», à l'exception de deux paragraphes relatifs à Colbert (insérés p. 62, col. de droite), le texte du Journal œconomique n'est qu'une reprise du Chapitre sur les Bleds, des (Economiques de 1745 (t. I, p. 203-245 ; éd. Aucuy, t. I, p. 145-176). La Lettre à l'Editeur précise que ce travail «a été donné au Ministre en 1742» et son auteur se flatte d'avoir inspiré l'arrêt du Conseil du 17 septembre 1745. Selon Aucuy, cette Lettre traduirait une « évolution manifeste » de D., entre 1745 et 1759, vers des «tendances physiocratiques» (Œcon., Introd., p. LXIII-LXVI).

7. Publications diverses

L'article «Salines» de l'Encyclopédie n'est pas de lui, mais il a fourni à son rédacteur «tous les éclaircissements nécessaires» (Enc, t. I, «Discours préliminaire», p. XLIV). «M. Dupin» est d'ailleurs nommé dans cet article (Enc, t. XIV, P- 555' 560, n. p). – Ses œuvres, toujours tirées à un nombre très limité d'exemplaires et publiées anonymement sont : (Economiques, Carlsruhe (le titre gravé porte : « Carolsrvhe»), s.n., 1745, 3 vol. in-40. Rééd., toujours sans nom d'auteur, en 1747, 3 vol. in-40 (cf. B.N., 40 Lf*2 3). L'indication de lieu a disparu, ainsi que le titre (Economiques. Chaque tome a un titre distinct (t. I : Mémoires sur les domaines ; t. II : Définition et idée générale de l'office ; t. III : Mémoire général sur la levée des impositions). Dans l'exemp. B.N., le t. I a été paginé à la main. Enfin : (Economiques (174s), éd. M. Aucuy, M. Rivière, 1913, 2 vol. in-8°. – Mémoire sur les bleds, avec un projet d'édit pour maintenir en tout tems la valeur des grains à un prix convenable, s.l. (Villeneuve-Guibert, p. 29, avance : Paris), s.n., 1748, in-40 (reprend un chapitre des (Economiques). – Réflexions sur quelques parties d'un livre intitulé de l'Esprit des Loix, Paris, Benjamin Serpentin (pseud. de Guérin, d'après Du Plessis), 1749, 2 vol. in-8°. – Observations sur un livre intitulé de l'Esprit des Lois, divisées en trois parties, s.n. et s.l.n.d. (dans Cat.B.N., on a restitué, d'après une note ms. : Paris, 1757-1758 ; Le Bouler et Lafarge maintiennent fin 1751 - contre Sénéchal, p. 272-273 : début 1752), 3 vol. in-8° (seconde réfutation de Montesquieu).

Villeneuve-Guibert se demande (p. 29-30) s'il ne faut pas lui attribuer aussi un opuscule de 23 p., Manière de perfectionner les voitures.

8. Bibliographie

Du Pin de Beyssat L., Généalogie de la Maison Du Pin, Châteauroux, Badel, 1908. – (C) Caraman V.C., «Notes généalogiques pour servir à l'histoire des fermiers généraux », t. I (B.N., n.a.fr. 20533). – Bonhomme H., «Mme Dupin de Chenonceaux [sic] : sa vie, sa famille, son salon, ses amis (1706-1799)», Revue britannique, t. III, 1872. – Durand Y., Les Fermiers généraux au XVIIIe siècle, Paris, P.U.F., 1971. – Sénéchal A., «Jean-Jacques Rousseau, secrétaire de Madame Dupin», Annales J.J. Rousseau, t. XXXVI. – Launay M., « Le Discours sur les Sciences et les Arts : Jean-Jacques entre Mme Dupin et Montesquieu», dans Jean Jacques Rousseau et son temps, Nizet, 1969. – Aucuy M., Introduction aux Œconomiques (1745), Paris, M. Rivière, 1913. – (LL1) Le Bouler J.P. et Lafarge C, «Un emprunt de Claude Dupin», en annexe à : « Les emprunts de Mme Dupin à la Bibliothèque du Roi dans les années 1748-1750», S.V.E.C. 182, 1979. – (LL2) Id., «Catalogue topographique partiel des papiers Dupin-Rousseau, dispersés de 1951 à 1958», Annales J.J. Rousseau, t. XXXIX. – Doerner E., Die Politischen und volkswirtschaftlichen Anschauungen Claude Dupins, Halle, A.H. Müller, 1915. – (LL3) Le Bouler et Lafarge, «L'infortune littéraire des Dupin : essai de bibliographie critique», S.V.E.C. 182, 1979. – Villeneuve-Guibert G. de, Le Portefeuille de Madame Dupin, dame de Chenonceaux, Paris, Calmann-Lévy, 1884. – Du Plessis A.G., «Notice biographique, historique et littéraire sur Claude Dupin, fermier général», Bulletin du bibliophile et du bibliothécaire, 14e série, mai 1859.