MEZIERE

Numéro

575

Prénom

Henri

Naissance

1772

Décès

?

Henri Mézière est né à Montréal le 6 décembre 1772. Il est le fils du notaire Pierre Mézière et de Michelle Archange Campeau. Il épouse à Paris Louise de Lalande, puis en secondes noces, à Bordeaux, Marie Eugénie de Passy, qui lui donne quatre enfants : Pierre Henri, Jeanne, Louis Napoléon et Emélie.

2. Formation

Il étudie au collège des Sulpiciens de Montréal jusqu'en 1788. Il reçoit sa formation littéraire de Valentin Jautard, l'ancien rédacteur de la Gazette littéraire. Sous la direction de Fleury Mesplet, il apprend l'art de l'imprimerie.

3. Carrière

Entre 1788 et 1791, il collabore à la Gazette de Montréal. Il participe à la fondation de deux sociétés de pensée, la Société des débats libres et la Société des patriotes. En mai 1793, il devient conseiller pour les affaires canadiennes auprès d'Edmond Charles Genêt, premier ambassadeur de la France républicaine aux Etats-Unis. La flotte française devant envahir le Canada ayant été détournée vers la France par des mutins, M., qui était à bord du vaisseau amiral à titre d'agent politique, se retrouve à Brest, puis à Paris où, en janvier 1794 il présente un mémoire sur le Canada à la Convention. Sous le Consulat, il est envoyé en mission à Lyon et à Bordeaux en vue d'accélérer la confection des rôles. Nommé par l'empereur préfet de police à Bordeaux, il est fait chevalier de la Légion d'honneur, il conserve son poste jusqu'à la seconde restauration de Louis XVIII. Il doit alors démissionner. Il part pour l'Amérique avec sa famille. Après avoir enseigné à New York, il signe une déclaration de loyauté et s'installe à Montréal en 1816. Il devient en 1817 l'associé de Charles Bernard Pasteur, imprimeur de l'hebdomadaire Le Spectateur canadien. L'année suivante, il lance une revue littéraire et scientifique, L'Abeille canadienne, qui ne dure que cinq mois, faute de souscripteurs. M. et sa famille repartent pour Bordeaux où ils venaient d'hériter d'une fortune considérable.

5. Opinions

M. s'inspire des principes «philosophiques» des grands penseurs du XVIIIe siècle, en particulier de Voltaire, il considère que le Canada vit dans «l'esclavage» en raison de son régime « féodal » et souhaite que le système soit démocratisé, ce qui ne peut se faire, selon lui, que par l'intervention de la France révolutionnaire.

6. La Gazette de Montréal - The Montréal Gazette (10 janv. 1788 - 26 mai 1791). – Le Spectateur canadien (24 févr. -21 juin 1817). – L'Abeille canadienne (1er août 1818 - 15 janv. 1819).

7. Publications diverses

7. La Bastille septentrionale ou les Trois sujets britanniques opprimés, Montréal, Fleury Mesplet, 1792,32 p. – « Observa­tions sur l'état actuel du Canada et sur les dispositions politiques de ses habitants» (12 juin 1793), dans «Québec and the French Révolution of 1789 : The Missions of Henri Mézière», Canadian historical review, t. XXXI, n° 4, 1931, p. 349-352. – «Mémoire sur la situation du Canada et des Etats-Unis» (janvier 1794), Bulletin des recherches historiques, t. XXXVII, n° 4, 1931- P- 345-368.

8. Bibliographie

8. D.P.2, art. «Fleury Mesplet», «Valentin Jautard». – Didier L., «Le citoyen Genêt», Revue des questions historiques, Paris, 1912, t. XLVIII, p. 67-83. – Minnigerode M., Jefferson friend of France, 1793 : the career of Edmond Charles Genêt [...] 1763-1834, New York, Londres, Putnam's, 1928. Audet F.J., Henry Mézière, ras., fonds Audet, Archives publiques du Canada, vol. 21, p. 534-546. – Brunet M., «La Révolution française sur les rives du Saint-Laurent», Revue d'histoire de l'Amérique française, t. XI, 1958, p. 156-162. – Galarneau C, La France devant l'opinion canadienne, Paris, Colin, 1970. – Kennedy M., «La Société française des Amis de la Liberté et de l'Egalité de Philadelphie», Annales historiques de la Révolution française, n° 326, oct.-déc. 1976, p. 616-629.

MESPLET

Numéro

571

Prénom

Fleury

Naissance

1734

Décès

1794

Fleury Mesplet est né à Marseille le 10 janvier 1734, d'Antoinette Capeau et de Jean Baptiste Mesplet, imprimeur originaire d'Agen. Il est mort à Montréal le 24 janvier 1794. Il avait épousé Marie Marguerite Piérard à Avignon le 17 août 1756 ; Marie Mirabeau à Lyon vers 1765 ; et Marie Anne Tison à Montréal le 13 avril 1790. Aucune descendance.

2. Formation

Fils et petit-fils de maîtres imprimeurs, M. prit sa formation dans l'atelier de son père, à Lyon, puis il devint «gérant» de l'imprimerie-Librairie de sa tante, Marguerite Capeau-Girard, à Avignon, de 1755 à 1760. Il travaille ensuite comme imprimeur à Lyon jusqu'à son départ pour Londres en 1773. Les Mesplet étaient alliés aux libraires-imprimeurs lyonnais Aimé de La Roche et Jean Deville. Le beau-frère de M., le libraire François de Los Rios, était l'ami de Joseph Vasselier, le principal correspondant de Voltaire à Lyon.

3. Carrière

Le premier livre connu imprimé par M. le fut à Londres en 1773. C'est un ouvrage d'histoire, La Louisiane ensanglantée, dans lequel le chevalier Jean de Champigny appelait l'Angleterre au secours des Louisianais abandonnés aux Espagnols par le gouvernement de Louis XV. Après une année en Grande-Bretagne, M. décidait de gagner Philadelphie où il devint, en 1774, l'imprimeur de langue française du Congrès américain. A ce titre, il imprima trois Lettres des représentants des colonies unies, destinées aux habitants du Québec pour les inciter à se joindre au mouvement de libération du joug de l'Angleterre. A la recommandation de Benjamin Franklin, M. fit partie de la délégation des commissaires envoyés à Montréal pour mettre en branle le processus démocratique dans la province de Québec, alors la seule colonie britannique ayant un régime «féodal». Mais la reconquête du territoire par les troupes britanniques refoula les miliciens américains hors des frontières canadiennes. Restés sur place, l'imprimeur et ses gens furent emprisonnés durant vingt-six jours. Après sa libération, M. commença à imprimer des ouvrages commandés par des seigneurs ecclésiastiques. Le 3 juin 1778, il lançait la Gazette littéraire, le premier journal uniquement en français au Canada, animé par l'avocat Valentin Jautard. L'imprimeur et le journaliste fondèrent aussi en 1778 l'Académie de Montréal, la première société de pensée voltairienne en Amérique. A la requête du seigneur sulpicien de Montréal, Etienne Montgolfier, et du juge René Ovide Hertel de Rouville, le gouverneur général Frédéric Haldimand supprima le journal en 1779 et emprisonna imprimeur et journaliste durant plus de trois ans, sans permettre de procès. Après sa sortie de prison, M. publiait le 25 août 1785 la Gazette de Montréal - The Montréal Gazette, périodique franco-anglais qu'il dirigea jusqu'à son décès en 1794. Premier imprimeur de langue française au Canada, sa production se monta à 96 titres de livres et de brochures entre 1776 et 1794. Il imprima le premier livre illustré au Canada et le premier almanach en français en Amérique.

4. Situation de fortune

A son décès, le relevé de ses biens montre que M. jouissait de l'aisance d'un bourgeois de cette ville. Dans sa carrière en Amérique, il avait pu compter sur un généreux bailleur de fonds, Charles Berger, un compatriote qu'il s'était associé à Philadelphie en 1774. Endetté envers des marchands de Montréal en raison de son long emprisonnement, il tenta de se faire rembourser par le Congrès les frais de son installation comme imprimeur officiel des colonies unies dans la province. Il n'obtint qu'une compensation dérisoire et ses biens furent vendus à l'encan en 1785. Mais il ne fut jamais emprisonné pour dettes et les marchands montréalais ne lui retirèrent en aucun temps leur appui publicitaire.

5. Opinions

La Gazette littéraire de Montréal fut le premier organe des Lumières au Canada. Par le biais de la critique littéraire, ce journal diffusa les idées de Voltaire en matière de liberté d'expression et de tolérance. La Gazette de Montréal prit la relève de la Gazette littéraire, mais à titre de périodique d'information. Cette feuille entreprit des campagnes pour une nouvelle constitution, contre le régime seigneurial, pour un enseignement public, contre les formes superstitieuses de la religion, pour le théâtre, pour une réforme judiciaire et contre l'esclavage. Le contexte de la Révolution française éclairait et avivait ces combats. La Gazette de Montréal transmit une image exacte de la phase du mouvement révolutionnaire où Voltaire était exalté aux côtés de la Liberté. Avec la Révolution française, la diffusion des idées philosophiques s'était accélérée dans la province de Québec. L'ensemble de l'imprimerie de la colonie y contribuait par des prises de position convergentes des éditeurs de journaux. L'atelier de M. resta toutefois le centre de rayonnement des idéaux de la France de la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen.

6. Activités journalistiques

6. Gazette du commerce et littéraire, puis Gazette littéraire de Montréal, hebd., 3 juin 1778 - 2 juin 1779 (D.P.1 556).

Gazette de Montréal - The Montreal Gazette, hebd., 25 août 1785 - 16 janv. 1794 (D.P.1 519). Après le décès de M., Marie-Anne Tison-Mesplet publia six numéros. Le maître de poste E. Edwards reprit le titre l'année suivante, et fut l'éditeur du journal jusqu'en 1816. Ce fut le banquier Thomas-Andrew Turner qui en fit un périodique uniquement de langue anglaise en 1822.

8. Bibliographie

8. Dictionnaire biographique du Canada, Québec, Presses de l'U. Laval, art. «Fleury Mesplet». – Fauteux A., «Fleury Mesplet : une étude sur les commencements de l'imprimerie dans la ville de Montréal », Papers of the Bibliographical Society of America, t. XXVIII, n° 2, 1934, p. 164-193. – Morin V., Fleury Mesplet, pionnier de l'imprimerie à Montréal, Montréal, Papier Rolland, 1939. – Trudel M.. L'Influence de Voltaire au Canada, Montréal, Fides, 1945,1.1. – Brunet M., «Les idées politiques de la Gazette littéraire de Montréal, 1778-1779», Canadian Historical Association Report, 1951, p. 43-50. – Tremarne M., A bibliography of Canadian imprints 1751-1800, U. of Toronto Press, 1952. – Fauteux A., L'Introduction de l'imprimerie au Canada : les premiers imprimeurs dans le district de Montréal, Montréal, Papier Rolland, 1957. – Vachon G.A., «Une littérature de combat, 1778-1810 : les débuts du journalisme canadien français», Etudes françaises, Montréal, t. V, n° 3, 1969, p. 249-475. – Lagrave J.P. de, L'Exercice du droit de l'information au Québec, des origines à 1840, thèse, U. de Paris, 1972. – Beaulieu A. et Hamelin J., La Presse québécoise des origines à nos jours, t. I, 1764-1859, Québec, Presses de l'U. Laval, 1973. – Wallot J.P., «Révolution et réformisme dans le Bas-Canada (1773-1815)», Annales historiques de la Révolution française, n° 213, juil.-sept. 1973, p. 344-406. – Greig P.E., Fleury Mesplet (1734-1794), the first French printer in the Dominion of Canada, mémoire de maîtrise, U. de Leeds, 1974. – Lagrave J.P. de, Les Origines de la presse au Québec, Montréal, LG, 1975. – Id., Histoire de l'information au Québec, Montréal, Ed. La Presse, 1980. – Hare J., La Pensée socio-politique au Québec (1784-1812) : analyse sémantique, Ottawa, Ed. de l'U. d'Ottawa, 1977. – Buono Y., Imprimerie et diffusion de l'imprimé à Montréal (1776-1820), mémoire de maîtrise, U. de Montréal, 1980. – Collard A., «Naissance d'un journal dans une ville aux abords du Nouveau Monde», Montréal, The Gazette, 1983, 9. – Id., «Lyon-Montréal : Fleury Mesplet (1734-1794), imprimeur franco-canadien», Centre Presqu'île (Lyon), n° 11, 1985, p. 23-25. – Lagrave J.P. de, Fleury Mesplet, diffuseur des Lumières au Québec, thèse, U. de Montréal, 1985. – Id., Fleury Mesplet ( 1734-1794), imprimeur, éditeur, libraire, journaliste, Montréal, Patenaude Editeur, 1985.

9. Additif

Bibliographie : Lagrave, Jean-Paul de, et Ruelland, Jacques, L’Imprimeur des libertés : Fleury Mesplet (1734-1794). Roman historique, Québec, Éditions Point de fuite, 2001 (J.S.).

JAUTARD

Numéro

413

Prénom

Valentin

Naissance

1736

Décès

1787

Valentin Jautard est né à Bordeaux le 16 août 1736 et mort le 9 juin 1787 à Montréal. Il a épousé Marie-Thérèse Bouat le 23 août 1783.

2. Formation

Formation en droit et en littératrue.

3. Carrière

Après un séjour en Louisiane (1765-1768), J. s'établit à Montréal, où il obtient le droit d'exercer sa profession d'avocat le 30 décembre 1768. A l'arrivée des milices américaines, il rédige, le 14 novembre 1775, la lettre d'accueil des habitants de Montréal ; le 31 janvier 1776, il reçoit du brigadier David Wooster une commission de notaire public. Il traduit alors entre autres la Lettre de George Washington aux Canadiens. Sous le pseudonyme de «Spectateur tranquille», il devient le principal rédacteur de la Gazette littéraire de Fleury Mesplet en 1778-1779. En raison de ses écrits «philosophiques», à la requête du clergé et de la magistrature, il est arrêté le 4 juin 1779 et emprisonné sans procès par le gouverneur Frédéric Haldimand. Il est libéré le 8 février 1783. Il refuse de reprendre la plume dans la Gazette de Montréal, déclarant dans un article publié le 1er septembre 1785 que son incarcération l'avait épuisé physiquement et moralement. Il termine sa carrière comme écrivain public.

5. Opinions

J. fut le premier critique littéraire canadien, rôle qu'il exerça exclusivement dans la Gazette du commerce et littéraire, puis dans la Gazette littéraire. Il créa une tribune libre où les diverses opinions purent s'exprimer en toute liberté. Son action s'inspirait de l'esprit de Voltaire, en l'honneur de qui, de concert avec Mesplet, il fonda en 1778 à Montréal la première académie voltairienne en Amérique.

6. Activités journalistiques

La plupart des écrits de J. sont concentrés dans la Gazette de commerce et littéraire, puis Gazette littéraire, du 3 juin 1778 au 2 juin 1779. Signant le plus souvent «le Spectateur tranquille», il lui arrive d'utiliser d'autres pseudonymes. Mais tous les textes publiés dans le journal de Mesplet ne sont pas dûs à la plume de Jautard, comme en font foi les divers styles des correspondants et les dénonciations des dignitaires religieux.

8. Bibliographie

Voir art. Mesplet. – Dictionnaire biographique du Canada, 1980, art. Jautard – Lagrave J.P. de, et Ruelland J.G., Valentin Jautard (1736-1787), premier journaliste de langue française au Canada, Québec, Le Griffon, 1989.