PAULMY D’ARGENSON

Numéro

626

Prénom

Antoine

Naissance

1722

Décès

1787

1. État-civil

Antoine René de Voyer d'Argenson, marquis de Paulmy, né le 22 octobre 1722, appartient à la puissante famille des Voyer d'Argenson qui compte deux ambassadeurs à Venise (son trisaïeul et bisaïeul), un lieutenant-général de police (son grand-père), un ministre des Affaires étrangères (son père), et un ministre de la Guerre (son oncle). Mort le 13 août 1787 dans sa résidence de l'Arsenal à Paris.

2. Formation

Etudes au collège Louis-le-Grand. Son père et sa mère vivaient séparés depuis 1733. Son père, surnommé «d'Argenson la bête » à Versailles, semble avoir préféré la compagnie de ses amis du club de l'Entresol à celle des courtisans et avoir eu peu d'affection pour son fils qu'il juge assez froidement dans ses Mémoires («il a une mémoire prodigieuse, il pense, il démêle, il juge, il conçoit [...]. Avec cela, je lui vois une médiocre imagination quoiqu'il n'en manque pas absolument. II n'est point stérile, mais peu fécond»). P. reporte donc son affection sur son oncle, Marc René, comte d'Argenson, ministre de la Guerre de janvier 1743 jusqu'à sa disgrâce (due à ses démêlés avec Mme de Pompadour) en février 1757, et qui l'aide dans sa carrière.

3. Carrière

Conseiller au Parlement le 4 décembre 1744, ambassadeur en Suisse en 1748, chevalier de l'ordre de Saint-Louis en 1749, secrétaire d'Etat au ministère de la Guerre en 1751. En 17 5 7 il prend la direction du ministère de la Guerre après la disgrâce de son oncle, charge qu'il semble avoir acceptée à contrecœur et qu'il ne conservera qu'un an, donnant sa démission le 2 mars 1758 avec le titre de ministre d'Etat et une pension annuelle de 20 000 £. De 1759 à 1764, ambassadeur en Pologne, il se retire ensuite de la vie publique pour se consacrer à sa bibliothèque dans sa résidence de l'Arsenal.

4. Situation de fortune

Quand P. prend la direction de la Bibliothèque universelle des romans (B.U.R.) en juillet 1775, son revenu annuel s'élève à environ 85 000 £ (Ars., ms. 6324), chiffre qui comprend ses pensions et les revenus qu'il tire des «fourrages» de ses terres d'Alsace et de Bourgogne. Situation financière relativement modeste si l'on tient compte du train de vie que son rang l'obligeait à maintenir. D'autre part sa passion des livres qu'il achetait pour sa célèbre bibliothèque de l'Arsenal était fort coûteuse, car il entretenait à grands frais tout un réseau de libraires, commissaires priseurs et secrétaires qui le conseillaient dans l'achat des livres et des estampes (Ars., ms. 6404). En 1779, il écrit deux mémoires au roi pour déplorer la suppression de la charge de l'ordre de Saint-Louis et la perte d'un revenu de 6000 £ (Ars., ms. 6117). Il ne serait donc pas impossible que, outre sa passion des romans, des considérations financières aient poussé P. à se lancer dans une entreprise commerciale de librairie telle que la publication de la B.U.R.

5. Opinions

Il semble que P. ait été plus à son aise avec les savants qu'avec les courtisans et qu'il ait fait plus de cas de son titre d'académicien que de celui de ministre de la Guerre. En 1748 il est élu membre de l'Académie française et en 1756 membre honoraire de l'Académie des Inscriptions et Belles-lettres où il se lie avec Camille Falconet et Lacurne de Sainte-Palaye, ce qui explique son intérêt pour les romans du moyen-âge. Familier de Mme Du Deffand et ami du président Hénault avec lequel il entretient une chaleureuse correspondance (B.N., n.a.fr. 10235). Très conservateur dans ses idées sociales et politiques. Grand admirateur de Louis XIV, il juge assez sévèrement le siècle des Lumières. En effet, dans sa version de Y Histoire admirable du Juif errant, parue dans le volume de juillet 1777 de la B.U.R., il fait dire à Abbasuérus : «Votre siècle effectivement a acquis de nouvelles lumières sur presque tous les articles, mais prenez garde qu'à force d'être éclairés vous ne soyez éblouis. En détruisant tous les préjugés, craignez d'attaquer les principes essentiels à conserver pour le maintien de la société».

6. Activités journalistiques

Directeur, éditeur et rédacteur de la B. U.R. de juillet 1775 à décembre 1778. La position sociale de P. lui interdisant de paraître officiellement comme éditeur de la collection, il utilise comme prête-nom Jean François de Bastide, journaliste au Mercure de France et écrivain professionnel (voir le Registre des privilèges et permissions simples, B.N., f.fr. 22002). Dans cette collection d'extraits de romans qui paraît au rythme annuel de 16 volumes, P., dans son prospectus publicitaire, se propose de «donner l'âme et l'esprit» des romans en en faisant la «miniature». Lui-même se réservait certains textes du moyen-âge (Perceval le Gallois, Lancelot du Lac, Le Roman de Merlin). Il a comme collaborateurs Bastide, le comte de Tressan, Cardonne, Contant d'Orville, Couchu, l'abbé Coupé, Imbert, Legrand d'Aussy, Mayer et Poinsinet de Sivry, le libraire étant Lacombe, ami personnel de P. La B.U.R. représente donc, en 220 volumes, un corpus de 926 titres allant des romans grecs et latins (en traduction) aux romans contemporains. P. quitte la B.U.R. en décembre 1778 à la suite, semble-t-il, d'un différend qui l'opposa à la fois à Tressan à qui il avait reproché certaines «gaités» (Ars., ms. 6408), et à Bastide qui n'avait pas beaucoup de scrupules littéraires et qui avait, concernant le public que la collection devait toucher, une conception différente de celle de P. A la suite de ce départ, la B.U.R. continuera de paraître sans interruption jusqu'en juin 1789, le privilège appartenant à Bastide qui devint le directeur de la publication, mais on constate à partir de ce moment une baisse très sensible dans la qualité des « miniatures » qui iront même jusqu'à la caricature.

7. Publications diverses

Outre sa participation à la B.U.R., P. fait paraître en 1780 les Mélanges tirés d'une grande bibliothèque (24 vol.) en collaboration avec Contant d'Orville. En 1786, Choix de petits romans de différents genres par M.L.M.D.P.

8. Bibliographie

8. B.Un. – Martin H., Préface au Catalogue des manuscrits de la bibliothèque de l'Arsenal, Paris, 1899. – Mémoires du marquis d'Argenson, Paris, 1867. – Poirier R., La Bibliothèque des romans, Genève, 1977. – Martin A., La Bibliothèque universelle des romans 1775-1789 : présentation, table analytique, et index, S.V.E.C. 231, 1985.

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