THIEBAULT

Auteurs

Numéro

768

Prénom

Dieudonné

Naissance

1733

Décès

1807

Dieudonné Thiébaut, ou, suivant l'orthographe traditionnelle, Thiébault, naquit au hameau de Rue, « près La Roche » (acte de décès), dans le bailliage de Remiremont, le 26 décembre 1733, et il fut baptisé le même jour dans l'église de sa paroisse, Rupt-sur-Moselle (A.D. Vosges, reg. par., GG, année 1733). Il était le «fils légitime d'Estienne Thiébaut et de Marie Antoine», mariés à Vagney le 31 janvier 1729.

2. Formation

« Le goût de l'étude se manifesta chez lui dès sa plus tendre enfance ; mais [...] ce ne fut qu'à la suite de longues instances qu'il obtint des leçons de latinité du curé de la paroisse [...]. Au bout de trois ans d'un travail continué avec autant de persévérance que de dispositions, il se présenta au collège des Jésuites de Colmar, et fut reçu en seconde». Les deux années suivantes, il fit sa logique et sa philosophie au collège de Dijon. Pressé par ses maîtres d'entrer dans leur ordre, il s'y décida enfin par des considérations relatives à sa famille et à sa «position» et «fit son noviciat à Nancy», mais ne put jamais «supporter l'étude de la théologie» (B.N.C.). Reçu par Frédéric II le 18 mars 1765, il fut nommé le soir même «dans la classe des belles-lettres» de l'Académie de Berlin (Souvenirs, t. I, p. 29) et reçu le mois suivant (t. II, p. 71, 255). A la fin de 1776, les Académies de Lyon et de Châlons-sur-Marne «l'admirent dans leur sein» (B.N.C.).

3. Carrière

T. enseigna le latin, de la sixième à la seconde, dans les collèges jésuites de Nancy, Chaumont, Châlons-sur-Marne et Bar-le-Duc (B.N.C. ; B.Un.). Après la mort de son père (B.Un.) «ne trouvant plus dans cet ordre», alors menacé, «les avantages sur lesquels il avait compté», il quitta la Compagnie, «fit son droit par bénéfice d'âge» (B.N.C.) pour «devenir avocat à Colmar», mais se décida bientôt à tenter à Paris la carrière des lettres et travailla au Dictionnaire de l'élocution française «imprimé sous le nom d'un M. Demandre» (B.N.C). Recommandé à Frédéric II par d'Alembert, d'Olivet et J.A. Cérutti, il fut choisi comme professeur de grammaire générale à l'école militaire de Berlin, où il arriva le 16 mars 1765 (t. I, p. 21). Mis à part un voyage de cinq mois pendant lequel, entre octobre 1776 et le milieu de mars 1777, il séjourna à Lyon, puis à Paris (t. I, p. 57, 246-247 ; t. II, p. 178, 273), il demeura en Prusse jusqu'à la fin de 1784, date à laquelle il s'installa de nouveau en France (t. II, p. 55, 115, 299). Le roi l'avait chargé d'une délicate fonction, celle de corriger et de lire à l'Académie ses communications (t. I, p. 42 et suiv., 261). Dès son retour à Paris, il rédigea différents projets, l'un sur la formation d'une compagnie d'assurance mutuelle contre les incendies, qui ne fut mis en application qu'après la Révolution, un autre sur la réorganisation de la Librairie, qui lui valut d'être aussitôt nommé chef des bureaux par le directeur, Vidaud de La Tour. En 1786, il fut aussi garde des archives et inventaires du garde-meuble de la couronne, et contrôleur de l'Hôtel, où il résidait, rue Saint-Florentin (A.R., 1786, p. 557). Vers la fin de l'année, il s'installa rue Neuve des Petits Champs, tout en demeurant, provisoirement, garde des archives et inventaires (A.R., 1787, p. 555). En 1791, succédant à Mesmy, il fut le dernier directeur de la Librairie et soutint «plus d'un an encore, avec autant de modération que de fermeté» un «édifice [qui] s'écroulait de toutes parts» (B.N.C). Lorsqu'on supprima le garde-meuble du roi, il fut chargé d'assurer sa liquidation et vers la fin de 1792 il devint inspecteur des rôles à Epinal (les archives révolutionnaires de la ville témoignent de sa présence) ; mais « cette place [ayant été] encore supprimée», il fut envoyé à Tournay, comme commissaire pour la réunion du Tournaisis à la France. Arrivé à la fin de janvier 1793, il en repartit deux mois plus tard, lorsque la Belgique dut être évacuée, et il est probable qu'il remplit l'année suivante des fonctions dans la Librairie, car il reste de lui un «Mémoire sur les bibliothèques nationales et la littérature républicaine» (B.N., n.a.fr. 2836), daté de l'an II «A la formation du Directoire [oct.-nov. 1795], il fut nommé chef de son secrétariat» (B.N.C.), puis président de l'Ecole centrale de la rue Saint-Antoine, et enfin, par décret du 25 thermidor de l'an XII - 13 août 1804 (Duhaut, Le Lycée de Versailles, 1803-1815, Versailles, Aubert, 1908), il devint proviseur du lycée de Versailles, où il mourut.

4. Situation de fortune

A Berlin, la situation de T. était solidement assurée ; à son traitement de professeur à l'école militaire s'ajoutait (t. I, p. 29) une pension d'académicien (fixée à 200 reichsthalers, c'est-à-dire un peu plus de 700 £). En France, à la veille de la Révolution, il n'avait «plus de vœux à former», car, sous-directeur de la Librairie et président du comité de censure, il venait d'obtenir pour 50 ans le privilège d'un journal qui devait être seul autorisé à « parler des travaux des assemblées provinciales et nationales» (B.N.C.). Pendant quelques années, il souffrit matériellement de l'écroulement de l'An­cien Régime, mais ne demeura jamais longtemps au chômage.

5. Opinions

En Prusse, T. fut apprécié par toute la famille royale, et notamment par le prince Henri et la princesse Ulrique, reine de Suède, à la demande de laquelle il composa les Adieux du duc de Bourgogne et de l'abbé de Fénelon qui, dit-on, eurent une grande influence sur la «révolution» de 1772-1773. Il fréquenta assidûment tous les membres les plus connus de la «colonie» française (t. II, p. 22), ainsi que les ministres plénipotentiaires, particulièrement le duc de Guiñes qui «donna son nom» à son fils (t. II, p. 50) et l'ambassadeur de Russie, le prince Dolgorouki. Il y connut le marquis d'Argens, à l'égard duquel il manifeste une sympathie amusée (t. II, p. 374-405), Grimm (t. I, p. 371), l'abbé Raynal (t. II, p. 12-18) et Dom Pernety (t. II, p. 298-303), pour lesquels il n'est pas tendre ; Helvétius (t. II, p. 131-133) et Algarotti (t. II, p. 419), qui le déçurent ; il vécut «plus politiquement que confidemment» avec Toussaint (t. II, p. 290), Formey et Prémontval, mais noua de solides amitiés avec le mathématicien Lagrange, «philosophe toujours égal, toujours sage et tolérant» (t. II, p. 268-269), et surtout avec Bitaubé, en faveur duquel il intervint sous la Terreur (t. II, p. 293-294, 323, 326). Au sujet de son hostilité à l'égard de Formey et de Thibault de Laveaux, voir ces noms. Admirateur de Jean Jacques Rousseau, capable de rendre justice sans flagornerie à la fois à Frédéric II et à Voltaire, «les deux plus beaux génies du siècle» (t. II, p. 333), mais vivement hostile aux «faux philosophes», qui ont tant «nui au genre humain» (t. II, p. 27) et assez prudent pour hésiter à insérer dans le Journal littéraire un «extrait» de l'Histoire philosophique des deux Indes (t. II, p. 12), il se déclare «décidément ennemi de tout esprit de parti » et semble prêt à tenir une balance égale entre les chrétiens les plus sourcilleux d'orthodoxie et «les anti-chrétiens » (t. II, p. 293). Au lendemain de la Déclaration des droits de l'homme, la France lui parut «la proie de tigres altérés de sang » : « la démence, substituée à la philosophie » (t. II, p. 294). En 1793, à Tournay, d'après Mme de Genlis qui l'y a connu et reçu, «il déplorait et détestait tout ce qui se passait en France de contraire à la raison et à l'humanité » (Mémoires, éd. F. Barrière, Paris, F. Didot, 1857, p. 281).

6. Activités journalistiques

Journal littéraire dédié au Roi par une Société d'académiciens, 1772-1776, Berlin, G.J. Decker, 24 t. en 21 vol. in-12 (D.P.1 761). «Ceux qui y travaillaient régulièrement étaient De Castillon père et fils [Jean et Frédéric de Castillon], Toussaint et moi, qui en avais eu la première idée et fait le prospectus ; Sulzer, Mérian, Beaussobre [Louis de Beausobre] et quelques autres avaient aussi promis de s'en occuper, mais ils tinrent assez mal leur parole ; aussi abandonnâmes-nous cette entreprise après le vingt-quatrième volume [un volume par trimestre]» (Souvenirs, t. II, p. 11-12). D'après la B.N.C., outre la préface, « le journal contient trente morceaux de D.T. ; les plus saillants sont les analyses de la théorie des beaux-arts, par M. Sécher ; du système social, Londres, 1773 ; de l'essai sur l'art dramatique, Amsterdam, 1773 ; de la vie d'Apollonios, par Ch. Blount, et de l'histoire des troubadours». Voir aussi Cior 18.

Journal de l'instruction publique (en collaboration avec Jean-Alexis Borrelly), Paris, 1793, 18 feuilles, 3 vol. in-8°. Suivant la B.N.C., T. aurait aussi collaboré au Vengeur.

7. Publications diverses

Avant de partir pour la Prusse, T. publia à Paris l'Apologie des jeunes ex-jésuites qui ont signé le serment, prescrit par arrêt du 6 février 1764, 1764, in-12, 75 p., puis, d'après la B.Un. et la B.N.C., trois Lettres critiques sur Paris (janv. 1765). – Pendant son séjour à Berlin, il fit imprimer un Nouveau Plan d'éducation publique (B.N.C.). – Les Adieux du duc de Bourgogne et de l'abbé de Fénelon [son précepteur] ou Dialogue sur les différentes sortes de gouvernements (l'éd. in-8° de 332 p., Stockholm et Paris, impr. de Prault, 1788, serait une réimpression). – Essai sur le style, à l'usage de l'Ecole royale des jeunes gentilshommes, Berlin, impr. de G.J. Decker, 1774, in-12, XXX-359 p. (2e éd. en 2 vol. in-8°, Paris, Lavilette, 1801, sous le titre de Traité du style). – D'autre part, 13 morceaux de lui figureraient dans les Mémoires de l'Académie de Berlin : «son discours de réception ; un discours sur les avantages des académies ; deux mémoires sur la question de savoir si les poètes ont précédé les prosateurs ; cinq mémoires complétant l'analyse critique de la grammaire de Beauzée ; un mémoire sur la prononciation ; un sur la science des mots et des choses ; des observations sur la grammaire et les langues ; et son discours De l'usage considéré comme maître absolu des langues», qui précéda de trois ans celui que sur le même sujet Marmontel lut, en 178 7, à l'Académie française » (B.N.C.). – Après son retour en France il publia successivement : un Mémoire sur la liberté de la presse suivi de quelques autres mémoires concernant la librairie, s.l., 1789, in-8°, 124 p. – De l'enseignement dans les écoles centrales, Strasbourg, F.G. Levrault, an V, in-8°, 53 p. – Traité sur l'esprit public, ibid., an VI, in-8°, 403 p. – Lettre circulaire adressée aux membres de l'Institut national [...] pour présenter sa candidature à un siège vacant (s.l.n.d. ; signée : Paris, le 1er messidor, an IX). – Principes de lecture et de prononciation à l'usage des écoles primaires, Paris, Genêts, 1802, in-8°, XVI-220 p. Grammaire philosophique, ou la Métaphysique, la logique et la grammaire réunies en un seul corps de doctrine, Paris, an XI (1802), 2 vol. in-12. – Enfin son œuvre maîtresse, Mes souvenirs de vingt ans de séjour à Berlin, ou Frédéric le Grand, sa famille, sa cour, son gouvernement, son académie, ses écoles et ses amis littérateurs et philosophes, Paris, F. Buisson, an XII (1804), 5 vol. in-8° ; 2e éd., an XIII (1805) ; 3e éd., «revue par A.H. Dampmartin» et désavouée par son fils, 1813 ; 4e éd., «publiée par son fils, le baron Thiébault», 1827 ; 5e éd., par F. Barrière, 1860.

8. Bibliographie

8. B.Un. ; Cior 18 ; B.N.C., t. XIX, p. 443-447. – T., Souvenirs de vingt ans de séjour à Berlin, Paris, F. Didot, 1860. – Louis L., Le Département des Vosges, Epinal, 1889, t. IV.

RICHER

Auteurs

Numéro

689

Prénom

Jean

Naissance

?

Décès

vers 1612

6. Activités journalistiques

En janvier 1717, François Buchet écrivait dans la Préface du Nouveau Mercure : «On cite encore aujourd'hui avec éloge l'ancien Mercure françois composé par Jean Cayer», où l'on trouvait, relatés exactement, «tous les événements les plus considérables». Remarque précieuse, malgré une erreur sur le nom de l'auteur, car c'est au libraire et imprimeur Jean Richer que doit être attribué le premier tome du Mercure : Le Mercure françois ou la Suitte de l'histoire de la paix commençant l'an 1605 pour suite du Septénaire du D. Cayer, et finissant au sacre du très grand Roy de France et de Navarre Louis XIII, à Paris, par R., 1613. Il est vrai, que d'après une tradition ancienne, « Cayet » aurait « formé l'idée du plan » du Mercure français (d'Artigny, Nouveaux mémoires d'histoire, de critique, et de littérature, Paris, 1749-1756, t. V, p. 158) et selon la B.Un., on «réunit au Mercure françois dont ils forment l'introduction » deux ouvrages de Pierre Victor Palma Cayet (ou Cayer) : Chronologie septénaire de l'histoire de la paix entre les rois de France et d'Espagne, Paris, J. Richer, 1605 (six éd., jusqu'à 1612), et Chronologie novenaire, contenant l'histoire de la guerre, sous le règne du très chrestien Roy de France et de Navarre, Henri III, J. Richer, 1608, 2 t. en 3 vol. On peut sans doute les classer parmi les ouvrages de l'histoire, comme le Soldat suédois (1630 et 1633) de Friedrich Spanheim, ou même son Mercure suisse (Genève, J. Albert, 1634), Que celui ci présentait comme une «relation naïve», un «équipage plein de simplicité», et qui fut suivi par le Mercure d'Estat, ou Recueil de divers discours d'Estat (s.l., 1635). Mais il est à peu près impossible d'établir une ligne de démarcation entre l'histoire et ce que nous devons déjà considérer comme relevant du journalisme, dont R. pourrait bien être considéré comme un des plus remarquables «inventeurs». D'après le texte du privilège qui lui fut concédé le 29 novembre 1610, « depuis vingt-deux ans il a été soigneux de recueillir tout ce qui s'est imprimé ou écrit des choses les plus mémorables advenues par tout le monde», et il a composé «un recueil de ce qui s'est passé [...] jusqu'à la présente année 1610» (mis en relief par nous). La «Préface au lecteur» est plus explicite : «Je te donne dans ce livre les choses les plus remarquables [...], lesquelles mon messager (que j'appelle Mercure françois) m'a apporté des quatre parties du monde, en diverses langues». D'autre part, R. a publié en 1611 un in-8° de XV-60 p. dont le titre indique parfaitement la nature : Recueil de ce qui s'est passé à Prague ez mois de février et mars avec un abrégé des choses les plus remarquables advenues depuis six mois tant en Allemagne, Bohême, Transylvanie, qu'en Flandre, Espagne et autres pays (autre éd. en 1611, à Arras, «jouxte la copie imprimée à Paris»).

RICHER

Auteurs

Numéro

688

Prénom

Estienne

Naissance

XVIe s. – XVIIe s.

6. Activités journalistiques

Imprimeur et libraire à Paris, tenant boutique « au Palais, sur le Perron Royal», et probablement fils de Jean Richer (voir la notice suivante), il poursuivit son entreprise et publia, en 1615, La Continuation du Mercure françois ou Suitte de l'histoire de l'auguste Régence de la Roy ne Marie de Médicis, sous son fils le très chrétien Roi de France et de Navarre (in-8°, 504 f° numérotés) où il s'agissait de présenter «la diversité des discours et relations des choses mémorables advenues depuis trois ans en Europe» ; en 1616, la Seconde Continuation du Mercure françois ou Suitte de l'histoire de l'auguste Régence de la Royne Marie de Médicis, 605 p. num. in-8°, avec la Troisième Continuation [...], ou l'Histoire de nostre temps, 458 p. in-8° (privilège du iojuin 1616), titre caractéristique ; en 1617, le quatrième tome du Mercure, contenant «La seconde guerre civile» (févr. 1615 - mars 1616) et «La troisième guerre civile» (sept. 1616 - juil. 1617), 447 et 424 p. num., et enfin la «Suite de la troisième guerre civile», sous le titre L'Histoire de nostre temps sous le règne de [...] Louis XIII, 240 p. num. in-8° (privilège du 1er août 1617) ; en 1619, le cinquième tome, ou Suite de l'histoire de notre temps, menée jusqu'au 20 juin 1619, 336 + 304 + 246 p. num. in-8° (privilège du 9 août 1619). La collection des Mercures françois devait se prolonger jusqu'à 1658. Elle comporte 25 vol. petit in-8°.

RÉMOND DE SAINTE-ALBINE

Numéro

674

Prénom

Pierre

Naissance

1699

Décès

1778

Pierre Rémond de Sainte-Albine (29 mai 1699 -9 oct. 1778) est né et mort à Paris.

2. Formation

Il fut élu membre de l'Académie de Berlin le 4 septembre 1755 (Journal de Verdun, nov. 1755, p. 385) et fit partie de la Société des arts (Table du Journal de Verdun).

3. Carrière

Censeur royal pour les «belles-lettres», au moins à partir de 1751 (B.N., f.fr. 22136, f° 142 ; 22139, f° 91 et suiv.). Renseignement confirmé par les A.R. qui indiquent qu'il demeurait en 1755 et en 1758 «Cloître Saint-Germain l'Auxerrois», en 1765 «rue Sainte Anne, près les Nouv. Catholiques».

4. Situation de fortune

D'après Linant, en 1733, R. avait «douze cents francs pour faire la Gazette de France» (D567). Trente ans plus tard, Lenieps écrivait à Rousseau : «Mr. de Sainte-Albine a un rhumatisme goutteux qui l'a beaucoup vieilli, il ne fait plus rien et il a acquis une bonne pension pour la Gazette, qui n'est pas merveilleuse» (18 oct. 1763 ; Correspondance, n° 2979).

5. Opinions

«Très anti-philosophe» (M.S., 18 oct. 1778).

6. Activités journalistiques

«Boindin disait de lui que c'était un homme qui avait de l'esprit quand on lui en donnait le temps » : il fut cependant «le faiseur de gazettes par excellence» (ibid.). Après avoir, semble-t-il, fait ses débuts en publiant dans le Mercure une lettre «sur un livre nouveau intitulé Le Voyage du Parnasse» (févr. 1717, p. 179-180) et avoir sans doute participé, tout jeune, à la rédaction de l'Europe savante (B.Un.), il composa la Gazette de France à partir de 1733. A ce propos, vers le 5 février, Michel Linant écrivait à Cideville : « Il m'a associé à son travail pour le faire quand il ne pourrait pas. Il n'y a que cinq heures de travail par semaine et que cinquante gazettes par année. Il ajoutera aux trois cents francs qu'il a promis deux cents autres qui ne me coûteront rien à gagner [...]. Il m'a fait envisager un avenir très heureux en me promettant que dans un an ou deux il me laisserait l'emploi et le revenu » (D567). En fait, R. ne quitta la Gazette que le 18 mai 1749. Mais d'après Raynal (CL., t. I, p. 112, 308), il fut privé de cet « avantage » parce qu'il s'était trouvé un homme qui avait «offert de l'écrire à meilleur marché». Autrement dit, R. s'est de nouveau déchargé de sa tâche sur un «nègre», en l'occurrence le chevalier de Mouhy. II la reprit le 1er juin 1751 (Journal de Verdun, ibid.). A partir du 1er janvier 1762, elle parut «sous [une] nouvelle forme, [...] dorénavant faite sous les yeux du ministre des affaires étrangères, et rédigée par M. Rémond de Sainte-Albine» (M.S.). La même année, en septembre, la direction de la Gazetterevint à l'abbé Arnaud et à Suard.

Selon sa propre expression, R. eut aussi un autre « fardeau » (Mercure, mai 1749, p. 4) : la direction du Mercure de France, de juillet 1748 à juin 1750 (le second volume de ce mois ayant été publié par Clèves-Darnicourt qui assura la transition avec l'abbé Raynal). Il y rédigeait «les extraits de pièces de théâtre séparés [...] par un réglet» de la rubrique des spectacles, tenue par Fuzelier (Mercure, janv. 1749, p. 203). Il reçut de nombreuses lettres de lecteurs (concernant la grammaire, l'arithmétique, la gravure, l'opéra, etc. et provenant parfois de correspondants illustres : Algarotti, Haller), publia des textes de Voltaire (vers sur le Louvre, mai 1749, p. 27-28 : Anecdotes sur le tzar Pierre le Grand, juin 1750, p. 12-35)e t divers essais du Genevois Tollot, mais se chargea aussi d'alimenter le journal par des contributions personnelles : deux comédies en un acte composées en 1718, l'Amour au village (janv. 1749, p. 26-56) et la Convention téméraire (juin 1749,1.1, p. 3-50) ; une lettre à Desforges-Maillard sur un ancien poète français (Nicolas Frenicle) en mars 1750 ; des Vies des Carthaginois célèbres (juil. et août 1748, mai 1749). En juin 1750, prenant congé du public, il écrivait : «Les soins que j'ai pris de rendre ce recueil de plus en plus digne de quelque attention n'ayant point paru absolument sans succès [...], le Mercure est tiré maintenant chaque mois à 300 exemp. de plus qu'il ne l'était lorsque je m'en suis chargé» (t. I, p. 214).

7. Publications diverses

Voir Cior 18. Ceux de ses ouvrages qui eurent le plus de succès furent le Mémoire sur le laminage du plomb (quatre éd., de 1731 à 1748) et surtout Le Comédien, paru d'abord dans le Mercure en octobre et novembre 1745, et édité avec diverses «augmentations» en 1747 et 1749.

8. Bibliographie

8. A.R. ; B.Un. ; M.S., 1er janv. 1762, t. I, p. 8 ; CL. – Table générale alphabétique et raisonnée du Journal historique de Verdun sur les matières du temps depuis 1697 jusques et compris 1756, Paris, Ganeau, 1769-1770. – Voltaire, Correspondence, éd. Besterman. – J.J. Rousseau, Correspondance, éd. Leigh.

9. Additif

Bibliographie : Table générale, alphabétique, Paris, Ganeau est en fait datée de 1759-1760 en 9 vol. (F. M.)

PONS

Auteurs

Numéro

651

Prénom

Jean François de

Naissance

1683

Décès

1732

D'après le baron de l'Horme auquel, moyennant quelques rectifications, nous emprunterons la plupart des renseignements recueillis dans cette rubrique, Jean François de Pons fut baptisé à Marly-le-Bourg (Marly-le-Roi) le 10 avril 1683. Les A.D. de la Haute-Marne détiennent différentes pièces (F 760 ; 2 E 223) prouvant la noblesse de sa famille, qui, remontant à Gillebin de Pons, seigneur de Rennepont à la fin du XIVe siècle, était effectivement « l'une des plus illustres de Champagne» (La Chesnaye).

2. Formation

«Après avoir fait ses humanités et son cours de philosophie » à Chaumont, « il fut envoyé à Paris en 1699, et, comme on le destinait à l'Eglise, il commença à faire un nouveau cours de philosophie dans l'Université, pour y prendre ses degrés. Il entra ensuite au séminaire de Saint-Magloire, d'où il suivit pendant deux ou trois années l'Ecole de la Sorbonne » (Avertissement, Œuvres). Selon N.B.G., «il embrassa l'état ecclésiastique, mais ne s'éleva point au-dessus du sous-diaconat».

3. Carrière

En 1706, malgré l'opposition d'Edme François Denys, prêtre de Saint-Jean-Baptiste, « M. de Pons, bachelier en droit civil et canon, étant actuellement aux études de l'université de Paris», fut élu «chanoine de l'église collégiale de Saint Jean Baptiste de Chaumont-en-Bassigny » (Registre des délibérations de la ville ; A.D. Haute-Marne, 3 B 27, f° 116 v°). D'après Jolibois, il n'y avait aucun droit, étant né à Marly, et il dut sa nomination, « faite sans le concours du chapitre, à l'influence de son père». Elle fut cependant confirmée, en 1709, « à la suite d'un procès fameux. Le factum que rédigea P. contre ses adversaires a commencé sa réputation littéraire. Mais il ne résida pas [...] et négligea même de se pourvoir des ordres nécessaires, de sorte qu'il fut forcé de donner sa démission, en 1714 ». Dans cet acte, passé à Paris le 12 mars en l'étude de Me Le Maignien, il est présenté comme « député de sa compagnie, demeurant [...] rue du Coq, paroisse de Saint-Germain de l'Auxerrois » (A.D. Haute-Marne, reg. des insinuations, G 901). Malade, P. «prit en 1727 le parti de se retirer à Chaumont dans le sein de sa famille, pour y traîner le reste de ses tristes jours» (Avertissement, Œuvres).

5. Opinions

Beau tempérament d'intellectuel, ardemment cartésien et plein d'idées nouvelles, il peut être considéré, Marivaux mis à part, comme le plus doué des « Modernes » du temps de la Régence. A cause de la vigueur de ses polémiques, mais aussi de ses infirmités physiques, « le bossu de La Motte » fut une des cibles favorites des poètes satiriques comme des partisans des Anciens et de ceux qu'il a baptisés «les Erudits».

6. Activités journalistiques

P. publia dans le Nouveau Mercure la plupart des essais recueillis ensuite par Melon dans l'édition de ses Œuvres, Paris, Prault fils, 1738 (annonce dans le Mercure d'avril, p. 707), notamment Dissertation sur le poème épique, janv. 1717, p. 176 et suiv. ; Dissertation sur les langues en général, mars 1717, p. 8 et suiv. ; Réflexions sur l'éloquence, mai 1718,

p. 5-26 et Nouveau système d'éducation, précédé d'un petit éclaircissement sur la définition de l'éloquence, juil. 1718, p. 643 ; mais on peut, semble-t-il, lui attribuer aussi au moins une Lettre écrite en province au sujet du livre de La Religion chrétienne prouvée par les faits, parue dans les Mémoires de Trévoux, août 1722, p. 1328-1346 (voir Marivaux, Journaux et Œuvres diverses, Paris, Garnier, 1969, p. 590).

8. Bibliographie

8. B.Un. ; N.B.G. – Avertissement en tête des Œuvres de Monsieur l'abbé Pons (D'après la B.Un., cet avertissement n'aurait pas été écrit par J.F. Melon, le responsable de cette éd., mort en janvier 1738, mais par Prévost, car dans le t. XV du Pour et contre, p. 41, celui-ci dit qu'il va se servir « des termes qu' [il y a] déjà employés »). J. Sgard, dans Prévost romancier, Paris, 1968, p. 611, confirme cette attribution en renvoyant à l'article de Prévost sur ces Œuvres (Le Pour et contre, t. XIV, p. 313 et suiv. ; cf. p. 402, n. 4). – A.D. Haute-Marne (A.M. Couvret et M. Decker). – Jolibois E., Histoire de la ville de Chaumont (Haute-Marne), Paris, B. Dumoulin, Chaumont, C. Cavaniol et Simonnot-Lansquenet, 1856. – A.D. Haute-Marne, Notes du baron de l'Horme, 22 J 9. – La Chesnaye Des Bois et Badier, Dictionnaire de la noblesse, 3e éd., Paris, Schlesinger, 1870, t. XVI.

PHILIPPE DE PRÉTOT

Auteurs

Numéro

635

Prénom

Etienne

Naissance

1710?

Décès

1787

Etienne André Philippe, qui prit le nom de Philippe de Prétot au moins à partir de 1755 (Dédicace de ses Tablettes géographiques), naquit à Paris, vers 1708 (N.B.G.) ou 1710 (B. Un.). Il était fils d'Etienne Philippe (juil. 1676-mai 1754), maître de pension et humaniste, originaire de Beauvais, qui a traduit Cicéron et publié en 1716 une Apologie de l'Eloge funèbre du roi prononcé par le P.

2. Formation

Humaniste distingué, il fut membre des académies d'Angers et de Rouen.

3. Carrière

De 1743 à 1753 il fut chargé de diriger la réimpression des classiques latins, dont Lenglet-Dufresnoy avait inspiré l'idée au libraire Antoine Urbain Coustelier fils, et sa carrière fut celle d'un professeur «d'histoire, de géographie et de belles-lettres» (Ars., ms. 11604, f° 259, 1746) ; mais il se spécialisa assez vite dans l'histoire et la géographie, matière alors négligée dans l'enseignement secondaire, qu'il a fortement contribué à faire entrer dans la pédagogie. Il enseignait «dans les meilleures maisons de Paris» (La Semaine littéraire, 1760, t. II, p. 95) et se piquait d'avoir pour élèves les enfants des «plus grands seigneurs» (ibid.), telle la fille de Mme de Béthune (Ars., ms. 11604, f° 255). Pour asseoir sa réputation, il donnait «tous les dimanches et fêtes», à son domicile, des «cours publics et gratuits» (cycle de «conférences» sur «l'histoire universelle ancienne et moderne», mars-déc. 1757 ; nov. 1759-1760. Voir La Semaine littéraire, t. II, p. 95 ; t. IV, p. 234, 258). Plus tard, il figura probablement parmi les professeurs de l'Ecole militaire, puisqu'il fut l'un des principaux collaborateurs de Batteux lorsque celui-ci fut chargé de publier le Cours élémentaire «à l'usage» de cette école. Il fut censeur royal, au moins à partir de 1754 (A.R. x755' P- 376 ; B.N., f.fr. 22139, f° 17 et suiv. ; 21998, f° 19) et jusqu'à sa mort (A.R. 1787, p. 506).

4. Situation de fortune

Il demeurait «rue de la Harpe, vis-à-vis la rue des Deux portes» (A.R. 1755-1787) et il ne semble pas qu'il ait jamais quitté Paris, ni même changé de domicile.

6. Activités journalistiques

P. a publié un Recueil du Parnasse ou Nouveau choix de pièces fugitives, 1743, 4 vol. in-12, qu'on peut difficilement considérer comme un journal, et les Amusements du cœur et de l'esprit, dont l'histoire détaillée reste à écrire. De 1734 à 1737, le libraire Didot publie des Amusements du cœur et de l'esprit, «ouvrage périodique», qui a pu être lancé par les deux Philippe, le père et le fils. Les quatre premières feuilles parurent en 1734-1735 (D.P.1 96), les cinq suivantes, œuvre de François Bruys (voir ce nom), en décembre 1736 et janvier 1737 ; mais en mars 1738 Dubuisson écrit au marquis de Caumont que le journal a «déjà changé trois ou quatre fois d'auteur». De 1740 à 1745, paraissent de Nouveaux Amusements du cœur et de l'esprit (Amsterdam, Z. Chastelain ; D.P.1 995) : le sixième tome, daté de 1740, aurait été publié au début d'août 1742 (Cocquard écrit le 8 à Titon Du Tillet, n.a.fr. 6842, f° 88, qu'il a bien reçu les exemplaires que «M. Philippe» avait remis à celui-ci) ; le treizième et le quatorzième, en mars 1743 (ibid.) ; et la collection complète comporte 15 vol. in-12. Le 18 août 1746, le commissaire Rochebrune, qui présente le recueil comme une simple « rapsodie de vers et prose déjà imprimés », s'affirme «certain» que Philippe est «l'éditeur de ce livre dont il s'avoue l'auteur» : «Il avance avec confiance que cet ouvrage périodique a été soumis à l'examen d'une approbation, que le nom de Bullot, imprimeur, est à la fin et celui de la veuve Pissot, libraire, au frontispice [...], plus [le nom de] Du Sauzet. De tous ces faits, le seul véritable : le nom de Bullot effectivement à la fin [...]. Il est vrai que les Amusements ont été poussés jusqu'au quinzième vol. sans privilège parce que M. le Chancelier a proscrit depuis quelques années les ouvrages périodiques». En fait, le t. I du recueil, réédité par Z. Chastelain en 1751, et conservé à la B.N. (Z 24508), débute par un texte daté du 1er février 1737, et d'après la Table du Journal de Verdun, ce journal annonçait en avril 1750, p. 253, les «Amusements du cœur et de l'esprit par M. Philippe fils. Suite nouvelle, tome II, seconde division». Longue et confuse histoire (1734-1737, 1737-1751), qui se compliquerait encore, si l'on croyait devoir tenir compte d'une autre donnée fournie par la même Table : « Nouveaux amusements sérieux et comiques, in-12. On avait dessein d'en donner deux feuilles chaque semaine. L'éloge des miroirs et du silence font la matière des deux premières feuilles. Nov. 1735, p. 371 ». Voir aussi art «Turben».

7. Publications diverses

Essai de géographie pour les commençants, Paris, Thiboust, 1744, 3 part, en un vol. in-8°. – Analyse chronologique de l'histoire universelle depuis le commencement du monde, jusqu'à l'empire de Charlemagne, Paris, M. Lambert, in-8°, 24-302 p. (trad. du Compendium historiae universalis de Jean Le Clerc ; rééd. : 1756, 1781). – Mémoires sur l'Amérique et sur l'Afrique données au mois d'avril 1752, s.l., 1754, in-8°, 58 p. – Tablettes géographiques, pour l'intelligence des historiens et des poètes latins, Paris, A.M. Lottin, 1755, 2 vol. in-12. – Le Triomphe des dames, ou le Nouvel empire littéraire, Paris, 1755, in-8°, 23 p. – Cosmographie universelle, physique et astronomique, 1760, in-12. – Le Spectacle de l'histoire romaine depuis la fondation de Rome jusqu'à la prise de Constantinople, s.l., 1762 (rééd. : 1776). – Les Révolutions de l'univers, ou Remarques et observations sur une carte géographique destinée à l'étude de l'histoire générale, Paris, impr. de H.L. Guérin et L.F. Delatour, 1763, in-8°, 176 p. – Atlas universel pour l'étude de la géographie et de l'histoire ancienne et moderne, «par M. Philippe et autres auteurs», Paris, Nyon l'aîné, 1787,in-40, VI-126 p. (dont 125 cartes).

D'autre part, P. a édité, avec préfaces et notes, les élégiaques et satiriques latins, Lucrèce (Lucretiae Parisiorum, 1744), Virgile et Cornélius Nepos (1745), Velleius Paterculus (1746), Eutrope, Phèdre (1748) et Térence (1753).

8. Bibliographie

8. B.Un., t. III, p. 266 et t. XXXIII, p. 126-127. – N.B.G., t. XXXIX, p. 994. – Cior 18.

MERAULT

Auteurs

Numéro

567

Prénom

Adrien

Naissance

1708

Décès

1746

Adrien Maurice Mérault, Merault, ou Mairault, dont le nom porte parfois la particule, naquit à Paris en 1708 ; il y mourut, d'une longue maladie, le 15 août 1746. D'après B.Un., il était fils d'un procureur général au Grand Conseil. Effectivement, un M. Merault y fut conseiller, à partir du 16 novembre 1703 (A.R. 1740, p.

4. Situation de fortune

L'année de sa mort, il habitait « rue des Petits Augustins, paroisse Saint-Sulpice, en une maison occupée par la dame de Villiers», sa belle-mère (procès verbal du commissaire La Vergée, 29 avril 1746: Ravaisson).

5. Opinions

En 1746, son hostilité à l'égard de Voltaire est assez connue pour qu'il soit suspecté d'avoir écrit, à propos de sa candidature à l'Académie, le Discours prononcé à la porte de l'Académie française par le directeur à M*** (de Roy). Le commissaire ne trouva chez lui qu'un texte manuscrit: «M. de Voltaire se répand en invectives».

6. Activités journalistiques

M. a collaboré aux deux derniers grands journaux de Desfontaines, Observations sur les écrits modernes (1735-1743) et Jugements sur quelques ouvrages nouveaux (1745-1746). Quelques jours avant la mort de celui-ci, le 7 décembre 1745, Bonardy écrivait à Bouhier: «S'il meurt, on croit que ses jugements seront continués par M. Fréron, ou par l'abbé de [Marsy], ou par M. Mérault, tous trois ses amis, et en état de bien faire, s'ils veulent s'en donner la peine, et ne pas travailler à la toise» (B.N., f.fr. 24409, f° 108 v°).

7. Publications diverses

7. Relation de ce qui s'est passé dans le royaume de Maroc depuis l'année 1727 jusqu'en 1737, Paris, 1742, in-12. – Les Pastorales de Némésien et de Calpurnius, traduites en français avec des remarques et un discours surl'églogue, Bruxelles [Paris], 1744, in-12. – D'après B.Un. M. serait l'auteur de la Lettre de M. M*** au sujet de la traduction des églogues de Némésien et de Calpurnius, s.l.n.d., in-12, 28 p.

8. Bibliographie

B.Un. ; N.B.G. ; Ravaisson, t. XII ; Cior 18, n° 41578-47579.

MARTEL

Auteurs

Numéro

554

Prénom

Adrien

Naissance

1647?

Décès

1730?

D'après P. Larousse, Adrien Martel serait mort à Toulouse vers 1730. Son prénom est bien attesté : c'est par erreur que la Biographie toulousaine (t. II, p. 25) attribue la paternité des Mémoires sur divers genres de littérature à un N. Martel, «avocat au Parlement de Paris».

3. Carrière

« Il avait été avocat au Parlement de Toulouse », dit Camusat, suivi par l'abbé d'Artigny (t. VII, p. 8) et Larousse, fait confirmé par une lettre de M. (Archimbaud), bien qu'on ne le trouve pas dans la liste des avocats qui se sont inscrits au Parlement de cette ville de 1610 à 1715 (A.D. Haute-Garonne, ms. 88), pas plus que parmi les avocats parisiens. Au XVIIe siècle, un Jean Martel fut avocat à Toulouse (B.N., 4° Frm 25365). On serait tenté d'identifier notre journaliste «avocat» (texte du privilège de ses journaux) à l'Adrien Martel qui en 1694 était «expéditionnaire en Cour de Rome établi à Rouen» (B.N., ms. Clair 1087, f° 222), bien que son nom ne figure dans aucune des biographies normandes (T. Lebreton, E. Frère, etc.). D'après Larousse, M. «consacra tous ses loisirs à la culture des lettres, parcourut l'Italie, l'Allemagne, habita quelque temps Paris et devint membre des Académies des Ricoverati de Padoue, des Infecondi de Rome, des Lanterniers de Toulouse (1688)». La plupart de ces renseignements peuvent être vérifiés : en 1696 M., secrétaire de l'Académie des Lanterniers dont il a été «l'un des principaux fondateurs», en expédie les statuts au Prince de l'Académie de Padoue, propose un « échange de lettres et d'études» entre les deux compagnies et loue les Ricoverati d'avoir accepté dans leurs rangs «les femmes de lettres les plus illustres du siècle présent». Proposé comme membre de l'Académie de Padoue le 1er juin 1693, et peut-être dès 1690, par Charles Patin (1633-1693), qui en avait été le Prince en 1678 et 1679, il n'y fut admis officiellement que le 10 novembre 1696 et dispensé alors de la supplique orale obliga­toire en raison de ses mérites (Giornale degl'Atti correnti dell'Accademia de'Signori Ricoverati, C, p. 64-67). Il semble bien avoir été de ces riches amateurs, passionnés d'échanges culturels, qui tenaient peut-être plus passionnément encore à passer pour des «savants» : en février ou mars 1722, il rencontre Camusat à Paris et lui demande de composer à son intention une épître dédicatoire et une préface latine pour un recueil de lettres d'Heinsius. Le jeune érudit le prit d'abord «pour un escroc» ; jugeant que le texte avait subi « des retranchements et des corrections » impardonnables, il refusa vertement et dépeignit M. comme « une espèce de fou » (Camusat, t. I, p. 196-197). Selon le P. Desmolets, celui-ci était un esprit «plein de chimères» (Bertrand).

5. Opinions

M. destinait ses Mémoires à l'« éducation d'un jeune prince » (texte du privilège) et l'épître dédicatoire des Nouvelles littéraires semble montrer qu'il connaissait personnellement la princesse de Conti : il la loue d'avoir «le courage [de] vivre dans l'obscurité d'une condition privée».

6. Activités journalistiques

Mémoires sur divers genres de littérature et d'histoire, mêlés de Remarques et de dissertations critique [sic], «ouvrage divisé en deux parties. Première partie contenant des recherches de productions de la nature, de pièces fugitives, etc. Par la Société des curieux. Seconde partie contenant divers ouvrages historiques et des vies des grands hommes tant anciens que modernes. On y ajoutera les Extraits des Journaux des savants, à mesure qu'ils paraissent en divers Etats de l'Europe, avec de nouvelles réflexions sur les plus curieux ouvrages, dont les Analyses y sont rapportées», Paris, veuve Le Febvre, 1722 (D.P. 1 905) ; privilège du 7 mai, publication en juin (B.N., f.fr. 21952 et 22022).

Nouvelles littéraires curieuses et intéressantes : t. I, Paris, L. Sevestre, 1723, 45 p. in-8° ; approbation du 24 juillet, paru­tion en octobre (D.P.1 1040). Le projet de M. (faire d'un journal publié «exactement de quinze en quinze jours» un lien entre intellectuels de «divers Etats») fut repris, sous une forme plus modeste, mais avec plus de possibilités de réalisation, par le P. Desmolets dans ses Nouvelles littéraires (D.P.1 1041). M. a pu collaborer à ce journal en envoyant des informations d'Italie («De Padoue», dans les Nouvelles littéraires du 1er déc. 1723. P- 5!-54).

Roderici Alexandri, Opus nullum, Paris, veuve Le Febvre et Bauche le fils, 1722, 2 feuilles ; attribution proposée par F. Moureau qui a remarqué que « les deux exemplaires consultés portent [le] monogramme manuscrit» de M. «sur le titre de la première feuille» (D.P.1 1196).

7. Publications diverses

Lorsqu'ils accueillent M. dans leurs rangs, les académiciens de Padoue évoquent élogieusement ses œuvres impri­mées : une Réponse «pour défendre l'Académie instituée à Toulouse» contre «l'antique Académie» des Jeux Floraux ; un Discours académique sur l'inclination des Italiens pour les belles-lettres ; de «petits Discours écrits en l'honneur du Roi Très Chrétien qui veut faire passer le repos de l'Europe avant sa propre gloire en offrant la paix à ses ennemis». D'autre part, dans sa lettre d'octobre 1696, M. leur demandait «un livre qui lui [avait] été promis par le Sieur Patin pour le joindre à un autre, composé par lui, intitulé La Gloire du beau sexe». En 1716 il prévoyait de publier une Vie du Président Duranti, avec son apologie contre le P. Martène, et annonçait des Vies des illustres Toulousains (Archimbaud). D'Artigny indique que cette vie de Jean Etienne Duranti est le seul élément «intéressant» des Mémoires historiques et littéraires que M. aurait publiés en 1721, en «2 vol. in-12» (t. VII, p. 8).

8. Bibliographie

Camusat F.D., Histoire critique des journaux, Amsterdam, 1734. – Artigny A. d', Nouveaux mémoires d'histoire, de critique et de littérature, Paris, Debure, 1749-1456. – Biogra­phie toulousaine, Paris, L.G. Michaud, 1823. – Larousse P., Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle. – Desbarreaux-Bernard, «Les petites illustrations lanternistes», Bulletin du Bibliophile, 10e série, mai i85i,p. 232 et suiv., sur l'Acadé­mie des Lanterniers. – Archimbaud, Nouveau recueil de pièces fugitives, 1717,1.1, 2e part., p. 5 5 (lettre de M. datée de Lyon, 14 nov. 1716). – Bertrand L., Vie, écrits et correspondance littéraire de Laurent Josse Leclerc, Paris, 1878, p. 72 (lettre du P. Desmolets à Le Clerc, 19 juil. 1722).

MARIVAUX

Auteurs

Numéro

549

Prénom

Pierre Carlet de

Naissance

1688

Décès

1763

Pierre Carlet, qui à partir de 1716 signera Carlet de Marivaux, naquit à Paris au début de février 1688, probable­ment le 4, de Nicolas Carlet et Marie Anne Bullet. Son père, écrivain de la marine au Havre de 1680 à 1685, fut trésorier des vivres en Allemagne (1688-1697), contrôleur contre-garde (1699-1700) et directeur de la Monnaie de Riom (1701-1719). Son oncle maternel, Pierre Bullet, et son cousin J.B. Bullet de Chamblain étaient des architectes en renom. De son mariage (juil.

2. Formation

Etudes au collège de l'Oratoire de Riom (en 1722, il fait certifier son identité par un ancien professeur de cette institution, J.B. Paul; M.C., LXXXVI, 539, 18 sept.); la plu­part de ses maîtres étaient ardemment jansénistes. Inscriptions à la Faculté de Droit de Paris (30 nov. 1710, 25 avril 1711, 30 avril 1712), mais en juillet 1712, il renonce à se présenter au baccalauréat; il vient de publier son premier roman. Nouvelles inscriptions le 30 avril et le 31 juillet 1721. Bachelier en droit le 31 mai (A.N., MM 1123, p. 283), licencié le 4 septembre 1721, il se dit en 1722 «avocat au Parlement» («renonciation» du 18 mai, «notoriété» du 18 sept.: M.C., LXXXVI, 538), mais il ne semble pas qu'il ait jamais plaidé, et dans l'acte de baptême de sa fille, il était déjà désigné comme avocat.

3. Carrière

Il s'installe définitivement à Paris au printemps de 1712. Le séjour qu'il aurait fait à Lyon comme factotum d'une «vieille parente» (La Place, Pièces intéressantes et peu connues, Bruxelles, 1781-1790, t. II, p. 360-362), et qui n'aurait pu se situer qu'en 1725-1726, demeure hypothétique. Dès février 1727, il fut question de l'accueillir à l'Académie (lettre de Marais, B.N., f.fr. 24415, f° 210 ; Réception de Mathanasius, Le Cène, 1731, p. 77)- Il est encore question de lui en décembre 1732, mais Surian, évêque de Vence, lui est préféré (15 janv. 1733). puis Moncrif (5 déc. 1733 ; voir lettre de Le Blanc, 31 oct. 1733, dans Un voyageur-philosophe au XVIIe siècle: l'abbé Jean-Bernard Le Blanc, éd. H. Monod-Cassidy, Harvard U.P., 1941)- Nouvelle campagne en mai 1736: «si mon ami M. de Fontenelle n'est pas assez allant pour lui aller gagner des voix, Mme de Tencin se remuera volontiers pour lui» (lettred'Anfossi, 20 mai 1736, B.M. Avignon, ms. 2279, f° 29); mais Boyer puis La Chaussée sont élus. Il n'entre à l'Académie que le 10 décembre 1742, grâce à la «cabale» de Mme de Tencin (voir la Revue rétrospective, t. V, 1834). Il participera à ses travaux avec une remarquable assiduité.

4. Situation de fortune

Le 18 mai 1722, M. renonça à la succession de son père, «pour lui [...] plus oiseuse que profitable». Colombe Bologne lui avait apporté une dot substantielle (30 000 £ dont 7500 en argent comptant et 22 500 en billets divers), mais une bonne partie de ces revenus fondit probablement dans le désastre de Law (quelques traces de vente de billets d'Etat le 4 oct. 1719 et le 5 mars 1720: M.C., LXXXVI, 526 et 530). Malgré quelques dédicaces au duc de Noailles (1716), à Mme de Prie (1724) et à la duchesse du Maine (1728), et bien qu'il ait peut-être cherché à devenir secrétaire du duc d'Orléans (lettre de Le Blanc à Bouhier, B.N., f.fr. 24412, f° 456), il ne semble pas avoir été au service d'un grand. Il a tiré l'essentiel de ses ressources de son métier d'écrivain : les Comédiens-Français lui ont versé au total environ 2000 £, les Comédiens-Italiens peut-être 20 000; l'édition de ses œuvres peut lui avoir procuré un revenu deux fois plus important. A partir de 1747, N. Lasnier de La Valette lui assura une rente viagère de 2000 £, à quoi s'ajoutaient, au moment de sa mort, une rente de 4000 £ qu'il s'était constituée en 1757-1758, un «intérêt des fermes de Lorraine», et selon sa logeuse, Mlle de Saint-Jean, une «pension de 800 livres sur la cassette du Roi ». Avant qu'il ne cédât à Duchesne le privilège de l'édition de ses œuvres (automne 1757), sa situation financière était précaire: le 7 juillet 1753, il avait reconnu devoir 20 900 £ à Mlle de Saint-Jean et n'avait pu se libérer que de 900 en vendant la plupart de ses meubles. A sa mort, la vente de ses biens produisit 3501 £ 8 sols 6 deniers dont il subsistera finalement moins de 232.

5. Opinions

Les « pensées chrétiennes » du Spectateur français et surtout le Cabinet du Philosophe le montrent très éloigné du jansé­nisme. Ses prises de position en faveur des Modernes (premier témoignage dans le Mercure d'août 1718), sa participation aux discussions des cafés parmi les «Apédeutes» (voir son portrait dans l'Eloge historique de Pantalon-Phoebus) lui valu­rent l'hostilité des «savants». Souvent pris à partie par leurs partisans, il leur répondit en août 1722 dans la 7e feuille du Spectateur et plus particulièrement à Desfontaines, son ennemi particulier, dans la 6e feuille du Cabinet du Philosophe. Longuement raillé dans Tanzaï et Néadarné de Crébillon, il lui répondit dans la 4e partie du Paysan parvenu (automne 1734). Dans L'Ile de la Raison et dans Le Miroir, on trouve des traces de la longue inimitié qui l'a opposé, surtout au cours de la période 1732-1736, à Voltaire qui craignit longtemps de le voir publier une réfutation des Lettres philosophiques (D480, 494, 982, 1038; Bibliothèque française, t. XXIII, 1736, p. 358; Gazette d'Utrecht, supplément du 20 avril 1736). Principales amitiés : Crébillon le père, témoin à son mariage et parrain de sa fille, Fontenelle (Mémoires de Trublet), Helvétius (Le Miroir: Saint-Lambert, Essai sur Helvétius), Mme de Tencin dont il a été un des «sept sages» (Piron, dans le Mercure, févr. 1751), Mme de Verteillac (lettre du 4 déc. 1749), Mme de Lambert (Vie de Marianne), Mme Du Boccage (Le Miroir).

6. Activités journalistiques

Contributions au Nouveau Mercure (dir. l'abbé Buchet), août 1717-avril 1720. – Le Spectateur français, 25 feuilles, juin 1721-sept. 1724, Paris, Fournier, puis G. Cavelier père et fils, F. Le Breton, N. Pissot. – L'Indigent Philosophe, 7 feuilles publiées d'avril à juin 1727, Paris, N. Pissot et F. Flahault, puis P. Huet. D'après le Journal des savants de septembre 1727, p. 1824, Flahault a «débité» au début de l'automne la «huitième feuille» de ce journal. – Le Cabinet du Philosophe, 11 feuilles, fin janv.-avril 1734, Paris, Prault. – Dans le Mercure (mars 1751-déc. 1757), publication de diverses lectures académiques, du Miroir et de l'Education d'un prince. Pour la chronologie des œuvres de Marivaux, voir l'édition du Théâtre complet par H. Coulet et M. Gilot, 1.1, Paris, Pléiade, 1993, p. XCV-CLXI.

8. Bibliographie

Deloffre F., Marivaux et le marivaudage, Paris, Belles-Lettres, 1955 (rééd. A. Colin, 1967). – Durry M.J., A propos de Marivaux, Paris, S.E.D.E.S., i960. – Bonaccorso G., Gli Anni difficili di Marivaux, Messina, Peloritana Editrice, 1965.

Marivaux, monographie établie par S. Chevalley, Comédie-Française, 1966. – M., Journaux et œuvres diverses, éd. F. Deloffre et M. Gilot, Paris, Garnier, 1969, 1988. – Gilot M., Les Journaux de Marivaux, Paris, Champion, 1974. – Hou­daille J., Population, n° 4-5, 1988, p. 406, acte de baptême du26janv. i7i8(A.D. Val-de-Marne, I Mi 144 ou 4 E 655). – Moureau F., « Marivaux contre Voltaire : une lettre retrou­vée», Mélanges offerts à F. Deloffre, S.E.D.E.S., 1990, p. 405­

413. – Sgard J., «Trois philosophes de 1734», Etudes littéraires, t. XXIV, n° 1, été 1991, p. 31-38.

MANGENOT

Auteurs

Numéro

543

Prénom

Louis

Naissance

1694

Décès

1768

Né à Paris, «en 1694, d'un homme de commerce» (N.) «peu fortuné» (Desessarts ; B.Un. ; N.B.G.), Louis Mangenot était le neveu de Palaprat, célèbre fournisseur de l'ancien Théâtre-Italien. Il avait une sœur, «fort dévote, qui le tyrannisait» (N.), et un frère, Christophe, décédé vers 1758, qui sans avoir «fait aucune espèce d'études», avait composé quelques chansons très connues, dont «Malgré la bataille», ou «Le départ de La Tulipe», souvent attribuée à Voltaire (lettre de Fautrier à Fréron, L'Année littéraire, 1761, t. I, p. 128-132).

2. Formation

«Son éducation fut négligée au point qu'il avait environ dix-huit ans lorsqu'il commença ses études», mais «il était né avec le goût et le talent de la poésie» (N.) et Palaprat transmit à son insu à l'Académie des Jeux Floraux sa première églogue : «Le rendez-vous». Il obtint l'églantine d'argent qui lui aurait été présentée par Jean Baptiste Rousseau en personne, à un dîner où son oncle avait aussi convié Campistron et Brueys (N. ; B.Un.).

3. Carrière

«Son peu de fortune fut ce qui le détermina principalement à entrer dans l'état ecclésiastique» (N.). Il devint assez vite chanoine du Temple, « en partie » grâce « à ses compositions poétiques» {B.Un.).

4. Situation de fortune

Ce «poète aimable», «idolâtre des femmes» (M.S.) et «ennemi de toute dépendance» (N.), s'appliqua à vivre «loin du monde» (N.D.H., d'après N.), «content de sa petite fortune» (B.Un.) ; mais «souvent on l'a vu disposer à l'avance du revenu de son bénéfice pour en aider des malheureux » et se trouver dans la gêne (N.).

5. Opinions

D'après le Nécrologe (t. II, p. 157), c'est M. qui inspira à l'abbé Bridard de La Garde, «élevé au Temple», «le goût des lettres et des arts». Plusieurs de ses biographes anciens citent les vers qu'il avait fait graver dans un « petit salon » : vivant «sans peine» et «sans inquiétude», il se flattait de jouir «du destin le plus beau» : «Les dieux m'ont accordé l'âme de Diogène/ Et mes faibles talents m'ont valu son tonneau». Paralytique pendant les dernières années de sa vie - près de « dix-huit ans » -, il « avait conservé dans cet état son aménité, sa gaieté et sa philosophie » et il mourut « doucement, comme il avait vécu» (M.S.).

En mai 1755 (p. 26-27), le Mercure, alors rédigé par Boissy, a consacré à M. une notice aimable à l'occasion du «présent» que La Tour lui avait fait de son portrait, exposé au Louvre, puis copié par un des disciples du maître. Palissot déclare avoir eu avec lui des «liaisons particulières» (N.) et il lui arriva de recevoir Sedaine ; sa sœur, qui ne prenait pas celui-ci pour un homme de lettres, lui aurait déclaré que, comme poète, il était le seul à «déshonorer» une famille qui ne comptait que «d'honnêtes gens» (Desessarts). Sa bête noire était Vadé : le 3 février 1761, écrivant à Fréron pour le remercier d'avoir rendu à son frère la chanson «Malgré la bataille», il se disait «très fâché» de la manière de celui-ci, car il attribuait « la naissance du style poissard à la réussite du style grivois» (L'Année littéraire, 1761, t. I, p. 253-254) ; six semaines plus tard, le 15 mars, il envoyait à Lebrun un épigramme «que l'indignation [lui] a[vait] suggérée contre le brutal Fréron, c'est-à-dire contre le proxénète de la Muse de Vadé» ; «le dieu du goût» y condamnait le journaliste «Pour avoir excusé les vers d'un polisson, / Et dénigré d'Aquin, Lebrun, même Voltaire» (Lebrun). Or, dans une lettre datée du 15 juin 1764 (D11906), P.L. d'Aquin félicita Voltaire d'avoir « mis aux galères » nombre de ses adversaires, à la suite desquels il désignait «le paralytique Mangenot».

6. Activités journalistiques

D'après la B.Un., «l'abbé Mangenot avait travaillé au Journal des savants depuis le 20 septembre 1727 jusqu'au 17 novembre 1731». La lecture des numéros en question ne semble pas permettre de savoir quelle fut au juste cette participation.

Selon Palissot, certaines de ses chansons parurent «dans quelques journaux». En tout cas, son «Eglogue première» et sa «Seconde églogue», «les Confidences» ou «Thémire et Silvarette», furent publiées dans le t. V du Censeur hebdoma­daire (1760, p. 3-18 et 81-87). «Tircis et Philis» parut aussi dans le Journal encyclopédique, 1761, t. II, p. 116-120, et «Thémire et Silvarette», la même année, t. III, p. 102-106.

M. est-il l'auteur du Spectateur littéraire, quatre feuilles parues chez Chaubert et vendues «six sols», en I728(?), 91 p., in-8°, reliées à la suite du Nouvelliste du Parnasse dans une collection de la B.M. Lyon : 377496, t. IV (D.P.1 1222)? Approbations : 10 janvier, 1er, 13 et 23 février 1728. «Permission simple» accordée à Hugues Daniel Chaubert le 18 janvier (f.fr. 21954, p. 57 ; 21955, n° !556). Feuilles «retirées» pour le Cabinet du roi le 19 mars (f.fr. 22023, f° *54). L'abbé Desfontaines lui attribuait ce journal sans la moindre ambiguïté. On peut lire en effet dans un Avis paru dans la Bibliothèque française (t. XI, 2e part., p. 272) : «En faisant la critique du Cyrus, on ne s'est jamais proposé d'en parler comme d'un ouvrage de doctrine, ce qui serait ridicule. Ainsi l'on est bien éloigné d'y trouver un Germe de Tolérantisme » (en note : Journal de février 1728) : «Cette belle découverte n'appartient qu'à un nouveau journaliste qui depuis peu vient d'imprimer, par simplicité ou par bêtise, qu'on ne saurait démontrer invinciblement l'existence de Dieu, ni rien écrire de supportable sur la Providence. C'est dans une brochure » (en note : On peut prouver par écrit et par témoins que le St [sic] Mangenot en est l'auteur, quoique la honte le lui fasse nier) « qu'il vient de donner la preuve de sa capacité et de son esprit, par son pitoyable extrait du Cyrus». Puis, p. 288, toujours en note, à propos d'un abbé mis en scène dans les Entretiens sur le voyage de Cyrus et qui ressemble fort à Desfontaines lui-même : « Cet abbé est peut-être celui dont il est parlé dans la nouvelle brochure intitulée : Le Spectateur littéraire, de l'abbé MANGENOT, nouveau journaliste de Paris ; brochure qui peut servir sans doute à établir sa réputation dans la République des Lettres ». Toutefois, dans le même numéro, rubrique «Nouvelles littéraires», p. 338, parut le démenti suivant : « Il a paru chez Chaubert quatre feuilles [sic] d'une brochure intitulée le Spectateur littéraire. Cet ouvrage qu'on a attribué à l'abbé Mangenot Journaliste de Paris dans les Entretiens sur le Voyage de Cyrus est constamment de M. Camusat ; peut-être que M. Carlet de Marivaux y a mis la main». D'autre part, M. se défendit d'en être l'auteur dans le Journal des savants (1728, p. 254) «et assura qu'il n'avait pas même lu ce petit ouvrage périodique» {B.Un.).

7. Publications diverses

La première églogue de M. a été publiée dans le Recueil de l'Académie des Jeux Floraux, 1718, p. 67-72. La plupart de ses compositions - des «petits riens» (M.S.) -, «églogues», «fables», «contes», «réflexions», «sentences», «madrigaux», etc., ont été recueillies dans les Poésies de M. l'abbé Mangenot, Maestricht, J.E. Dufour et P. Roux, 1738, in-8°. Les huit ou dix lignes, imagées et humoristiques que repré­sente son «Histoire abrégée de la poésie française», de Ronsard et Baïf à Voltaire, en passant par Corneille, Racine et Quinault (L'Année littéraire, 1762, t. VII, p. 334-335) ont souvent été citées jusqu'au milieu du XIXe siècle.

8. Bibliographie

B.Un. ; N.D.H. ; N.B.G. ; D.L.F. ; Desessarts, t. IV, p. 258­259 ; Cior 18. M.S., 22 nov. 1768, t. IV, p. 149-150. – (N.) Nécrologe des hommes célèbres (art. de Palissot), t. III, 1769, p. 85-111. – Sabatier de Castres A., Les Trois siècles de notre littérature, Amsterdam, Paris, 1772. – Philipon de La Madelaine L., Dictionnaire portatif des poètes français, Paris, 1804. – Lebrun, P.D. Ecouchard, Œuvres, Paris, 1811, t. IV, 116. – Gilot M., Les Journaux de Marivaux, U. de Lille III, 1974, t. II, p. 875.