PÂRIS DE LESPINARD

Auteurs

Numéro

620

Prénom

Joseph

Naissance

1744

Décès

début du XIXe s.

Joseph Paris de Lespinard, né en 1744 à Genève d'après lui-même (autobiographie parue dans la Gazette du département du Nord entre le 6 et le 20 août 1793), à Annecy d'après Lemaire, à Surinam (Guyane hollandaise) d'après l'acte de naissance de son fils, né à Lille en mars 1778 ; de toutes façons, ses origines restent très controversées. Mort à une date inconnue, après 1804 ; la dernière trace écrite du personnage est son nom gravé sur le monument érigé à Wimereux (Pas-de-Calais) en l'an XII, en l'honneur de Pilâtre Des Roziers.

2. Formation

Aucun document sur sa formation, mais de nombreux passages de la Feuille de Flandres, et son style en général, laissent entrevoir un homme d'une vaste culture, et curieux de tout, donc ayant reçu une solide instruction. A noter une passion particulière pour l'aéronautique : il fit, avec l'aéronaute Blanchard, la première ascension en montgolfière au départ de Lille, le 26 avril 1785 (cf. tableau de Louis Watteau).

3. Carrière

Il était sans doute établi avant 1768 à Marseille, où sont imprimées les Affiches de Marseille, puis les Affiches d'Aix ; le 21 avril 1773, il acheta 250 £ le brevet de maître-imprimeur à Aix ; il commit quelques imprudences politiques qui amenèrent le chancelier Maupeou à lui interdire, le 31 janvier 1773, de publier son supplément consacré aux textes officiels (Feyel, t. IV, p. 1396), mais on ne sait rien de lui avec précision avant son établissement à Lille, en 1776 (Lemaire). Il vécut d'expédients en Hollande pendant environ sept ans, servit dans l'armée, épousa à La Haye la maîtresse d'un grand seigneur hollandais, fit des dettes qui l'obligèrent à rentrer en France en 1776. Il séjourne à Lille sans interruption jusqu'à son arrestation, le 26 août 1793, puis passe 15 mois en prison à Paris : fait ensuite, en l'an III, plusieurs voyages entre Paris et Lille «pour s'y livrer à l'agitation politique» (Lemaire), puis semble s'être désintéressé de la politique, et ne plus s'être préoccupé que d'aérostation jusqu'à sa mort.

4. Situation de fortune

Jusqu'en 1780, il vécut souvent d'expédients et fit beaucoup de dettes ; en novembre 1776, il devait 2000 £ à un bourgeois d'Utrecht (Feyel, t. IV, p. 1397). Le journalisme lui permit de rétablir sa fortune ; il semble avoir joui d'une grande aisance, car il possédait en 1789 une belle et vaste maison, avec une riche bibliothèque. Ruiné par la Révolution et sa longue détention, il abandonna le journalisme et mourut dans l'obscurité.

5. Opinions

Opinions assez modérées sous l'Ancien Régime, et respectueuses des autorités en place, mais assez hardies sur le plan des idées philosophiques pour mériter à leur auteur des poursuites : le n° 70 des Feuilles de Flandre, du 30 mars 1784, fut publiquement brûlé, par arrêté du Parlement de Douai, pour un article expliquant l'attitude des criminels par leur tempérament particulier. A partir de 1789, opinions très favorables à la Révolution, et s'adaptant très rapidement à l'évolution de la situation politique : il est partisan de la monarchie constitutionnelle jusqu'en juin 1791 (fuite et arrestation du roi), puis de plus en plus méfiant : devenu républicain à partir du 10 août, le «citoyen Joseph Paris» (telle est sa signature à partir de juil. 1791) suit en 1793, jusqu'à son arrestation, une ligne politique proche de celle de Robespierre, qu'il admire ouvertement. Ardemment patriote, il participa activement à la défense de Lille lors du siège autrichien en 1792. Affilié à la Société lilloise des Amis de la Constitution en juillet 1791 (présenté par l'architecte Dewarlez).

Nombreux procès : contre son imprimeur De Boubers en 1787-1788, qui avait contracté envers lui de nombreuses dettes ; contre un aventurier d'origine belge, Thomas Arlet, dit «Le Père Eternel», en avril 1791. L'arrestation du ci-devant chevalier, en août 1793, est sans rapport avec les idées exprimées dans son journal (il fut autorisé à le publier pendant deux semaines, en résidence surveillée), mais semble résulter d'une lutte d'influence au sein des Jacobins lillois, ainsi que de relations compromettantes pour P. (général Lamarlière, suspect de «girondisme»).

6. Activités journalistiques

6. Annonces, affiches et avis divers pour la ville de Marseille (D.P. 1 36) : P. y apparaît en 1768, avant de fonder les Affiches d'Aix, mais il est possible qu'il ait rédigé les Affiches de Marseille dès 1762 (Feyel, t. IV, p. 1395).

Annonces, affiches, avis divers d'Aix, imprimées à Marseille de la fin de 1769 au 13 juin 1773 (D.P.1 6) par P. (Gérard, p. 8-9 ; Billioud, «Paris de Lespinard»).

Affiches, annonces et avis divers pour la province de Flandres imprimées à Lille à partir du 3 août 1781 (voir D.P.1 455 : Feuille de Flandres). Imprimeur : De Boubers jusqu'à la fin de 1787, semble-t-il, puis Lemmens, rue Neuve, jusqu'au 26 juillet 1791, enfin le rédacteur lui-même, qui avait ouvert sa propre imprimerie, Rue de l'Abbaye de Loos. Le journal devient Feuilles de Flandres en août 1783, puis Gazette du Département du Nord en août 1790. P. avait signé un bail de dix ans avec Benezech le 8 septembre 1780 ; dès 1782, il fondait un cabinet de lecture, puis en 1784 une Petite Poste (Feyel, p. 1398) ; l'aérostation, dont il fut l'un des pionniers, lui permit de faire une publicité souvent tapageuse en faveur de sa feuille (Feyel, p. 1398-1400).

Almanach de la Petite Poste de Lille et de sa châtellenie, Lille, 1787, in-18.

7. Publications diverses

Mon Retour à la vie après quinze mois d'agonie, Lille, frimaire an III (déc. 1794), opuscule de 92 p., à allure de pamphlet racontant son séjour dans les prisons de l'Egalité et de l'Hospice national.

8. Bibliographie

H.G.P., t. I, p. 382-399. – Ribbe C. de, Un journal et un journaliste à Aix avant la Révolution, Aix, 1859. – Levet E., «Joseph Paris de L'Epinard», Revue savoisienne, n° 10-11, 1888, p. 303-310. – Lemaire L., «Paris de Lépinard, journaliste lillois ; son arrestation pendant la Terreur», Bulletin du Comité flamand de France, 1921, p. 299-331. – Danchin F., Imprimeurs et imprimés lillois, Lille, 1932. – Lépreux G., «Nos journaux, histoire et bibliographie de la presse périodique dans le département du Nord, 1746-1895», dans Encyclopédie historique du département du Nord, Lille, 1896. – Beaucamp F., Journaux et journalistes lillois, Lille, 1932. – Bourgeois J., La Presse lilloise avant la Révolution, thèse droit, U. de Lille, 1932. – Billioud J., «Paris de Lespinard», Marseille, n° 7, 1950, p. 53-59. – Id., Le Livre en Provence du XVIe au XVIIIe siècle, Marseille, Impr. Saint-Victor, 1962. – Gérard R., Un journal de province sous la Révolution, le «Journal de Marseille» de Ferréol Beaugeard (1781-1797), Paris, 1964. – Maeght X., La Presse dans le département du Nord, sous la Révolution française (1789-1793), thèse de 3e cycle, juin 1991, U. de Lille III. – Trénard L., Duthoy J.J. et Oursel H., Histoire de Lille, Toulouse, Privât, 1991, t. III. – Feyel G., L'Annonce et la Nouvelle : la presse d'information et son évolution sous l'Ancien Régime (1630-1788), thèse, U. de Paris IV, 1994 ; Oxford, Voltaire Foundation, 1999.

9. Additif

Bibliographie: Dans l’édition imprimée de L’Annonce et la nouvelle de Gilles Feyel (Oxford, VF, 2000, p. 1239-1244), on trouvera une biographie détaillée de Pâris de Lespinard. Sans ajouter de nouveaux documents à la notice de L. Trénard, Feyel développe le caractère aventureux de Pâris, suppose avec vraisemblance que sa noblesse était usurpée, met en lumière son sens de la publicité, du commerce (avec les cabinets de lecture, les livraisons de livres à domicile) et ses démêlés avec Courmont pour contourner le privilège des taxes postales. (J.S.)

LECLERC DE MONTLINOT

Auteurs

Numéro

484

Prénom

Charles

Naissance

1732

Décès

1801

Charles Leclerc de Montlinot (ou le Clercq) est né en 1732 à Crépy-en-Valois (Oise) probablement au sein d'une famille bourgeoise. Leclerc de La Bruère, né en 1716 à Crépy, éditeur du Mercure de France entre 1744 et 1750, est-il de la même famille? Il publie parfois sous le couvert de l'anonymat, parfois sous un pseudonyme. Abraham Ralecq, colporteur. Marié à une date inconnue, L. meurt en 1801.

2. Formation

L. fit ses études de théologie vraisemblablement à Paris ; après son doctorat, il prépara une thèse en médecine, si l'on en croit la B.Un. ; cependant, tout en semblant proche des médecins, L. ne mentionne jamais cette qualité. Docteur en théologie, il est nommé chanoine de la Collégiale Saint-Pierre de Lille en 1753 où il est affecté en qualité de bibliothécaire adjoint au chanoine François de Valori de La Pommeraye, aumônier du comte d'Artois. A la suite de polémiques, L. renonce, en 1766, à sa prébende lilloise et s'installe dans la capitale où il se marie.

3. Carrière

La première partie de sa carrière est celle d'un ecclésiastique lettré. Sans doute grâce à des recommandations, il obtint un canonicat en l'église Saint-Pierre de Lille. Etait-il déjà membre d'une loge maçonnique? Les chanoines Paul et Guy de Valory, l'imprimeur libraire Charles Joseph Panckoucke sont affiliés et cette appartenance aux loges crée des solidarités. L. travaille pour les éditeurs lillois. Il participe à la fondation d'une société littéraire appelée Le Brunin, créée par Charles Joseph Panckoucke et rassemblant surtout des négociants qui formaient l'élément socio-culturel le plus dynamique de Lille. Elle a pour but d'instruire autrui de ce qu'elle connaît, ce qui est une mission très nouvelle, de «recueillir des matières pour l'historien du pays, s'appliquer à tout ce qui peut faire fleurir le commerce et l'agriculture de la province». En 1762, un incident mit fin à ses activités : Panckoucke est condamné à six semaines de prison pour avoir fait l’éloge d’Emile (voir art. « Panckoucke C.J. »). Son équipe gagne Paris. Comme Alexis Mathon, journaliste également, comme Charles Joseph Panckoucke mal à l'aise à Lille, L. gagne Paris en 1766. L. se fait connaître par ses réflexions sur la mendicité ; il est chassé de Paris, exilé par lettre de cachet à Soissons à la demande du commandant de la Flandre qui le qualifie de chanoine honoraire (A.D. Aisne, C. 677). Necker lui confie la direction du Dépôt de mendicité de la généralité de Soissons que le ministre a rénové, profitant de ses relations personnelles avec l'intendant Le Peletier de Morfontaine. Pour réagir contre le statut antérieur des dépôts et contre les véhémentes critiques qu'il soulevait, Necker crée un dépôt modèle à Soissons où «dominerait cet esprit de sagesse et d'humanité qui doit allier le maintien de l'ordre à un sentiment d'indulgence et de commisération». Les trois dépôts de la généralité de Soissons y furent réunis : le travail des détenus rendu obligatoire pour tous, les conditions de vie améliorées sous l'autorité diligente de l'abbé de Montlinot. Necker charge, en 1788, L. de «rechercher les causes de la progression énorme des enfants trouvés dans la généralité de Soissons depuis la loi publiée en 1779. L. rend compte de son enquête en 1790 : Observations sur les enfants trouvés de la généralité de Soissons. L. est associé aux travaux du Comité de mendicité par Larochefoucauld-Liancourt ; il rédige des rapports, il collabore avec Barère à la préparation de la loi du 22 floréal An II (11 mai 1794) relative au Livre de la Bienfaisance nationale. En l'An V, il est nommé chef de bureau des Hôpitaux. Au soir de sa vie, sous le Directoire, le ministre Quinette, député de l'Aisne, nomme L. premier surveillant à l'Ecole vétérinaire d'Alfort (25 oct. 1799).

4. Situation de fortune

Le chapitre de la Collégiale Saint-Pierre de Lille est un très riche chapitre disposant d'un revenu équivalant au triple de la mense archiépiscopale de Cambrai, presque autant que la mense épiscopale de Paris. Ses prébendes, ses pensions, ses censives éclipsent de loin celles des autres chapitres de la Flandre wallonne. Les progrès de l'agronomie et de la production agricole régionale lui assurent de substantiels profits. Le chapitre compte 181 personnes dont 41 chanoines.

5. Opinions

L. manifesta des opinions hardies, il réfuta les Préjugés légitimes contre l'Encyclopédie en 1758, dans une brochure intitulée Justification de plusieurs articles du Dictionnaire encyclopédique qui fut attribuée à Diderot. Il expose en 1762 ses idées philosophiques dans son Discours préliminaire à son Discours portatif d’histoire naturelle, il emprunte ses arguments à Spinoza, à Helvétius, à l'abbé de Prades, à l'Interprétation de la Nature de Diderot. Son ouvrage est attaqué par un capucin lillois, le P. Sylvin et par un chanoine régulier de Cysoing, Louis Wartel dans L'Athéisme dévoilé dans un nouveau discours sur l'étude de l'histoire naturelle. L. s'inspire du style de Voltaire dans son Histoire de la Ville de Lille, il raille les coutumes lilloises, les croyances, les institutions monastiques. Cet ouvrage provoque encore une fois une réplique de Wartel dans ses Observations sur l'Histoire de la Ville de Lille. L. répondit par un pamphlet signé d'un pseudonyme. Le Magistrat fit saisir les exemplaires de cette Histoire déposés chez les libraires Henry et Jacquez, eux aussi voltairiens zélés. La polémique se poursuivit jusqu'en 1766, date à laquelle L. s'installa à Paris et quitta l'habit ecclésiastique. Rendu à l’état laïc ; marié, chassé de Paris L., gagné par les thèses les plus audacieuses des Lumières, consacre alors sa compétence et ses convictions aux problèmes sociaux. Les sujets académiques évoluent en effet : ils tiennent compte des questions sociales et éthiques, surtout après 1777. L’académie de Châlons-sur-Marne qui vient de se former propose, pour son premier concours en 1777, la question des « moyens de détruire la mendicité en France en rendant les mendiants utiles à l’État sans les rendre malheureux ». Ce concours remporte un succès significatif : il suscite 118 mémoires au lieu d’une dizaine habituellement. Parmi les lauréats, figure le libraire Panckoucke et son ami le chanoine honoraire L. L’abbé Malvaux, membre du jury, publie une synthèse des meilleures dissertations. De 1777 à 1779, quatre autres académies et sociétés d’agriculture reprennent ce thème et la société de Soissons couronne de nouveau L. Les dépôts de mendicité, théoriquement réservés aux vagabonds et aux mendiants, reçoivent d’autres catégories de détenus. A Soissons, en 1786, L. compte 32 vagabonds sans asile, 28 vagabonds flétris, quelques 50 fous, des filles pupbliques, des militaires déserteurs, des « mesnages ambulants », 15 pélerins, 256 ouvriers au chômage, 294 journaliers sans emploi, c’est-à-dire « tous ceux qui troublent et inquiètent la sécurité ». Le Mercure de France analyse longuement l’ouvrage dédicacé à Necker. L. proclame son hostilité au système hospitalier. « La question que je vais traiter renferme deux objets : par quels moyens peut-on venir à bout de détruire la Mendicité ? Ma réponse est simple : ne faisons plus d’aumônes et détruisons les hôpitaux. Comment rendre les mendiants utiles sans les rendre malheureux ? N’exigeons plus du pauvre un travail commun au profit des administrations de charité. Soutenons les mains laborieuse de l’indigent et laissons-le jouir d’un air de pur liberté ». Dans le préambule du Mémoire couronné par la Société d’agriculture de Soisson, il reconnaît l’œuvre accomplie par la royauté. « Louis XIV dont la flatterie encensa presque toutes les actions, est en quelques sorte le fondateur de tous les hôpitaux. Il commença par doter celui de Paris et y entassa 3 000 mendiants. Les grandes villes du royaumes voulurent imiter leur maître ».

6. Activités journalistiques

L. collabore au Journal encyclopédique, – « Essai sur un projet de bibliothèque », 1760 - mais son rôle dans la presse lilloise est plus important. Cette presse essaie de naître depuis 1742 : un essai de création d'une gazette se heurte au monopole de la Gazette de France. En 1746, André Panckoucke envisage d'imiter les périodiques parisiens qui donnent des informations sur le plan littéraire, historique, scientifique sans empiéter sur le domaine de la Gazette : L'Abeille flamande disparaît après dix numéros. Charles Joseph Panckoucke reprend le projet paternel et adresse une demande de privilège à Malesherbes en mars 1759 ; elle est acceptée en octobre et le périodique intitulé Annonces et Affiches pour les Provinces de Flandre et d'Artois est annoncé pour janvier 1761. Il paraît en réalité sous le titre Annonces, Affiches et Avis divers pour les Pays-Bas français (D.P.1 51) ; il couvre les deux provinces de Flandre et d'Artois et se veut pratique, «utile à nos concitoyens». Le contenu s'adresse à un double public commerçant et intellectuel ; pour le lectorat curieux de nouveauté, une partie littéraire a pour mission d'annoncer les oeuvres imprimées dans les Pays-Bas français. Chaque semaine, un extrait de ces nouveautés est reproduit dans les Annonces. Elles donnent donc une triple information économique, sociale, littéraire. Panckoucke fait appel à ses compatriotes qui connaissent les richesses littéraires. Mais le véritable rédacteur est L. aidé de M. Pierre de La Moot, bibliothécaire de Saint-Pierre, d'Aimé Feutry, avocat au Parlement de Flandre, de Pierre Dumoncheau, un médecin. Cette nouvelle expérience journalistique à Lille tourne court. Des raisons de rentabilité ont vraisemblablement joué. Mais la cause de l'échec réside dans l'intervention du procureur général du parlement de Douai, Charles de Calonne, qui déclenche l'opposition de l'intendant Caumartin puis celle de Malesherbes, directeur de la Librairie. Panckoucke avait réussi à se faire parrainer par le prince de Soubise et le duc de Belle-Lisle. L'intendant était favorable à cette création. L., fier des «marques non équivoques de bienveillance et de protection que nous avons reçues de différentes personnes en place», s'engage sans prudence. Il fait connaître dans plusieurs numéros de copieux extraits de Rousseau avec commentaires élogieux ; il adresse des éloges à Voltaire aussi brûlants mais plus discrets. En juin 1762, Calonne prend un arrêt contre l'Emile et signale que les Annonces hebdomadaires de la province qui s'impriment à Lille en ont «fait un éloge ridicule et impertinent». Panckoucke doit se rétracter. Néanmoins, le journal est condamné puisque comme l'ouvrage dont il fait l'éloge, il est «contraire à la religion, aux moeurs et aux principes du gouvernement». M. abandonne ses fonctions et s'installe à Paris.

En nivôse An V (janvier 1797), L. participe à la création de La Clef du cabinet des Souverains aux côtés de Garat, de Fontanes, de Peuchet et Rayneval. Il est chargé des questions d'administration intérieure. Mais son activité semble faible à la rédaction de ce périodique.

7. Publications diverses

Esprit de la Mothe Le Vayer, s.l., 1763. – dictionnaire portatif d’Histoire naturelle, 1763. – Moyens de rendre les pauvres utiles, 1779, Lille, Discours qui a remporté le prix à la Société royale d'agriculture de Soissons en l'année 1779 sur cette question : «Quels sont les moyens de détruire la mendicité et de rendre les pauvres valides utiles et de les secourir dans la ville de Soissons.». – Sur les moyens de détruire la mendicité en France en rendant les mendiants utiles à l'Etat sans les rendre malheureux, Académie de Châlons, 1780 (le mémoire est conservé aux A.D. de la Marne). – L. collabore à l'Encyclopédie méthodique, éditée par Charles Joseph Panckoucke de 1780 à 1789. Il en a rédigé les articles «dépôt», «mendiants», «mendicité», «galères», «maison de force», «Dépôt de mendicité», t. II, Economie politique et diplomatique, 1786, p. 71-79. – Etat actuel du dépôt de Soissons précédé d'un essai sur la mendicité, par M. de Montlinot dans les académies de Châlons, d'Amiens, de la Société littéraire d'Arras, de celle des Philalèthes de Lille, de celle d'agriculture de Soissons et inspecteur du Dépôt, Soissons, 1789, 70 p. (B.N., R 8048). – A la veille de sa mort, il publie une édition : La Vie et les Aventures de Robinson Crusoé, 1800. L'ancien chanoine rappelle les distractions de son enfance, notamment la lecture de la Bibliothèque bleue et ajoute : «L'imagination des enfants flétrie presque en naissant achevait de se corrompre dans un âge plus avancé, par les pratiques absurdes d'une religion inconcevable ; ainsi les prêtres et le despotisme abrutissaient les habitants des campagnes en leur donnant des idées fausses sur tout ce qui devait les intéresser ; quelques philosophes échappaient dans les villes à cette contagion sacrée, mais le peuple était sans cesse ramené au double joug sous lequel il devait se courber».

8. Bibliographie

B.Un. ; N.B.G. ; Tucoo-Chala. – Bellanger C. et al., Histoire générale de la presse française, Paris, P.U.F., 1969, t. I. – Duprat C., Le Temps des philanthropes, Paris, C.T.H.S., 1993, t. I. –La Protection sociale sous la Révolution française, Imbert J., Paris, Comité d'Histoire de la Sécurité sociale, 1990. – Thuillier G., «Un observateur des misères sociales, Leclerc de Montlinot», Bulletin d'Histoire de la Sécurité sociale, n° 19, 1989, p. 7-55. – Histoire de Lille, l'ère des révolutions (1715-1851), Trénard L., Privat, Toulouse, 1951.

GRIMOD DE LA REYNIERE

Auteurs

Numéro

363

Prénom

Alexandre

Naissance

1758

Décès

1838

Alexandre Balthazar Laurent Grimod de La Reynière est né à Paris, le 29 novembre 1758. Son père, Laurent, Sr de La Reynière, fermier général, s'était élevé à l'emploi d'administrateur des postes, fournisseur de l'armée du Maréchal de Soubise pendant la guerre de Sept Ans puis à celui de fermier général adjoint en 1753, titulaire de 1756 à 1780 (voir Y. Durand, généalogie des Grimod, p. 256-258). Sa mère, Mlle de Jarente, nièce de l'évêque d'Orléans, sœur de Malesherbes, était galante, spirituelle, orgueilleuse de sa naissance, en dépit de sa mésalliance. G.

2. Formation

Elevé par Mlle Quinault, la cadette, et par l'actrice Mlle Luzy dans le luxueux hôtel que son père fit construire à l'angle des Champs-Elysées et de la Place Louis XV, il leur dut le goût du théâtre et de l'excentricité (Vingtrinier). Destiné à la magistrature où Malesherbes pouvait l'aider, il préféra la littérature et le théâtre. Il montra, de bonne heure, un goût prononcé pour les caveaux et les bouffonneries. Avocat, il est grand prêtre d'une association de gastronomes, «Les Déjeuners philosophiques » ; il y retrouve Rétif de La Bretonne, Beaumarchais, Fontanes, Joseph Chénier. En 1788, il fréquente à Lyon l'abbé Barthélémy de Grenoble, le chevalier Aude. Il énumère lui-même ses titres : «écuyer, avocat au Parlement, Membre de l'Académie des Arcades de Rome, associé libre du Musée de Paris et rédacteur de la partie dramatique du Journal de Neuchâtel».

3. Carrière

Ce Parisien vécut six semaines à Lyon, en 1776, et rédigea les Lettres à M. Mercier qui parurent en 1781. Avocat au Parlement de Paris, il se distingue par son originalité de pensée et de style, mais il quitte le Palais pour se consacrer à la littérature. Une satire contre Fariau de Saint-Ange lui créa des difficultés avec l'ordre des avocats en 1786 et sa famille obtint pour lui une lettre de cachet qui l'exila à l'abbaye de Domèvre-en-Haye, près de Toul (Vingtrinier), ou de Blamont, près de Nancy (B.Un.), de 1786 à 1788. Il voyagea en Suisse, en Allemagne, parcourut les foires du Midi de la France. Il arriva, en juillet 1788, à Lyon où il fonda un commerce de bazar, épicerie, droguerie, rue Mercière (Vingtrinier).

De retour dans son hôtel parisien, il jouit de la sécurité pendant la Révolution et s'abstint, sinon d'écrire, du moins de publier, de 1789 à 1793. Il aurait alors travaillé à ses Voyages dans les provinces méridionales de la France, au Coup d'œil philosophique sur les individus de la société, à L’Essai sur le commerce en général et sur quelques commerçants en particulier. Il insiste sur ses déplacements et ses activités de commerçant.

Très en vue dans le Paris mondain de l'Empire, en dépit des pires extravagances, il sait demeurer un amphitryon parfait. Ce prince des gastronomes se retira au château de Villiers-sur-Orge. En 1805, il reconstitua un «caveau» à Lyon (Trénard).

4. Situation de fortune

G. vécut aux dépens d'une fortune familiale immense, élevé dans le faste de l'hôtel de La Reynière où son père tenait table ouverte, chaque jour, avec le meilleur cuisinier de Paris. Maître de ces biens à la mort de ses parents, il les gaspilla largement ; la Révolution lui laissa de quoi vivre avec les pires fantaisies et des repas somptueux.

5. Opinions

Esprit ouvert, il s'attache aux mœurs, aux caractères, à l'activité des lieux où il se trouve (Voyages dans les provinces méridionales, Tableau de Lyon). Il croit au rôle moralisateur du théâtre (d'après Peu de chose) ; très classique de goût, son œuvre présente quelques accents préromantiques ; il considère Voltaire comme un écrivain dramatique (Moins que rien). Grâce à sa prudence et à un certain caractère populaire, il traverse sans risques les périls révolutionnaires. En 1793, dans Moins que rien, il critique le théâtre, instrument politique. Après Fructidor, il dénonce les premiers abus de la République. Son Journal est poursuivi comme royaliste et contre-révolutionnaire, quoiqu'il fût étranger aux affaires politiques.

Son activité l'a poussé à se livrer au commerce ; il écrit pour les négociants son Essai sur le commerce.

6. Activités journalistiques

Succédant à Le Vacher de Chamois, il rédige le Journal des théâtres avec l'aide d'une «Société de gens de lettres» de septembre 1777 à juin 1778 (D.P.1716).

Il rédige seul la partie dramatique du Journal de Neuchâtel (1781-1782). Le ms. 1162 de la Bibliothèque de Neuchâtel contient 25 lettres de G., qui permettent de rendre compte de ses relations avec la Société Typographique. Après avoir fait un séjour de dix mois en Suisse en 1776, temps « le plus heureux de sa vie» (lettre du 26 déc. 1780), G. a traité avec la Société Typographique par l'intermédiaire de Montsauge, chargé d'affaire «des ouvrages périodiques» de la S.T.N. à Paris (lettre du Ier août 1780). Il assumera la partie dramatique du Journal de Neuchâtel à partir du Ier janvier 1781 (lettre du 8 déc. 1780), et envoie effectivement son premier extrait le 3 janvier 1781. Mais les difficultés se multiplient rapidement entre G. et les directeurs du Journal : les exemplaires destinés à Paris n'arrivent qu'avec retard et les comptes rendus de G. paraissent après ceux du Mercure (23 sept. 1781), des articles dûs à des Suisses compromettent G. à Paris (17 sept., 25 nov. 1781 ; 17 août 1782), Chaillet voit souvent en lui un rival (27 févr. 1782), les extraits de G. assurent parfois le « remplissage », les fautes sont nombreuses, les errata ne sont pas publiés (ibid.). Une brouille de trois mois intervient de décembre à février 1782, puis une autre en juillet-août 1782. Grâce à l'intercession de L.S. Mercier, ces malentendus paraissent surmontés, mais la lettre de réconciliation apparente du 31 août 1782 n'est suivie d'aucune autre. Pendant deux ans, G. a néanmoins assuré avec régularité la chronique dramatique du Journal de Neuchâtel ; la plupart des comptes rendus de spectacles parisiens peuvent lui être attribués avec certitude ; on en trouvera une liste partielle dans la lettre de G. du 9 oct. 1781 (renseignements fournis par J. Sgard).

En 1785, il publie les deux volumes de La Lorgnette philosophique (Vingtrinier ; D.P.1 853).

De 1787 à 1788, il travaille à la Correspondance littéraire secrète de Neuwied (D.O.A. ; D.P.1235), à laquelle il fournit six articles signés, observations littéraires rééditées ensuite dans Peu de chose (Hjortberg, p. 137).

Le Censeur dramatique « ou Journal des principaux théâtres de Paris et des départements par Grimod de La Reynière» paraît de 1797-1798, en 4 vol., in-8°, recueil recommandable par son impartialité.

De 1803 à 1812, il dirige la publication de L’Almanach des gourmands servant de guide dans les moyens de faire grande chère par un vieil amateur ou Calendrier nutritif. Il a fourni des articles à de nombreux journaux. Il compose toute la partie littéraire des Petites Affiches de Ducray-Duminil, de 1800 à 1806. En 1824, paraît son Nouvel Almanach des Gourmands. On lui a attribué un Journal des Gourmands et des Belles.

7. Publications diverses

Voir Cior 18, n° 32554-32572. Il débuta dans la carrière littéraire en éditant des œuvres de Lautier : en 1780, il édite Le Fakir, conte en vers ; en 1782, il édite et préface Le Flatteur, comédie en cinq actes et vers libres. Dès 1785, il publie ses œuvres personnelles : Réflexions philosophiques sur le plaisir, par un célibataire. Lorgnette philosophique trouvée par un R.P. capucin sous les Arcades du Palais Royal et présentée au public par un célibataire (de nombreux passages sont copiés dans La Berlue de Poinsinet de Sivry), 1785, 2 vol. in-12. – Peu de chose, Hommage à l'Académie de Lyon, Paris, 1788, Belin, in-8°, 64 p. – Lettre d'un voyageur à son ami sur la ville de Marseille, Paris, 1792. – Moins que rien, suite de Peu de chose, Lausanne et Paris, 1793, 72 p. – L'Alambic littéraire ou Analyse d'un grand nombre d'ouvrages publiés récemment, 1803, 2 vol., in-8°. – La Vision d'un bonhomme, Paris, 1803.Il a inauguré la littérature gastronomique en France et publié un Manuel des Amphitryons contenant un traité de la dissection des viandes, 1808, 1 vol. in-8°.

8. Bibliographie

B. Un. – Varillon P., « Grimod de La Reynière et la physiologie du goût», Revue des Deux-Mondes, Ier juin 1955. – Id., «Grimod de La Reynière», Revue des Deux-Mondes, Ier juin 1956, p. 503-510. – Rogeas H., «Lyon en 1788», Salut public, 21 juin 1901. – Desnoiresterres G., Grimod de La Reynière et son groupe, Paris, Didier, s.d. – Vingtrinier E., Le Théâtre à Lyon au XVIIIe siècle, Lyon, Melon, 1879, in-8°. – Trénard L., Lyon, de l'Encyclopédie au Préromantisme, Paris, P.U.F., 1958. – Durand Y., Les Fermiers généraux au XVIIIe siècle, Paris, P.U.F., 1971. – Hjortberg M., Correspondance littéraire secrète, 1775-1793 : une présentation, Acta Universi-tatis Gothoburgensis et J. Touzot, Paris, 1987, p. 133-137.

9. Additif

Une lettre de Grimod de La Reynière datée du 21 juillet 1780 et adressée à un destinataire inconnu, peut-être le lieutenant de police Lenoir (collection François Moureau), résume l’histoire du Journal des théâtres :

« Les deux premiers volumes du Journal des Théâtres ont été composés en 1776 par M. Le Fuel de Méricourt ; et M. de Charnois et moi n’y avons aucune part.  M. Le Fuel a disparu au 14e numéro après avoir emporté l’argent des souscriptions, et ce n’est que 6 mois après que notre bail a commencé. J’espère que vous vous en appercevrez, Monsieur, au ton de modération qui règne dans le troisième volume et dans les suivants. Les 27e, 28, 29 et 30e numéros sont aussi d’une plume étrangère. M. de Charnois et moi avions quitté l’ouvrage après le n° 26 [...] » (J.S.).

DELANDINE

Auteurs

Numéro

215

Prénom

Antoine

Naissance

1756

Décès

1820

Antoine François Amédée Delandine est né à Lyon le 6 mars 1756 dans la paroisse Sainte-Croix, fils de François Claude Delandine, avocat  à Lyon puis juge civil et criminel à Néronde-en-Forez (Loire), et d'Hélène Michaud de Chantoine, fille d'un avocat célèbre de Vienne. Il épouse, en 1779, Marguerite Françoise Clémence Péronnet de Gravagneux.

2. Formation

Il n'est pas précisé où il se forma aux études d'archéologie, de jurisprudence, de poésie ; il avait un goût développé pour l'histoire et la mythologie.

3. Carrière

Avocat au Parlement de Dijon (1775), à celui de Paris (1777), député du Tiers Etat aux États Généraux pour le Forez (Montbrison), il exerce les fonctions de greffier de la Cour de Cassation et publie des ouvrages d'histoire, de critique qui révèlent son érudition ; de 1788 à 1791, il rédige des plans et des ouvrages à caractère politique. Après la Constituante, il quitte Paris pour Lyon où il devient Bibliothécaire de l'Académie. Expulsé en 1792, il se réfugie à Néronde et en revient en 1795 (Dumas). Il exerce, pendant quatre ans, les fonctions de professeur de législation à l'École Centrale du Rhône (L. Trenard) ; à sa fermeture, il est nommé Conservateur de la Bibliothèque municipale de Lyon (24 floréal an XI, 14 mai 1803 - 18 pluviose an XI, 7 février 1803). Il réunit tous les fonds sous son administration (1805). Il exerce cette fonction jusqu'en 1820 et se montre d'une inlassable activité tant par ses nombreuses publications relatives à son métier que par son intérêt à la vie politique (A.D.Rhône, T. 287).

5. Opinions

D. écrit l'histoire dans un but moral et civique. Aux États Généraux, il s'élève contre la Déclaration des Droits, dangereuse et propre à exciter le peuple, contre la création d'un département unique de Rhône-et-Loire, contre l'émission des assignats. Il rédige régulièrement un Mémorial historique des États Généraux qui renseigne sur les activités de l'Assemblée. Il se prononce pour le veto suspensif du roi et contre la détention du monarque. Sa protestation contre la journée du 20 juin 1792 le rend suspect, il doit quitter Lyon et se réfugier à Néronde ; arrêté par ordre du Conventionnel Javogue, il est emprisonné dans la prison des Recluses de Lyon jusqu'au 9 thermidor (N.B.G.; Feller-Weiss). Professeur de législation, il introduit le droit et la morale dans ses cours. Il se révèle toujours un fidèle défenseur de la royauté. En 1795, il participe à l'organisation de la cérémonie en l'honneur des victimes du Siège de Lyon (Trénard). Il siége au Conseil d'arrondissement en 1806 (Almanach de Lyon, 1806, p. 26, L. Trénard).

D. est correspondant de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres depuis 1781, correspondant de l'lnstitut, membre de l'Académie de Lyon (1781), membre honoraire de la Société royale des antiquaires de Londres (1784) pour son ouvrage, Enfer des peuples anciens (1784), traduit en anglais. Il appartient aux Académies de Dijon, de Rouen, d'Arras, de Nîmes, de Villefranche, à la Société d'Emulation de Bourg. À la société littéraire de Lyon, née en 1778, il ranime la querelle des Anciens et des Modernes ; il adhère à la Franc-Maçonnerie et accueille La Fayette à la Loge le Patriotisme, en juin 1785 (Trenard). En 1805, il reçoit la médaille d'or du mérite civil décernée par François II d'Autriche, pour son article "Louis XVI" dans le Dictionnaire historique (Journal des Débats, 14 mai 1820).

6. Activités journalistiques

Avant 1789, dans le Conservateur (4 t., Paris, Buisson et Grabit, 1787-1788), il publie quelques morceaux de littérature, petites pièces traduites de langue étrangère (Dumas). Dans le Journal de Lyon, 15 avril 1784, p. 11-120, "Histoire mythologique de la Mort" ; 21 fév. 1787 : "Observations sur la tombe découverte à Villette en Dauphiné" ; 28 mars 1797, "Observations sur les cours de législation dans les Écoles Centrales adressées à la Commission d'lnstruction publique" (Dumas).

Lors de la convocation à Lyon de la Consulte Cisalpine, Ballanche et fils éditent un journal spécial : Journal de Lyon et du Midi, 1er nivôse (22 déc. 1801 )-29 ventôse an X (20 mars 1802). D. et Dumas le rédigent. 45 numéros relatent les événements locaux, donnent un compte rendu des séances de l'Assemblée, présentent le récit des fêtes, des dissertations de caractère scientifique, des critiques d'ouvrages nouveaux.

Le Bulletin de Lyon lui succède : du 25 septembre 1802 au 30 décembre 1809. D. y collabore.

Almanach national pour l'année 1790, Paris, Cuchet, in-8°.

Almanach civil, politique et littéraire de Lyon et du département du Rhône pour l'An Vl de la République et les années 1797 et 1798..., Lyon, Daval, an Vl, 8°, CLII-124 p.

7. Publications diverses

Monologue, dialogue, prologue [...] contre un acte de l'Académie française, 1773. — Éloge de Philippe d'Orléans, régent de France, Lyon, Cellier, 1778, in-8°, 61 p. — Dissertation historique sur les Antiquités de Bresse et de Dombes, Lyon, 1780, in-8°. — De la séparation nécessaire de l'administration des grandes cités et de celle des pays agraires qui les avoisinent, 1789, in-8°, 16 p. — L'Enfer des peuples anciens ou Histoire des Dieux de l'Enfer, 1784.

Couronnes académiques ou Recueil des Prix proposés par les Sociétés Savantes, Paris, 1787, 2 vol. — Histoire des Anciens États Généraux ou Histoire des Assemblées nationales en France, Paris, Cuchet, 1788, in-8°, 279 p. — Observations sur les romans et en particulier sur ceux de Mme de Tencin, s.d., in-8°, 43 p. — De la conservation et de l'utilité politique des Sociétés littéraires et des départements, Paris, 1791, 31 p. — Des mines et en particulier des carrières de charbon de terre, opinion prononcée à l'Assemblée nationale, Paris, Gatten, 1791, in-8°, 24 p. — De l'lndivision des mines et des carrières, Lyon, Ballanche, Barret, an IX, 12 p. — De quelques changements politiques opérés ou projetés en France pendant les années 1789, 1790, 1791, ou Discours sur différents points importants de la Constitution et de la nouvelle législation du royaume, Paris, 1791, in-8°, 324 p. — Observations sur le cours de législation dans les Écoles Centrales adressées à la Commission d'lnstruction publique, 1797. — Tableau des prisons de Lyon pour servir à l'histoire de la tyrannie de 1792 à 1793, Lyon, Duval, 1797, in-8°, 336 p. — Compte rendu des travaux de l'Académie de Lyon, Lyon, Ballanche, 1804, 16 p. — Dictionnaire historique des Hommes célèbres par Chaudon, Lyon, Bruyset, 1804, notices sur Louis XVI, Marie-Antoinette, Mme Elisabeth, Robespierre. — Passage à Lyon de Napoléon 1er et de l'lmpératrice, Lyon, Tournachon, 1805, 68 p. — Compte rendu des travaux de l'Académie de Lyon pendant le second semestre An XIl, Lyon, Ballanche, 1806, 16 p. — État de la Bibliothèque de Lyon en 1810-1812, Lyon, Ballanche, 1812, in-8°, 63 p. — Notice sur les manuscrits de la bibliothèque de Lyon, sur leur ancienneté, sur leurs auteurs [...] précédés d'une histoire des anciennes bibliothèques de Lyon et en particulier de celle de la ville, d'un essai historique sur les manuscrits en général, ornements, cherté, ceux qui sont à remarquer dans les principales bibliothèques de l'Europe, avec une bibliographie spéciale des catalogues qui les ont décrits, Lyon, 1812, 3 vol., in-8°. — Catalogue de la Bibliothèque de Lyon, Livres qu'elle renferme dans la section Belles-Lettres, 2 vol, 1816-1817. — Catalogue de la Bibliothèque de Lyon, Livres qu'elle renferme dans la section Théâtre, Lyon, 1818. — Catalogue de la Bibliothèque de Lyon, Livres qu'elle renferme dans la section Histoire, 2 vol., 1819. — Mémoires bibliographiques et littéraires, Lyon, Mistral, 1816, in-8°, 488 p. — Prix de Néronde, Lyon, 1815 (?)

8. Bibliographie

Feller-Weiss; H.P.L.P.; N.B.G. — A.D. Rhône, t. 287, lettres de Delandine. — Dumas J.B., Secrétaire de l'Académie royale des Sciences, Notice Historique sur la vie et les ouvrages d'Antoine-Francois Delandine, Lyon, Mistral, 1820. — Article nécrologique par M. de Boissieux dans Journal de Lyon, 12 mai 1820. — Journal des Débats, 14 mai 1820. — Collombet F.Z., "Delandine" dans Revue du Lyonnais, t.XVIII, 1843, p. 406-424. — Vingtrinier E., Histoire des journaux de Lyon depuis leur origine jusqu'à nos jours, Lyon, Brun, 1852. — Herriot E., Lyon n'est plus, Paris, Hachette, 1937-1940, 4 tomes. — Trenard L., Lyon, de l'Encyclopédie au Préromantisme, Paris, P.U.F., 1958.

COSTER

Auteurs

Numéro

198

Prénom

Jean Louis

Naissance

1728

Décès

1780?

Jean Louis Coster est né à Nancy le 15 juin 1728, dans une famille de commerçants sur laquelle nous avons peu de renseignements. Son frère Joseph François (1729-1813), formé au monde des affaires, préféra le droit et les lettres: membre de l'Académie de Nancy (1765), maire de la ville, professeur d'histoire à l'Ecole centrale de la Meurthe (1796), proviseur au Lycée de Lyon (1803-1805), il a terminé sa carrière à Nancy.

2. Formation

Il entre au noviciat de la Société de Jésus le 13 août 1745 (Sommervogel).

3. Carrière

Professeur de grammaire et de rhétorique dans plusieurs collèges de Jésuites. Lors de la dissolution de la Compagnie de Jésus (1759), C. passa aux Pays-Bas, puis à Liège où il exerça la charge de bibliothécaire des évêques.

6. Activités journalistiques

Il fonde à Liège en juillet 1772, avec privilège du prince de Velbruck, L'Esprit des journaux, et le dirige jusqu'en 1775, date de la prise en charge par L.F. de Lignac et l'abbé Outin (D.P.1 397). Deux volumes en 1772, quatre en 1773, douze en 1775. En mai 1773, le journal est imprimé à Bruxelles et reçoit la protection du gouverneur Charles de Lorraine.

7. Publications diverses

Il publie à Liège en 1773 L'Aventurier chinois (Sommervogel).

8. Bibliographie

H.P.L.P. ; D.L.F. ; Sommervogel. – Blaud, Eloge de Joseph-François Coster, Académie de Nancy, 1839. – Gain A., L'Ecole centrale de la Meurthe, Nancy, 1926.

BLEGNY

Auteurs

Numéro

078

Prénom

Nicolas de

Naissance

1642

Décès

1722

Nicolas de Blégny est né en 1642 (Delaunay, p. 466) peut-être à Lyon, car il fera suivre son pseudonyme «Abraham Du Pradel» de la mention «lionnois» (Fournier, p. XLIII). Il meurt en Avignon en 1722 (Delaunay, p. 468).

2. Formation

P. Delaunay a pu rétablir sa carrière «universitaire» (p. 466) : «Apprenti chirurgien à 13 ans, il exerce pendant quatorze ans dans les armées du roi, à l'hôpital général ou dans les boutiques de Paris comme compagnon chirurgien ; remplit, pendant deux ans, les fonctions de chirurgien ordinaire de la Charité de Saint-Côme, puis en 1679, achète un privilège et devient l'un des quatre chirurgiens de la prévôté de l'Hôtel du Roi, en attendant (1680) le titre de «chirurgien ordinaire du corps de Monsieur». En fait, sa formation est essentiellement empirique et «mécanique».

3. Carrière

Il fonde, vers 1679, une Académie des nouvelles découvertes de médecine sur le modèle de la grande Académie. Sommé de se défaire de sa charge de chirurgien de Monsieur, il prend des lettres de docteur de la faculté de Caen, «devient médecin ordinaire du duc d'Orléans par lettres patentes enregistrées le 25 janvier 1685 à la prévôté de l'Hôtel, obtient encore un privilège d'apothicaire-épicier suivant la Cour et en 1687 celui de médecin ordinaire du Roi» (D, p. 467). Le 4 juin 1693, un ordre du roi l'envoie au Fort-l'Evêque, d'où il est transféré au château d'Angers où il demeurera huit ans (D, p. 468). «Après huit ans de détention à Angers, il fut élargi, gagna l'Italie où il pérégrina quelque temps, revint exercer la médecine à Avignon et y mourut en 1722» (id., p. 468).

5. Opinions

Dans son journal, B. défend le mécanisme cartésien et le gassendisme contre l'Académie des sciences (J. Roger, Les Sciences de la vie dans la pensée française au XVIIIe siècle, A. Colin, 1963, p. 180) et diffuse les théories de Guillaume Lamy (ibid., p. 272-273). Il fut cependant en bons termes avec l'abbé Bourdelot dont l'académie, fondée à l'Hôtel de Condé vers 1640, lui avait servi de modèle (Albert G. Nicholis, p. 199). Son principal adversaire fut l'abbé J.P. de La Roque, directeur du Journal des savants de 1675 à 1687, et auteur du Journal de Médecine (1683, 1686), qui parvint à lui imposer silence en 1683.

6. Activités journalistiques

B. fonde en 1679 le premier périodique médical français : Les Nouvelles Découvertes sur toutes les parties de la médecine «recueillies en l'année 1679 par Nicolas de Blégny» (D.P.1 1022), continué par :

Le Temple d'Esculape «ou le Dépositaire des nouvelles découvertes [...] dans la médecine», 1680, continué par :

Journal des Nouvelles Découvertes «concernant les sciences et les arts qui font partie de la médecine» 1681-1683. Au total, 3 vol. in 12 publiés chez L. d'Houry et Blageart. Ce périodique connut un vif succès ; il fut traduit en allemand à Hambourg (Monatliche neueröffnete Anmerckungen) et en latin à Genève (Zodiacus medico-gallicus de Théophraste Bonnet). Un arrêt du Conseil l'interdit en 1682 (voir Camusat, Histoire critique des journaux, 1734, t. II, p. 128-130) ; grâce à la protection de Monsieur, du lieutenant de police La Reynie et du 1er médecin du Roi, d'Aquin, B. put poursuivre pendant un an encore ; puis il le confia à Gautier, physicien de Niort établi à Amsterdam qui publie en 1684.

Le Mercure savant, 2 numéros en janvier et février 1684, recueil de pièces envoyées de France par B. et A. Gaultier (D.P.1 949), et qui auraient, selon Moreri, donné à Bayle l'idée de lancer les Nouvelles de la République des Lettres.

7. Publications diverses

L'Art de guérir les maladies vénériennes «expliqué par les principes de la nature et de la mécanique», Paris, 1673 (deux éd. à Paris, une éd. à La Haye et une à Amsterdam, trad. angl. à Londres). – L'Art de guérir les hernies de toutes espèces dans les deux sexes avec le remède du Roi, Paris, 1673, 1693.– Histoire anatomique d'un enfant qui a demeuré vingt-six ans dans le ventre de sa mère, Paris, 1679. – Le Remède anglais pour la guérison des fièvres, Paris, 1681, (2e éd. en 1683, 1re éd. à Bruxelles en 1682). – La Doctrine des rapports, «fondée sur les maximes d'usage et sur la disposition des nouvelles ordonnances», Paris, 1684.– Le Bon Usage du thé, du caffé et du chocolat «pour la préservation et la guérison des maladies», Paris, 1687, Lyon, 1687.– Secrets concernant la beauté et la santé, Paris, 1688-1689.– Projet de l'histoire générale des religions militaires et des ordres politiques et séculiers de chevaliers, 1694.– Le Livre commode des adresses de Paris pour 1692 «par Abraham Du Pradel, lyonnais» (éd. E. Fournier, Paris, P. Dafis, 1678).– Lelong lui attribue l'Histoire de l'Ordre du Saint-Esprit (n° 16123 et 16169).

8. Bibliographie

Moreri ; B.Un. – Camusat D.F., Histoire critique des journaux, Amsterdam, Bernard, 1734.– Fournier E., Introduction à l'édition du Livre commode des adresses de Paris, pour 1692, Paris, P. Dafis, 1678. – (D) Delaunay P., La Vie médicale aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, éd. Hippocrate, 1935, n° 651, p. 466-468. – Lévy-Valensi, «Les Journaux de Nicolas de Blégny», Paris médical, 7, 17, 31 juillet 1937. – Nicholis A.G., «Nicolas de Blégny and the first medical periodical», The Canadian Medical Association, t. 32, août 1934, n° 2, p. 198-202.

BEFFROY DE REIGNY

Auteurs

Numéro

054

Prénom

Louis

Naissance

1757

Décès

1811

Louis Abel Beffroy de Reigny est né à Laon, le 6 novembre 1757. On a peu de renseignements sur ses ascendants. Sa famille paternelle était distinguée mais sans fortune. Il épouse, en 1780, à Saint-Amand, Justine Verlez (D.L.F.), dont il a deux filles. Il meurt le 19 décembre 1811 à Charenton.

2. Formation

Envoyé jeune à Paris où il acheva ses études, il fut élève au Collège Louis-le-Grand avec Robespierre et Camille Desmoulins ; il fut aspirant chez les Lazaristes, resta à l'Oratoire au collège de Pontlevoy, quelques semaines (D.B.F.) ; abbé un peu papillonnant, professeur d'éloquence à Laon (D.L.F.), il est bon causeur, joueur de guitare. Il se présente lui-même : «Ecuyer, du Musée de Paris ; membre de l'Académie d'Arras et de Bretagne». Son pseudonyme de «Cousin Jacques» lui aurait été donné au jeu par de jeunes femmes.

3. Carrière

Jusqu'en 1780 et avant son mariage, il se consacre à l'enseignement ; chargé, chez les Lazaristes, du cours de philosophie et de rhétorique, il renonce au petit collet après avoir enseigné les humanités, pour se vouer aux Muses. A Paris, il entre comme principal au Collège de Beauvais où il édite quelques pièces, encouragé par Voltaire et l'abbé Aubert (B.Un.) ; il entre au collège d'Anchin, à Douai (B.Un.). Après son mariage, il quitte la pédagogie, s'installe à Chevregny (D.B.F.), publie des oeuvres burlesques. Après 1783, il reprend, à Paris, son métier de professeur, se lance dans le journalisme, le lyrisme et le théâtre ; en 1790, il aborde la politique. En 1792, il se retire à Vincelles-la-Rue, près d'Auxerre (D.B.F.), rentre à Paris où il continue d'écrire et connaît quelques difficultés. En 1800, il fut mis en vedette par son Dictionnaire néologique des hommes et des choses de la Révolution (15 cahiers) qui fut mis à l'index. A sa mort, il était tombé dans l'oubli, pauvre et besogneux.

4. Situation de fortune

De situation très modeste, il enseigna dans les ordres religieux ou donna des leçons à Paris, pour vivre. En 1788, professeur et écrivain, il lance un périodique bi-mensuel, «pour créer des ressources permanentes».

5. Opinions

Professeur, auteur dramatique, journaliste engagé à ses débuts dans le lyrisme et le théâtre, il a l'esprit ouvert et facétieux, le caractère enjoué. Il fut embastillé en 1783, pour avoir fait paraître Les Petites Maisons du Parnasse, autobiographie, sans privilège. Entraîné par la foule comme «reporter» à la prise de la Bastille, il fut classé comme patriote, bien que partisan du roi. Il n'aborde la politique qu'en octobre 1790, dans un esprit polémique : Nouvelles Lunes, Défenseur du Peuple, et, le 3 janvier 1792 : Le Consolateur ou Journal des honnêtes gens, une feuille anti-jacobine. Il fut incarcéré de novembre 1793 jusqu'au 26 janvier 1794 et se montra courageux devant Robespierre et Camille Desmoulins. Ses pièces et couplets révèlent des sentiments honnêtes, ont un but moral et réveillent les émotions populaires.

6. Activités journalistiques

Auteur lyrique et dramatique, il a l'idée d'un périodique facétieux et cocasse (dont le premier souscripteur fut Montgolfier), Les Lunes du Cousin Jacques, journal mensuel, 1erjuin 1785 - mars 1787, 36 numéros, 13 volumes.

Le Courrier des planètes ou Correspondance du Cousin Jacques avec le firmament, «folie périodique dédiée à la Lune» (janv. 1788 - 16 déc. 1789), 74 numéros, Paris, Belin, 11 vol. in-12 (D.P.1 285).

Le Cousin Jacques ou Courrier de la lune et des planètes, 1er janv.-30 sept. 1790, 113 numéros, Paris, Belin, 1790, 3 volumes in-12. Ce journal devint Les Nouvelles Lunes du Cousin Jacques, janv. 1791-juill. 1791.

Dès 1790, il aborde la politique : Le Lendemain ou esprit des feuilles de la veille, 10 oct. 1790-19 juin 1791, Paris, Troullé, 1790-1791, 3 volumes in-8°.

Le Défenseur du peuple, par le cousin Jacques, 9 juill. – 29 sept. 1791, 83 numéros in-8°.

Le Consolateur ou Journal des honnêtes gens, 3 janv.-7 août 1792, Paris, 63 numéros, 3 vol. in-12, feuille antijacobine éphémère. Il collabore à la Feuille de Flandre (D.L.F., D.P.1455).

7. Publications diverses

Liste des œuvres dans Cior 18 (n°10944-10988) et dans D.L.F..

8. Bibliographie

B.Un., H.P.L.P., H.G.P. Bulletin de la Société de l'Académie de Laon, t. XX, 478.– Bulletin archéologique, historique et scientifique, Soissons, t. III, Série II, art. de R. Barroux, X-134, p. 165-165.

9. Additif

État-civil: Louis Abel Beffroy de Reigny est né le 6 novembre 1757 à Laon, d’Étienne Nicolas de R. (mort en 1758) et de Marie Joseph Fromage (mariage le 3 février 1751). Il a épousé, le 13 novembre 1780 à Saint-Amand-les-Eaux, Marie Justine Virlez. Ils ont deux filles ; Marie-Jeanne Rose est baptisée le 2 décembre 1782 (source Geneanet) . Louis Abel B. a eu deux frères : Louis Étienne Beffroy de Beauvoir, né à Soissons en 1754, qui fut député aux États généraux, député à la Convention, commissaire aux armées, membre du Conseil des Cinq-Cents, expulsé de France en 1816 comme conventionnel régicide, mort en 1825 ; le second, François Geneviève Beffroy de Jisompré (1756-1801?), est nommé par Monselet (Les Oubliés et les dédaignés, Alençon, Poulet-Malassis, 1857, t. 1, p. 178), mais n’a pas laissé de trace, sinon dans la notice qui lui est consacrée dans le Dictionnaire néologique des hommes et des choses. Selon la tradition, B. serait mort à Charenton le 17 décembre 1811, mais selon Monselet, qui affirme avoir fait relever son acte de décès, il est mort à son domicile de la rue de Sèvres (Les Oubliés, p. 231).

La famille Beffroy est attestée depuis le début du XVIe siècle ; Monselet nomme B. « écuyer », ce qui le ferait de petite noblesse.

Formation: Charles Monselet rapporte qu’il partit très tôt pour Paris, où il fit ses études au collège Louis-le-Grand ; il aurait été le condisciple de Desmoulins et de Robespierre ; pour ce dernier, qui est né en 1758, la rencontre est probable, mais la monographie de Monselet (Les Oubliés et les dédaignés, « Le cousin Jacques », p. 177 et suiv.), bien informée mais romancée, doit être prise avec prudence. À dix-huit ans (en 1775), il prend l’habit de clerc dans la congrégation de Saint-Vincent ; il rappelle au début du Courrier des planètes, qu’il y a passé « les plus heureux jours de sa vie » (cité par les Mémoires secrets du 20 novembre 1787), mais il ne semble pas y être resté longtemps. En août 1785, après avoir produit quelques poèmes dans le Mercure, il lance les Lunes du cousin Jacques, « journal bizarre » commenté avec scepticisme par les Mémoires secrets du 24 mai 1786, mais dont on reconnaît la vogue et la gaieté. La Correspondance littéraire  de Grimm signale, en août 1785 que B., « assez bien né, mais sans fortune », était protégé par l’abbé Aubert. Le 25 mai 1787, il est reçu dans la Société des Rosati d’Arras, à laquelle appartenaient Robespierre et Carnot ; il y prononce, pour sa réception quelques vers galants qu’on a souvent attribués à Robespierre (Voir A.J. Paris, La Jeunesse de Robespierre, p. 178, note 1).

Carrière: Au début de la Révolution, il fréquente assidûment le salon Carnot au « petit Luxembourg ». Les Mémoires sur Carnot, publiés par son fils (éd. Pagnierre, Paris, t. II, 1863, p. 85 et suiv.) évoquent l’influence de ce salon sur B., en minimisant ses convictions révolutionnaires : « Bien qu’ancien condisciple de Robespierre, il se montrait fort peu ami de la Révolution, il n’hésitait pas à se dire aristocrate » (p. 89). Ruiné par la banqueroute à la fin de la publication des Lunes du cousin Jacques en 1787, il aurait, selon Monselet, été sauvé de la pauvreté par le succès extraordinaire de Nicodème dans la lune « ou la révolution pacifique », joué en novembre 1790, et qui aurait connu 400 représentations. Arrêté le 26 novembre  1793, il fut sauvé par son frère, Bertrand de Beauvoir et libéré le 26 janvier 1794 (Voir Monselet, p. 217 et suiv.).

Bibliographie: Bibliographie dans le Dictionnaire des lettres françaises, éd. revue sous la dir. de François Moureau, Fayard, 1995, notice de Beffroy de Reigny par R. Barroux ; Louis Abel Beffroy de Reigny, Dictionnaire néologique des hommes et des choses, t. 1, 1801, s. v. Beffroy.

(J.S. et D. R.)