THOUNENS

Auteurs

Numéro

772

Prénom

Jean Baptiste

Naissance

?

Décès

?

Né à Coirac, diocèse de Bazas, en Gironde, Jean Baptiste Thounens (parfois orthographié Thonnens, Thouners, Tounens ou Touneins), est le fils d'Antoine Thounens, notaire royal, et de Catherine Duroux Guilhem (G.H.C., 1990, p. 237). Il se marie au Carénage, île Sainte-Lucie, le 19 juin 1772, avec Julienne Redort, native d'Ouassigany, île Saint-Vincent.

2. Formation

Membre colonial associé du Cercle des Philadelphes devenu, en 1789, Société royale des sciences et des arts du Cap-Français (Almanach de Saint-Domingue, 1791, p. 148). Délégué en décembre 1792 auprès de la Convention en qualité de «Député extraordinaire de l'Assemblée coloniale de l'Ile de Sainte-Lucie-la-Fidèle » (C.R., p. 9 ;Lettre ou Instructions de l'Assemblée générale coloniale de l'isle S.L. la Fidelle à J.B. Thounens, 1793). «Commissaire du Pouvoir Exécutif auprès du Bureau central du canton de Bordeaux», du 22 frimaire an VI au 16 ventôse an VII (Archives municipales de Bordeaux. Période révolutionnaire (1789-An VIII), Bordeaux, 1913 t. III, p. 76, 89).

3. Carrière

T. s'établit à Sainte-Lucie au début des années 1770 (C.R., p. 5). En 1783, lors du procès en diffamation qu'il intente à l'huissier Jean Baptiste Abadie, il est désigné comme «Marchand demeurant en [la] ville du Carénage». Abadie, accusé d'avoir «injurié» la femme de T., et notamment d'avoir « voulu faire entendre par ses discours » qu'elle était de « sang mêlé», est condamné le 27 septembre 1783, puis en appel le 4 novembre de la même année, à faire publiquement amende honorable et à payer 100 £ de dommages et intérêts (A.N., C10c 4, 1787-1788 ; G.H.C., n° 20). Sainte-Lucie se trouvait encore à l'époque sous domination anglaise, l'île ayant été occupée par les troupes britanniques au mois de décembre 1778. Elle redeviendra française à la suite du traité de Versailles, le nouveau gouverneur, Jean de Verron de Laborie, reprenant possession de l'île, au nom de la France, en janvier 1784.

En 1786, Sainte-Lucie, qui dépendait de la Martinique aussi bien du point de vue administratif que juridique et commercial, est « détachée de la Martinique pour le gouvernement civil», ce qui va notamment lui permettre d'avoir son propre imprimeur. Le privilège en est accordé à T. qui est également nommé « Directeur général de la Poste royale de la Colonie» (Almanach historique, 1789, p. 71, 151 ; S. Daney, Histoire de la Martinique, 1846, rééd., Fort-de-France, 1963, t. V, p. 248). Dès le début de l'année suivante, il semble avoir entrepris la publication de la Gazette de Sainte-Lucie. Les collections retrouvées de ce journal ne datent le premier volume que de 1788, mais dans le numéro du 29 septembre 1787 des Affiches américaines, publiées au Port-au-Prince, on trouve déjà un article «extrait de la Gazette de Sainte-Lucie, ¹ 15» (1787, p. 499).

T., qui aurait été «l'un des premiers à [avoir] fai[t] et souten[u] la Révolution dès 1789 aux colonies», va prendre une part active aux luttes farouches qui opposent aux îles du Vent révolutionnaires et contre-révolutionnaires (C.R., p. 24). La G.S.L., qu'il continue à publier après son déménagement à Saint-Pierre de la Martinique, en mars 1790, se range aux côtés de la municipalité « patriote » de cette ville entrée en rébellion ouverte contre le gouverneur et l'Assemblée coloniale qui siège au Fort-Royal et que contrôlent le « parti planteur» et les partisans de l'ancien régime. T. sert alors dans la «milice patriotique» de Saint-Pierre, et la livraison de son journal est à plusieurs reprises retardée en raison du « service militaire de la patrie » dont il refuse de se dispenser : il faut «combattre l'ennemi» aussi bien «dans les [champs de] cannes [...] [que] dans ses sophismes» (G.S.L., 1790, p. 238, 254, 256).

En avril 1792, T. se rend en France pour régler certaines affaires personnelles. A Paris, où il arrive le 10 juin, il fréquente le milieu des « patriotes colons » qui se réunissent autour du général Dugommier. Il est aussi « le témoin oculaire» de l'insurrection du 10 août dont il se réjouit, espérant que cela amènera « un prompt changement dans le gouvernement des colonies» et notamment le remplacement des fonctionnaires et officiers restés fidèles au « tyran justement détrôné» (C.R., p. 1-3).

Soucieux de rejoindre sa famille et ses «compagnons d'armes» à un moment où peut se jouer le sort de la Révolution aux Antilles, T. quitte Paris le 10 septembre 1792, et s'embarque le 19 octobre à Bordeaux pour la Martinique. Pendant son absence, malgré l'opposition de sa famille à laquelle il aurait été fait de «violents outrages», son imprimerie a été occupée sur ordre du comte de Béhague, gouverneur des îles du Vent, dont les sympathies étaient acquises à la contre-révolution. Arrivant le 6 décembre en rade de Saint-Pierre, T. échappe de peu à ceux venus l'arrêter et réussit à gagner Sainte-Lucie restée loyale à la Révolution. Il en repart presque aussitôt, le 20 décembre, chargé par les autorités de l'île de trouver des renforts pour lutter à la fois contre l'ennemi intérieur, les contre-révolutionnaires, et l'ennemi extérieur, l'Angleterre. T. réussit d'abord à gagner Saint-Domingue sur un bateau mis à sa disposition par le capitaine de vaisseau Lacrosse qui, de «Sainte-Lucie-la-Fidèle», prépare la reconquête des îles contrôlées par les royalistes. A Saint-Domingue, Sonthonax et Rochambeau tergiversent et refusent finalement d'accorder les secours espérés. T., qui les accuse de «fausseté» et de «perfidie», est menacé à nouveau d'être arrêté, mais il parvient à s'embarquer pour la France. A Paris, où il arrive le 21 février 1793, il plaide la cause des « patriotes » des îles du Vent auprès du Comité colonial et du ministre de la Marine Monge (CR., p. 9 et suiv., p. 43-48).

Au printemps 1794, l'Angleterre occupe la Martinique, puis à l'automne, Sainte-Lucie, qui sera reconquise un moment l'année suivante par les troupes françaises, puis reprise de nouveau par les Anglais en 1796, après une longue résistance dirigée par Goyrand. T., qui est resté en France, s'installe à Bordeaux, où il occupe un temps, sous le Directoire, les fonctions de Commissaire du Pouvoir exécutif (12 déc. 1797 - 6 mars 1799). Après la reprise de la Martinique par Villaret de Joyeuse en 1802, il revient à Saint-Pierre où il reprend, avec ses fils, son métier d'imprimeur (A.N., C8A 105-1802, f° 89 et suiv.).

4. Situation de fortune

La situation financière de T. semble avoir été relativement prospère, du moins jusqu'aux débuts de la Révolution. Marchand, imprimeur-libraire avec privilège exclusif pour la colonie de Sainte-Lucie, il est l'un des «colons-capitalistes», c'est l'expression alors employée, qui fondent, à la fin de 1788, 1'«Association coloniale pour ouvrir un commerce direct entre Sainte-Lucie et la Métropole». Cette association se donnait pour but de favoriser le développement économique de la colonie en libérant son commerce des « serres » de la Martinique, véritable « vampire des îles du Vent » pour reprendre une expression employée par le baron de Laborie dans une lettre au ministre de la Marine. Tous les produits et denrées devaient en effet d'abord transiter par les ports de la Martinique, «passer par les mains des négociants et des commissionnaires de la Martinique qui [...] tyrannisent», «écorchent au vif», et «ruinent» Sainte-Lucie (A.N., C Io C 4, 28 mai 1788 ; Mémoire sur Sainte-Lucie, 1784, A.N./S.O.M., F3 57- f° 58 ; Tableau de Sainte-Lucie, 1789, A.N./S.O.M., F ? 57, f° 190 ; Bruneau-Latouche, p. 42-52). Ce «projet patriotique» soutenu par les autorités de Sainte-Lucie, est aussi une société de commerce par actions dont le capital initial est fixé à 300 000 £. Parmi les premiers actionnaires, T. qui souscrit pour deux actions de 2000 £ chaque (A.N., C10C 4, 28 nov. 1788, etpassim ; Almanach historique, p. 69). L'année suivante, T. se lance dans une autre entreprise commerciale, affrétant un « paquebot » pour assurer un service hebdomadaire régulier entre les principales îles du Vent. Ce bateau, «très fin voilier de port d'environ trente tonneaux», partait le mardi de Castries pour aborder à la Martinique (Saint-Pierre), à la Dominique (Roseau) et à la Guadeloupe (Basse-Terre), d'où il repartait le vendredi pour faire le chemin inverse et être de retour à Sainte-Lucie le lundi. Il prenait des passagers et du fret «pour tous ces endroits en allant et revenant». L'établissement de ce service était aussi un moyen d'assurer et d'augmenter la diffusion de la G.S.L. qui paraissait le mardi, jour de départ du bateau : «MM. les Abonnés à la Gazette de Sainte-Lucie qui résident dans les colonies voisines peuvent être assurés d'en recevoir régulièrement tous les numéros, à mesure qu'ils sortiront de la presse, le paquebot étant aux ordres de l'imprimeur» (G.S.L., 1789, p. 220).

Dans les premières années de la Révolution, T. fait face à des difficultés financières dont la G.S.L. se fait à plusieurs reprises l'écho. Dès septembre 1789, il se dessaisit de son fonds de librairie, et au cours de l'année suivante, pressé par ses créanciers, il multiplie les appels à « toutes les personnes qui lui doivent, soit pour [des] frais d'impression ou pour [des] objets de commerce », soit pour « les abonnements échus ou en cours» à son journal, «de vouloir bien le payer sans délai, ayant [lui-même] la douleur de se voir poursuivi sans ménagement par ceux à qui il doit». Selon la coutume longtemps en usage aux colonies, il laisse à ceux «qui ne peuvent s'acquitter en argent [...], la faculté de le faire en toutes sortes de denrées» (1789, p. 188, 267 ; 1790, p. 72, 99-100).

Aux « dépenses considérables » entraînées par son déménagement à Saint-Pierre, dépenses qu'il ne semble pas avoir prévues, s'ajoutent les «calamités publiques» et les «persécutions personnelles » dont il est l'objet en raison de ses prises de position politiques, les unes et les autres perturbant à plusieurs reprises le travail de son imprimerie et la distribution de son journal. A la fin de 1792, la publication de la G.S.L. est d'ailleurs interrompue pendant plusieurs mois U 793. P-5)- De plus les abonnements sont difficiles à recouvrer en raison des événements, mais aussi des habitudes de la plupart des abonnés, et de la mauvaise foi de certains : «Il est inconcevable que le plus grand nombre des abonnés se fassent autant et si longtemps prier inutilement, pour acquitter, après des années d'attente, des objets aussi minutieux, lorsqu'il est d'usage, dans tous les pays du monde connu, de payer d'avance les abonnements aux papiers publics [...]. Tous les reliquataires des années 1789, 1790 et 1791, sont prévenus qu'ils vont être poursuivis, s'ils continuent à ne vouloir payer, comme le fait le père Vincent, curé du Laborie Sainte-Lucie, qui demande qu'on lui présente des titres après avoir reçu la Gazette pendant plus d'un an ! » (1791, p. 240, 260 ; 1792, p. 108).

5. Opinions

Acquis aux idées philosophiques, admirateur de Voltaire et de Rousseau qui ont aidé à dissiper « les préjugés barbares qui font les esclaves et les tyrans» et qui ont redonné «à l'homme le sentiment profond de l'humanité», T. accueille avec enthousiasme les débuts d'une «révolution aussi heureuse qu'inouïe», espérant qu'elle fera de la France «ce qu'elle doit être, une nation éclairée, généreuse et pacifique» (G.S.L., 1788, p. 32, 146 ; 1790, p. 78).

Engagé dans la lutte révolutionnaire, T. s'est voulu le porte-parole du « patriotisme » aux colonies et, selon sa propre expression, l'«ennemi juré» du «parti planteur» et de tous «les satellites des despotes couronnés» (C.R., p. 21, 35). Aux colonies, l'opposition entre « aristocrates » et « patriotes » recouvre en effet souvent une autre opposition, propre aux sociétés coloniales, celle entre «négociants» des villes portuaires et «planteurs» des campagnes, deux classes que leurs opinions comme leurs intérêts dressent l'une contre l'autre. « Patriote », T. l'est d'abord comme le sont au commencement de la Révolution la plupart des habitants des villes coloniales, et notamment les membres de «cette classe précieuse de riches négociants et de commerçants industrieux» dont la G.S.L. défend en 1790 la cause, et qui se sont ralliés à la Révolution par conviction mais aussi par intérêt, leurs fortunes dépendant du maintien de liens étroits avec la métropole, et notamment de ce système de «l'Exclusif» qui les a enrichis en les faisant les intermédiaires obligés entre les «planteurs» et une métropole qui se réserve la totalité du commerce colonial (G.S.L., 1790, p. 266). Les «planteurs», qui dépendent des « négociants » pour l'écoulement de leurs produits et sont pour la plupart endettés auprès d'eux, vont au contraire voir dans la Révolution l'occasion d'abolir leurs dettes et de conquérir une autonomie politique et économique à laquelle ils aspirent depuis longtemps. En grande majorité, ils soutiendront la contre-révolution, et n'hésiteront pas, le moment venu, à faire appel à l'Angleterre (L. Abanon et al., La Révolution aux Caraïbes, Paris, 1989, p. 147, p. 26 et suiv.).

Le « patriotisme » de T. est cependant beaucoup plus profond. Réagissant d'abord à la fois comme un homme acquis aux idées nouvelles et comme un «négociant» colonial conscient de ses intérêts de classe, il va peu à peu changer, suivre le mouvement de la Révolution, et finalement se ranger aux côtés des «sans-culottes colons» et «véritables patriotes républicains» des colonies. Son attitude au début de 1794, au moment où le débat sur l'abolition de l'esclavage le force à choisir entre son « devoir sacré de représentant » et sa conscience, est de ce point de vue significative.

A la fin de 1792, député auprès de la Convention par l'Assemblée coloniale de Sainte-Lucie, T. avait reçu pour mandat de défendre «l'inviolabilité de la propriété» des colons, et donc implicitement le maintien de l'esclavage : «pas un colon [n'en fera] le sacrifice en échange d'un système de philosophie» (Lettre, p. 12-13). Mais ses idées ont depuis évolué et T. est convaincu, au début de 1794, de la nécessité d'abolir l'esclavage : le «vrai patriote» est celui qui «travaille] à briser les fers des [nègres esclaves] [...] et à détruire l'infâme préjugé qui pès[e] sur la tête [des citoyens de couleur libres] » (C.R., p. 24). Pour ne pas « trahir la confiance de ceux qui [l']ont délégué», il décide cependant de faire «connaître à la Convention nationale et au public, par la voie de l'impression, les instructions mêmes de [ses] commettants», ce qui explique qu'il ait été un moment arrêté, par erreur, en février 1794, certains, sur la foi de cette publication, l'ayant pris pour un partisan du maintien de l'esclavage et un ancien membre de ce club Massiac dont la Convention venait d'ordonner la fermeture et l'arrestation des membres. T. avait en fait «toujours tonné [...] contre cet infâme repaire» où se réunissaient les colons opposés à l'abolition de l'esclavage, et aux lendemains du vote du décret du 16 pluviôse, il fait appel à « obéir avec soumission à cette loi » : c'est là « le devoir du vrai républicain» et de «l'ami de la liberté et de l'égalité» (C.R., p. 21, 50-51). Quelques jours plus tard, à la séance du 29 pluviôse an II (17 févr. 1794), il est admis au club des Jacobins (F.A. Aulard, La Société des Jacobins, Paris, 1889-1897. t. V, p. 656).

Franc-maçon, T. fut un temps «Vénérable» de la loge de «La Sincérité des Cœurs» de Saint-Pierre de la Martinique. Il est aussi à l'origine de la loge de « La Réunion des Cœurs » établie en 1809 à La Soufrière, île de Sainte-Lucie, et l'un des membres fondateurs, en 1814, de l'atelier des «Frères choisis» de Saint-Pierre (Combes, p. 170-173).

6. Activités journalistiques

T. est l'imprimeur et le rédacteur de la Gazette de Sainte-Lucie, hebdomadaire publié à Castries, puis, à compter du numéro XIII du 30 mars 1790, à Saint-Pierre de la Martinique. A partir de 1790, il est secondé dans sa tâche par différents collaborateurs, notamment Sextius Buffardin d'Aix.

La G.S.L. aurait été le premier journal des colonies, du moins selon son rédacteur, à annoncer la prise de la Bastille : «le premier des Colonies, [j'ai] osé imprimer, au commencement de septembre 1789, les principaux détails de la révolution de France contre la ci-devant cour de Versailles» (C.R., p. 5 ; G.S.L., 1789, p. 202 et suiv.). Dès 1788 la G.S.L. accorde une large place dans ses colonnes au « mouvement de régénération de la France», et elle se veut même un moment, à partir de l'été 1789, «une sorte de journal des séances de l'Assemblée nationale» (1789, p. 163). Puis, sous la pression des événements mais aussi en raison des opinions de son rédacteur, le journal « semi-officiel » d'informations et d'annonces va peu à peu se transformer en journal de réflexion et d'intervention politique, « le point de ralliement des amis de la Nation» (1790, p. 210).

Les prises de position de la G.S.L., sa «franchise républicaine», vaudront à T. d'être à plusieurs reprises inquiété par les différentes autorités. En août 1791, notamment, l'Assemblée coloniale de Sainte-Lucie le décrète d'accusation comme «auteur et distributeur de libelles diffamatoires», mais l'évolution de la situation politique aux îles du Vent fera bientôt abandonner les poursuites (G.S.L., 179LP. 215, 220 ; C.R., p. 18). Pour T., à une époque où «les demi-vertus tiennent du vice», le journaliste ne peut rester indifférent, se contenter d'être un simple «fagoteur» qui «empile des nouvelles » comme des branches pour faire un fagot. Il doit s'engager, prendre parti, tout en sachant que son premier devoir est de «s'enquérir de la vérité et de l'écrire», de chercher et de reconnaître la vérité pour «la rétablir dans tous ses droits qu'elle réclame» (G.S.L., 1790, p. 139-140, 194, 210 ; 1791, p. 8).

Au début du XIXe siècle, T., revenu à Saint-Pierre, imprime la Gazette de la Martinique, qui reprend sa publication à partir du 11 septembre 1804 (C8 B 24, n° 52), et la Feuille officielle de la Martinique dont le premier numéro est daté du 1er avril 1807 (C8A 115-1807, f° III).

7. Publications diverses

7. Note remise au Comité colonial, le 3 juillet 1793, l'an II de la République, par J.B. Thounens, Paris, 1793. – (C.R.) Compte rendu aux Comités de marine et des colonies réunis, et au public, par J.B. Thounens, s.l.n.d. [Paris, an II].

8. Bibliographie

A.N., Colonies, Séries C8A, C8B, C1oC ; A.N./S.O.M., Sous-série F3, 55-57, Recueils de documents concernant l'île de Sainte-Lucie, 1713-1789 ; Etat-Civil, Table décennale, Ile Sainte-Lucie, registres 1 et 2. – (G.S.L.) Gazette de Sainte-Lucie, 1788-1793. – Almanack historique, chronologique, de commerce, d'arts et métiers pour les Colonies, Castries, 1789. – Lettre ou Instructions de l'Assemblée générale coloniale de l'isle S[ainte] L[ucie] la Fidelle, à J. B. Thounens, son député extraordinaire auprès de la Convention nationale, s.l.n.d. [Paris, 1793]. – Bruneau-Latouche E. et R., Sainte-Lucie fille de la Martinique, Livry-Gargan, 1989. – (G.H.C.) Vendryes A., «Salade à Sainte-Lucie», Généalogie et histoire de la Caraïbe, n° 20, oct. 1990, p. 208-209 ; les notes de B. et P. Rossignol, n° 22, déc. 1990, p. 237, et J. Guilhon, n° 32, nov. 1991,

432. – Combes A., «La franc-maçonnerie aux Antilles et en Guyane française de 1789 à 1848», dans La Période révolutionnaire aux Antilles-Guyane, Schoelder (Martinique), s.d. [1789 ?], p. 155-180.

ROLAND

Auteurs

Numéro

701

Prénom

abbé

Naissance

XVIIe s.

Roland, écrit parfois Rolland. Il avait un frère également établi à Saint-Domingue (Affiches américaines, 4 sept. 1784).

3. Carrière

Maître de pension au Cap, depuis au moins 1781 (A.N., Col. E 356), R. se voit forcé, au début de 1783, de quitter la colonie, à la suite, semble-t-il, d'une affaire de mœurs : dans un mémoire adressé deux ans plus tard au ministre de la Marine, le P. Julien dénoncera « la perversité des mœurs de [ce] jeune homme soi-disant abbé qui tenait école au Cap», « loup ravissant » placé « à la tête d'une brillante jeunesse » pour mieux la perdre (cité par Debien, p. 11). R. se réfugie alors à Kingston, île de la Jamaïque, où il se lance, sans succès, dans une carrière de journaliste. On perd ensuite sa trace.

5. Opinions

On retrouve chez R. les contradictions propres à de nombreux colons « éclairés » de la fin du XVIIIe siècle. Sa curiosité, son goût du savoir, sa foi dans l'éducation et dans les «Sciences et les Arts» comme instruments de progrès, sa défense de la tolérance religieuse ou son affirmation des «droits sacrés» qu'ont tous les hommes au «bonheur» et à la «liberté», en font un homme des «Lumières» (Mercure des Antilles, p. 54, et passim). Le plan d'éducation qu'il soumet aux autorités de la colonie en 1781, s'inspire des traités de Batteux, La Chalotais, Condillac, Guyton de Morveau, comme de Diderot et de l'Encyclopédie (A.N., Col. E 356, Plan d'éducation). R. épouse cependant aussi la cause du «parti colon» dont il se fait le porte-parole dans le Mercure des Antilles, défendant le principe de la particularité sociale et politique des colonies contre ceux qui, en métropole, à commencer par l'abbé Raynal, « radotent » sur l'Amérique « par ouï-dire », et répandent sur elle «erreurs et faussetés». Cela le conduit à chercher à justifier, au nom de «la raison», aussi bien l'esclavage, nécessaire non seulement à la prospérité mais à l'existence même des colonies, que ce «préjugé de couleur» qui fait de la discrimination raciale la base du système social et politique colonial (Mercure des Antilles, p. 8 et suiv., 55­64).

6. Activités journalistiques

A Kingston, R. entreprend la publication d'un mensuel, le Mercure des Antilles (D.P.1 933), dont il ne réussira à faire paraître qu'un seul numéro (n° 1, déc. 1783).

8. Bibliographie

A.N., Col. E 356, dossier Roland. – Affiches américaines. – Debien G., «Un abbé maître de pension à Saint-Domingue puis journaliste à la Jamaïque (1781-1783)», Revue de la Porte océane, t. II, 1955, n° 8, p. 7-13 ; 9, p. 14-18 ; 10, p. 5­8, 15-16 ; 11, p. 16-18.

RODIER

Auteurs

Numéro

698

Prénom

Bernard

Naissance

?

Décès

1784

Né à Lons-le-Saunier, Bernard Philippe Rodier (écrit aussi Rhodier), est mort au Cap, île de Saint-Domingue, le 16 août 1784. Il avait épousé, en avril 1782, Charlotte Louise Lacroix (Affiches américaines, 28 août 1784 ; Description, p. 1544).

2. Formation

Avocat auprès du Conseil supérieur du Cap. Secrétaire du gouverneur général de Saint-Domingue (ibid.).

6. Activités journalistiques

Chargé de la rédaction des Affiches américaines «vers 1780» (Description, p. 494).

8. Bibliographie

8. Affiches américaines. – Moreau de Saint-Méry, Description [...] de la partie française de l'Isle de Saint-Domingue (Philadelphie, 1797), nouv. éd., Paris, 1984.

ROBINET

Auteurs

Numéro

694

Prénom

Jean Baptiste

Naissance

1735

Décès

1820

Jean Baptiste René Robinet, dit Robinet de Châteaugiron du nom de sa femme, Louise de Châteaugiron (C, p. 6 ; CM, p. 71), naît le 23 juin 1735 à Rennes où son père est imprimeur du Parlement (M, p. 184 ; Rosso ; Damiron, 11481). Il meurt dans sa ville natale le 24 mars 1820. Il s'était marié à Amsterdam vers mars-avril 1760 avec Gesina Regtering (M, p. 184 ; C, p. 10).

2. Formation

Après avoir fait ses études chez les Jésuites de Rennes, il serait entré dans leur Compagnie (Damiron. 11481), mais Sommervogel ne le mentionne pas.

3. Carrière

Ayant quitté l'ordre des Jésuites, R. se rend à Paris, puis en Hollande où il séjourne plusieurs années. En 1761, il publie De la nature, qui le fait connaître. Paru anonymement, le livre est attribué tour à tour à J.L. Castilhon, Toussaint, Helvétius, Diderot, avant que R. s'en déclare l'auteur par une lettre du 18 mai 1762 insérée dans l'édition d'Amsterdam du Journal des savants (Levot). Il s'installe à Liège à la fin de 1765 ou au début de 1766 (M, p. 198), publie une déclaration sur sa fidélité au catholicisme dans la Gazette de Liège du ,30 juillet 1766 (M, p. 199) ; mais il aurait été obligé de quitter la ville sous la pression des autorités religieuses (C, p. 14), R. se rend à Bouillon. II s'y trouve en 1769, au moment où est formée la Société typographique dont il est un des associés. Il s'en retire peu de temps après, à la suite, semble-t-il, d'un différend avec Pierre Rousseau sur «la gestion de ses affaires». Resté cependant à Bouillon, R. va se consacrer à l'édition du Supplément de l'Encyclopédie, pour laquelle plusieurs libraires, dont Rousseau, Rey et Panckoucke, se sont associés. Cela l'oblige à de fréquents voyages. II se rend ainsi à Paris en janvier 1772 et y rencontre J.L. Carra qu'il engage et qui l'accompagne à Bouillon. R. continue également à travailler pour différents libraires de Hollande, collaborant notamment à la traduction et à l'édition de l'Histoire universelle chez Merkus (CM, p. 71 ; C, p. 100-102). De retour en France vers 1778, R. obtient une charge de censeur royal qu'il remplira jusqu'à sa suppression. Il est également secrétaire particulier du ministre Amelot qui, avec le titre de ministre de Paris, est chargé de l'administration intérieure de la France et de celle de la Maison du roi (Levot ; Rosso). Au début de la Révolution, R. revient à Rennes où il meurt en 1820,à l'âge de 85 ans.

4. Situation de fortune

La situation financière de R. semble avoir été longtemps précaire. Pour subsister, il se met aux gages des libraires, éditant, compilant, traduisant. Il corrige des épreuves chez le libraire Harvelt (C, p. 9), établit des tables pour M.M. Rey, réédite le dictionnaire de Chambaud pour Merkus, traduit de nombreux ouvrages anglais, notamment les Essais de morale de Hume et les Mémoires de Miss Sidney Bidulph de Frances Sheridan, déjà traduits par Prévost en 1762. C'est sans doute le besoin d'argent qui, en 1765, pousse R. à vendre pour 25 louis à un libraire une série de lettres de Voltaire qu'il se serait procurées par l'intermédiaire d'un ancien domestique de ce dernier (M, p. I92 ; M.S., 12 janv. 1765). La publication des Lettres secrètes provoque l'inquiétude et l'indignation de Voltaire, qui fulmine contre ce «Robinet qui se vante de connaître la nature, et qui connaît bien peu la probité», ce « faussaire calomniateur qui pour gagner quelque argent » a fait imprimer des « lettres secrètes, qui, si elles sont secrètes ne devaient pas être publiques» (D12935, Ï3653, 13859, 12206). Il semble que, poussé par le besoin, R. soit devenu un polygraphe intéressé avant tout par les entreprises littéraires lucratives et les spéculations de librairie. On le lui reproche, l'accusant d'être « un maquignon d'ouvrages manuscrits » ou un de ces «boutiquiers de la littérature, auteurs compilants et compilés, agents de change de la philosophie» (Beausire, p. 192 ; C, p. 134). Ce dernier jugement est, il est vrai, de Carra qui, employé par R. et Rousseau, fut renvoyé par eux, accusé de négligence et de plagiat. Comme éditeur du Supplément à l'Encyclopédie, R. était payé, selon Carra, 72 £ par feuille imprimée mais lui-même ne donnait à ses collaborateurs que de 30 à 50 £ la feuille. Carra en recevait 30, Diderot 50 (C, p. 39-40).

5. Opinions

Disciple des encyclopédistes, R. se fait connaître par son livre De la nature, dans lequel il traite de «Dieu et la nature» à partir de deux prémisses : l'équilibre du bien et du mal dans la création ; la génération uniforme des êtres et la création continuée du monde. L'accueil est mélangé. Pour Voltaire, c'est du «fatras» métaphysique et «ce n'est point par de la métaphysique qu'on détrompera les hommes ; il faut prouver la vérité par les faits» (D 18425). Mairobert, qui y voit «une nouvelle pierre ajoutée à l'édifice du matérialisme», juge le livre «trop scientifiquement écrit pour amuser les gens superficiels, et [...] pas assez agréablement pour attacher les savants, auxquels il n'apprendra rien» {M.S., 28 mars 1762). Grimm souligne également le matérialisme latent de l'ouvrage mais remarque que l'auteur «a du style et la tête philosophique» et que malgré «l'incongruité de ses idées systématiques» son ouvrage n'est pas sans mérite (CL., t. VI, p. 204 ; t. IX, p. 131). Selon un critique contemporain, J. Mayer, les théories de R., malgré l'énormité de certaines, méritent d'être étudiées car, «par leur originalité, par leur hardiesse souvent incohérente, par leur dogmatisme systématique, elles représentent une attitude philosophique fréquente au XVIIIe siècle» (p. 297). Il semble que peu à peu R. ait pris ses distances vis-à-vis du mouvement philosophique. C'est ce qui ressort de la correspondance qu'il entretient en I771 et 1772 avec le marquis de Voyer et Dom Des Champs. Ce dernier s'étonne que R. fasse profession de ne plus croire à rien : «Il sait donc douter maintenant, et ne croire à rien, après avoir tout cru ; il est parfaitement deflegmé de son dogmatisme et de celui des autres» (Beausire, p. 186). R. accueille favorablement la Révolution et la soutient dans ses Lettres sur les débats de l'Assemblée nationale, se réjouissant du «nouveau jour» qui se lève avec «le progrès rapide de la raison dans une Nation devenue libre» (lettre XI). Il participe à l'administration du conseil général d'Ille-et-Vilaine ; mais après Varennes, il se retire progressivement des affaires (M, p. 241-244). Suspect d'appartenir à la noblesse, il fut arrêté le 1er mai 1794, mais relâché peu après (M, p. 246). Il a condamné vivement par la suite les excès des Jacobins (Sauvez-vous). Dans les mois qui précèdent sa mort, R. revient à la religion catholique et rétracte publiquement « ce qu'il y a d'hétérodoxe et de répréhensible dans quelques livres qu'il a faits par ignorance, déraison, inadvertance ou autrement, soit dans [sa] jeunesse, soit dans le temps de la Révolution » (L'Ami de la Religion et du Roi, t. XXIV, p. 368).

6. Activités journalistiques

Les activités journalistiques de R. sont de divers ordres. Pour de nombreux recueils périodiques, sa collaboration semble s'être surtout située au niveau de l'édition, correction d'épreuves, établissement de tables, mise en forme d'articles. II rédige ainsi les tables de la Nouvelle Bibliothèque germanique de Formey (1760) et, avec H.J. Dulaurens, celles de l'édition hollandaise du Journal des savants (1764) ; édition du t. XIII de la Collection académique (1766).

Au début de son séjour à Bouillon, R. fait partie de 1'« état-major» qui entoure Pierre Rousseau et l'aide dans ses multiples tâches (CM, p. 24-25). R. collabore aux différentes publications de la Société typographique et il est probable qu'il participe également à l'élaboration du Journal encyclopédique (D.P.1 730).

R. est avec J.L. Castilhon l'éditeur des premiers volumes du Recueil philosophique et littéraire de la Société de Bouillon

(D.P. in 79). Les éditeurs prévoient d'en faire paraître quatre volumes par an mais seulement dix volumes seront publiés de 1769 à 1779. Leur but est de rassembler «des pièces de physique, d'histoire naturelle, de morale, de littérature et de politique» afin d'aider au «progrès des sciences» et à «l'avancement de la vraie philosophie». Ils se proposent également de recueillir les «brochures», «petits ouvrages» ou «feuilles volantes», pour les préserver de l'oubli, ce dont se réjouit particulièrement Grimm : «Ce projet est excellent, surtout dans un siècle où l'on n'a guère le temps que de faire de petits écrits, et où il en paraît souvent de très-précieux». Diderot, qui fait la recension du premier volume pour la Correspondance littéraire, juge sévèrement certains articles de R., mais remarque que l'auteur «a de la chaleur, de la hardiesse et du nerf» et conclut qu'« à tout prendre, le recueil est bon ; je l'ai coupé d'un bout à l'autre, je le garde, et j'en retiens la suite» (CL., t. VIII, p. 395-401).

R. a peut-être collaboré aux Affaires de l'Angleterre et de l'Amérique, Anvers et Paris, 1776-1779 (D.P. 1 4). Ce journal, qui compte parmi ses rédacteurs B. Franklin et Court de Gébelin, est publié par cahiers, de 80 à 100 p. chacun, sans périodicité fixe. Son but est de fournir aux lecteurs français une information complète et détaillée sur la politique et l'économie de l'Angleterre et de l'Amérique. A côté de comptes rendus des séances de la Chambre des Communes ou de celle des Pairs, se trouvent des articles traitant des affaires politiques, économiques, financières et militaires de ces deux pays.

R. fait paraître au début de la Révolution, à Rennes, une série de « lettres » sous le titre général de Lettres sur les débats de l'Assemblée nationale relatifs à la Constitution (1789-1790). Ces lettres parurent sans périodicité fixe du 6 septembre 1789 (I) au 20 février 1790 (XXII). Elles sont de 3 à 25 p. suivant le sujet traité. Imprimées au début « aux dépens de l'auteur» et distribuées «gratis en son nom», elles sont par la suite vendues 6 sous puis 8 sous «au profit des pauvres». Chaque lettre est adressée à une personne en particulier et traite une seule question d'actualité : le veto suspensif (VII), la féodalité (IX), la constitution (XI), la représentation nationale (XV), la dîme ecclésiastique (XVII), etc.

7. Publications diverses

7. Discours sur l'histoire de l'Académie royale des sciences, 1760. – De la nature, Amsterdam, 1761 (t. I) ; 1763 (t. II).

De l'animalité, 8.1., 1767-1768, 2 vol. – De la nature, petit extrait d'un gros livre, Genève, 1762. – Grammaire française, extraite des meilleurs grammairiens français, ou dialogue entre un grammairien et son élève, Amsterdam, 1763. – Paradoxes moraux et littéraires, Amsterdam, 1768 (attribué également à J. Mauvillon). – Considérations philosophiques de la gradation naturelle des formes de l'être ou les Essais de la nature qui apprend à faire l'homme, Paris, 1768. – Le Favori de la fortune, Amsterdam, 1779, 2 vol. – Questions sur l'émigration, l'exportation du numéraire, Rennes, s.d. (daté du 1er avril 1790).

Sauvez-vous, sauvez-vous, il en est encore temps, ou nous sommes tous perdus et la France anéantie, s.I.n.d. – La Société des Amis de la Constitution de Rennes à ses frères les habitants des campagnes, sur la nomination des électeurs, Rennes, 1791 (signé : Robinet, Ponsard, Lesbeaupin). – Les Vertus, réflexions morales en vers, Rennes, 1814, 2 vol.

Ouvrages en collaboration : Analyse raisonnée de Bayle, ou Abrégé méthodique de ses ouvrages, Londres, 175 5-1770, 8 vol. (les 4 premiers volumes sont de Marsy). – Supplément à l'Encyclopédie, Amsterdam, 1776-1777, 5 vol. – Nouveau dictionnaire français-anglais et anglais-français, de Louis Chambaud, corrigé [...] par J.B. Robinet, Amsterdam, 1776, 2 vol. Nouvelle grammaire anglaise, Amsterdam, 1764 (avec J.B. Dehaynin). – Dictionnaire universel des sciences morale, économique, politique et diplomatique, ou Bibliothèque de l'homme d'état et du citoyen, Londres, 1777-1783, 30 vol. (à partir du t. V, le titre porte : «rédigé et mis en ordre par M. Robinet»). Histoire universelle, depuis le commencement du monde jusqu'à présent, traduite de l'anglais, par une société de gens de lettres, Amsterdam, 1742-1792. 46 vol. (avec Joncourt, Chaussepié, etc.). – Collection académique composée des mémoires, actes ou journaux des plus célèbres académies et sociétés littéraires étrangères, Dijon et Paris, Desventes et Lambert, 1755-1766, 13 vol. in-4° (R. est l'éditeur du t. XIII) : continuation du Recueil des mémoires ou collection de pièces académiques de Berryat et Guéneau de Montbeillard (1754­1759, 3 vol.).

Editions : Voltaire, Lettres secrètes, Genève, 1765. – Lettres de M. de Voltaire à ses amis du Parnasse, Amsterdam, 1766.

Les Œuvres de Mylord Comte de Shaftesbury, Genève, 1769, 3 vol. (trad. de Diderot, Coste, J.B. Pascal).

Tables : Table méthodique des matières contenues dans l'histoire et les mémoires de l'Académie royale des sciences de 1735

à 1751, Amsterdam, 1760. – Table de la Nouvelle Bibliothèque germanique, Amsterdam, 1760. – Table du Journal des savants de 1665 à lafinde 1764, Amsterdam, 1764, 3 vol. (avec H.J. Dulaurens ; éd. hollandaise). – Table du Cabinet d'histoire naturelle de Seba, en latin et en français (Locupletissimi rerum naturalium thesauri accurata descripto -Description exacte des principales curiosités naturelles du magnifique cabinet d'Albert Seba, Amsterdam, 1734-1765, 4 vol.).

Traductions : Considérations sur l'état présent de la littérature en Europe, Londres, 1762. – Parallèle de la condition et des facultés de l'homme avec la condition et les facultés des autres animaux. Bouillon, 1769 («traduit de l'anglais»). – Hume D., Essais de morale, ou Recherches sur les principes de la morale, Amsterdam, 1760. – Sheridan F., Mémoires de Miss Sidney Bidulph, extraits de son journal et traduits de l'anglais, Amsterdam, 1763-1768. – Ridley J., Les Contes des génies, ou les charmantes leçons d'Horam, fils d'Asmar, Amsterdam, 1766. – Donato N., L'Homme d'état, Liège, 1767 (trad. de l'italien). – Brooke F.M., Histoire d'Emilie Montagne, Amsterdam, 1770. – Halche N.B., Code des lois des Gentoux, ou Règlemens des Brames, Paris, 1778 (trad. attribuée également à Jean-Nicolas Demeunier). – Abbé Mariti, Voyages dans l'île de Chypre, la Syrie et la Palestine, avec l'histoire générale du Levant,

Neuwied, 1791 (trad. de l'italien, attribuée également à J. Castilhon).

Sont également attribués à R. : Considérations sur le sort et les révolutions du commerce d'Espagne, 1761. – Lettres de Théodose et Constance, Rotterdam, 1764 (trad. de Langhorne).

8. Bibliographie

F.L. 1769 ; Q. ; Cior 18 ; M.S. ; CL. – Beausire E., Antécé­dents de l'hégélianisme dans la philosophie française, Paris, 1865. – (C) Carra J.L., Le Faux philosophe démasqué, Bouillon, 1772. – (CM) Charlier G. et Mortier R., Le Journal encyclopédique (1756-1793), Bruxelles, 1952. – Damiron P., Mémoires pour servir à l'histoire de la philosophie, Paris, 1858, 3 vol. – Levot L., Biographie bretonne. Vannes, 1852-1857, t. II, p. 729-730. – Mayer J., «Robinet, philosophe de la nature», R.S.H., t. LIV (1954), p. 295-309. – (M) Murphy T., «Jean Baptiste René Robinet : the career of a man of letters», S.V.E.C. 150, 1976, p. 183-249. – Rosso C, «Il < paradosso> di Robinet», dans Moralisti del « bonheur», Turin, 1954, p. 49-76. – Voltaire, Correspondence, éd. Besterman. – Rétat P., Le Dictionnaire de Bayle et la lutte philosophique au XVIIIe siècle, «Les Belles-Lettres», 1971, p. 430-437.

9. Additif

État civil: Dans un une communication consacrée à Robinet (« Jean-Baptiste Robinet . Un libraire philosophe », colloque Le Pauvre diable), Françoise Badelon apporte à la biographie du journaliste et philosophe d’utiles compléments. Jean-Baptiste René Robinet est né à Rennes le 25 juin 1732, deuxième fils de Jean-Baptiste Robinet et de Louise de Chateaugiron ; c’est de sa mère qu’il prendra le nom de Robinet de Chateaugiron. À la mort de ses parents (entre 1738 et 1744), il passe sous la tutelle de son oncle Jean-François Hergault, procureur à la Cour.

Formation: Il est confié à un précepteur, puis entre au collège des jésuites de Rennes. Il est admis au noviciat le 18 septembre 1749, et passe au collège Louis-le-Grand en 1751-1752 ; il y enseigne en qualité de professeur de sixième en 1753-1754 ; il figure une dernière fois sur les registres de la Compagnie en 1755-1756 en qualité de répétiteur au collège de La Flèche. En 1760, il s’est établi en Hollande ; il y fait enregistrer, le 28 mars 1760, à Amsterdam, son mariage avec Gesina Regtering, fille d’un riche marchand hollandais.

Publications diverses: En 1760, on le voit publier à Amsterdam les Essais de morale de Hume, puis en 1762 le premier tome de De la Nature, ouvrage majeur dont la publication en quatre tomes se poursuivra jusqu’en 1766. Il mène en même temps une activité éditoriale intense, publiant des traductions, des éditions, deux grammaires, puis les Suppléments de l’Encyclopédie, sans qu’on puisse affirmer qu’il s’est mis aux gages des libraires, tant ses publications sont liées à son évolution intellectuelle.

Bibliographie: Badelon F.,  « Jean-Baptiste Robinet . Un libraire philosophe », dans Le Pauvre diable. Destins de l’homme de lettres au XVIIIe siècle, dir. H. Duranton, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2006 (J.S.).

REYNAUD

Auteurs

Numéro

684

Naissance

XVIIIe s.

6. Activités journalistiques

Selon une note manuscrite en tête de la collection de la Gazette des Petites Antilles conservée au ministère des Affaires étrangères, ce journal aurait été fondé par un «Français nommé Reynaud, négociant provençal réfugié à la Dominique». Hebdomadaire, la Gazette des Petites Antilles a été publiée à Roseau à partir du 5 juillet 1774.

8. Bibliographie

8. D.P. 1 496. — Gazette des Petites Antilles, A.A.E., 258 B 9.

PESSELIER

Auteurs

Numéro

630

Prénom

Charles

Naissance

1712

Décès

1763

Charles Etienne Pesselier est né à Paris le 9 juillet 1712 ; plusieurs biographes disent à la Ferté-sous-Jouarre, mais les

A.D. Seine-et-Marne ignorent ce nom. On le trouve parfois prénommé Joseph (Journal des savants ; Devisme ; Levis ; F.L.). Il était d'une très bonne famille à la fortune honnête» (N.). Il a épousé une parente pauvre du financier Lallemand de Betz. Tombé malade en novembre 1762, il meurt le 24 avril 1763 (N.).

2. Formation

Etudes au Collège des Quatre-Nations à Paris, puis à la faculté de droit. Membre associé des académies de Nancy, Amiens (1749), Rouen, Angers (1761). Il recevra le titre honorifique de conseiller-secrétaire ordinaire de S.M. le Roi de Pologne. Se destinant à la poésie, il avait, dès le mois de décembre 1733, reçu l'hommage de Mlle Malcrais de La Vigne (Desforges-Maillard, Mercure, déc. 1733, p. 2843-2844).

3. Carrière

Employé d'abord chez l'avocat au Conseil Rolland (N.), il entre vers 1742 au service de Lallemand de Betz en qualité de secrétaire ; en 1753, il est sous-fermier (f.fr. 22158, f° 150). Selon le Nécrologe, «il attira l'attention du ministère qui établit pour lui des bureaux à la tête desquels il mit l'auteur, avec des appointements proportionnés à ses talents et à l'importance de ses travaux» (p. 26). Cette promotion pourrait se situer vers 1760, après la publication de l'Idée générale des finances et du Discours préliminaire. Il écrit d'abord pour le Théâtre-Italien auquel il donne La Mascarade du Parnasse (1737), L'Ecole du Temps (1738) et Esope au Parnasse (1739), puis se consacre à la poésie et à l'éloquence. A partir de 1759, il publie plusieurs ouvrages d'économie et rédige pour l'Encyclopédie les articles «Ferme» et «Financier».

4. Situation de fortune

Tous les biographes mentionnent l'importance de ses appointements dans l'administration des fermes. Voisenon évoque sa «probité irréprochable», sa générosité et l'agrément de sa maison où se donnaient des spectacles «dont les pièces étaient de lui» (Anecdotes littéraires, dans Œuvres complètes, Paris, Moutard, 1781, t. IV, p. 80). Ce train de vie semble avoir épuisé sa fortune (N.).

5. Opinions

Grimm attaque violemment, dans la CL. du 15 mai 1761, les articles «Ferme» et «Financier» de l'Encyclopédie (voir J. Proust, Diderot et l'Encyclopédie, A. Colin, 1962, p. 68). Dans la même livraison, il défend Mirabeau que P. venait de critiquer dans les Doutes proposés à l'auteur de la Théorie de l'impôt (CL., t. IV, p. 404 et suiv.).

6. Activités journalistiques

P. collabore au Mercure de France, auquel il adresse des fables (recueillies dans les Fables nouvelles de 1748) et des extraits des Dialogues des morts (janv. 1752).

Le Glaneur français, Paris, Prault, 1.1, 1735 ; t. II, III, 1736 ; t. IV, 1737 : l'auteur de la F.L. de 1769 l'attribue à P., tout en mentionnant la collaboration de Dreux Du Radier. P. avait effectivement rencontré Dreux Du Radier, âgé alors de vingt ans, chez Frécot de Lanchy et l'avait engagé pour le Glaneur français (voir art. «Dreux Du Radier»). La préface de la première brochure ne suppose qu'un auteur, qui annonce : « de petites pièces fugitives en vers et en prose, et non imprimées ; des anecdotes historiques et littéraires, les traits plaisants ou qui, du moins, m'ont paru tels». Le Nécrologe affirme : «Il a fait en grande partie le Glaneur».

7. Publications diverses

Voir Cior 18, n° 49609-49642. Y ajouter les articles «Ferme» et «Financier» de l'Encyclopédie. On trouvera la liste complète de ses comédies dans l'éloge rédigé par Castilhon dans le Nécrologe de 1764 (t. I, p. 17-26).

8. Bibliographie

8. F.L. 1769 ; N.B.G. ; Brenner ; Cior 18. Journal des savants, 1748 (p. 224), 1749 (p. 313). – Levis A. de. Dictionnaire portatif des théâtres, 2e éd., Paris, 1763. – (N.) Nécrologe, 1764. – Maillet Du Boullay C.N., Précis de l'Académie de Rouen, t. III, 1766, 1770. – Devisme J.F.L., Manuel historique du département de l'Aisne, Laon, 1826. – Baron J.L., Mémoires de l'Académie d'Amiens, t. XLVI, 1899.

MOZARD

Auteurs

Numéro

599

Prénom

Charles

Naissance

1755

Décès

1810

Né à Paris, paroisse Saint-Eustache, le 2 février 1755, Théodore Charles, dit Charles Mozard, est mort à Naples le 19 mars 1810 (M2, p. 3, 219). Il était d'une famille qui «sort[ait] de bons [et riches] cultivateurs» d'Athis. Son père avait un temps « servi comme officier dans [la] maison du roi [Louis XV]» (ibid., p. 5-6, 13, 162). M.

2. Formation

Membre de la Société royale des sciences et arts du Cap-Français, de la Société d'histoire naturelle de Paris, et de l'American Philosophical Society dont le siège se trouvait à Philadelphie (Maurel, p. 265 ; Almanach, p. 147 ; M2, p. 15 ; Elicona, p. 193). M. était franc-maçon (M2, p. 166).

3. Carrière

Ses parents le destinent à la prêtrise, mais, tout en étudiant, il «cour[t] les théâtres» et rêve de «s'embarquer en mer». Une fugue le conduit à pied jusqu'au Havre où on le découvre caché dans la cale d'un navire prêt à mettre à la voile. Renvoyé à ses parents, ceux-ci, «pour le punir», le mettent en apprentissage chez un graveur, avant de le « rap­pele[r] dans sa famille» où il reprend ses études sous la direction d'un précepteur. M. ne se résout cependant pas à la carrière qu'on lui a choisi, et il obtient finalement de pouvoir partir «tenter la fortune en Amérique» (M2, p. 6). A Saint-Domingue, où il arrive à dix-huit ans, il travaille d'abord comme précepteur, puis est employé à l'Imprimerie royale du Port-au-Prince, alors dirigée par Jean Louis Bourdon (Ma. ; A.N., Col. E 47). A la fin de 1784, il est chargé par les administrateurs de la colonie de la rédaction des Affiches américaines. Quatre ans plus tard, il obtient la direction de la seconde imprimerie établie au Port-au-Prince par le roi (Moreau, p. 353 ; A.A., 1788, p. 174). Cette imprimerie, le magasin de librairie-papeterie qui lui est adjoint, seront détruits lors de l'incendie de la ville à la suite du soulèvement des « gens de couleur libres », le 21 novembre 1791. M. décide alors de se rendre en France avec l'intention, notamment, de «réclamer une indemnité pour ses presses» et d'acquérir un nouveau matériel d'imprimerie. Il ne reviendra cependant pas à Saint-Domingue (M2, p. 21, 26, 28, 101). A la fin de 1791, laissant son fils âgé de quelques mois aux soins d'une nourrice, M. s'embarque avec sa fille pour la Guadeloupe où il trouve passage sur un bateau à destination de Liverpool. De là, par Londres et Douvres, il gagne Calais où il arrive le 3 mai 1792 (ibid., et p. 99). A Paris, où il s'établit, sa connaissance de «l'Amérique» et des colonies françaises, vont lui faire obtenir, sur recommandation de Lindet et Carnot, un emploi dans les bureaux du Comité de salut public. En 1794, il est « chef-adjoint de la partie du commerce et approvisionnement » dans la « 4e division » du Comité, celle chargée de la marine et des colonies. Le 30 octobre de cette année-là, par arrêté de la Convention nationale, il est nommé consul de France à Boston, où il restera en poste jusqu'en 1799 (A.A.E.). De retour en France, M. réside de nouveau à Paris, boulevard des Italiens puis rue Cérutti (M2, p. 70). Une situation financière de plus en plus difficile l'oblige, en 1806, à se rendre à Naples où il espère obtenir « un consulat » ou un « emploi d'importance » à la cour du roi Joseph. Malgré la «protection éminente» de Talleyrand, qu'il avait connu à Boston et qui lui a remis des lettres de recommandation, ce n'est qu'avec difficulté qu'il obtient «un poste modeste» dans les «bureaux de la guerre». Il meurt quatre ans plus tard, à Naples, âgé de cinquante-cinq ans, le 19 mars 1810 (ibid.,p. 164-167, 182, 197, 219).

4. Situation de fortune

A Saint-Domingue, M. était devenu un homme «riche», ayant «des terres et des esclaves». En 1788, en tant que rédacteur des Affiches américaines, il touche un salaire de 12 000 £, auxquelles viennent s'ajouter les revenus de son imprimerie et de son magasin de librairie-papeterie. II afferme également alors une «habitation» près du Port-au-Prince (M2, p. 22, 26 ; Moreau, p. 495 ; A.N., Col. E 47). Le soulèvement du 21 novembre 1791, l'évolution de la situation politique à Saint-Domingue, lui font perdre sa fortune, malgré les efforts de son frère Louis Maximilien pour en sauver une partie. Lui-même ruiné par la Révolution, Louis Maximilien était venu s'installer dans l'île après avoir un temps songé à s'établir aux Etats-Unis (A.N., Gr 38, f° 118-119). Rentré en France, M. ne pourra se faire indemniser, ni même rembourser l'argent qui lui est dû, notamment par le « gouvernement [...], pour lequel, comme imprimeur, il [aurait] fait plus de 20 000 francs d'avance en impression» (M2, p. 28, 194). Par la suite, sa situation financière sera souvent précaire, notamment dans les dernières années de sa vie. En 1806, ayant mis sa fille en pension chez une lingère, il est obligé de s'exiler en Italie, à la recherche d'un emploi. Talleyrand, connaissant son «état de gêne», lui donne alors «un secours de douze cent francs pour ses frais de route». A Naples, il ne peut trouver qu'un emploi subalterne, et pendant longtemps il n'aurait eu qu'un seul «habit noir» qu'il passait ses dimanches à raccommoder. Il meurt en «hôtel garni» (ibid., p. 167, 182, 219).

5. Opinions

Admirateur des encyclopédistes, rangé «sous les bannières de la philosophie moderne», M. s'est voulu un «homme des Lumières» (M2, p. 73-77). Il élève sa fille «à la Jean-Jacques», s'efforce de n'être guidé que par «le seul motif [...] du bien public », cherche toute sa vie à « acquérir des lumières utiles à [son] pays » et à faire avancer la cause de «la raison», de «l'humanité», et du «progrès», contre «la routine aveugle» et les «préjugés», «fruits de l'ignorance» et de «la barbarie» (ibid., p. 14, 39 ; A.A., 11 sept., 30 oct., 27 nov. 1784, 4 mars, 6 mai 1786). M. accueille favorablement les débuts de la Révolution – «J'ai propagé en Amérique, au péril de ma vie», affirmera-t-il plus tard, «les principes de la Révolution dès son aurore» (A.A.E.). En octobre 1789, on l'accuse, avec Arthaud et Moreau de Saint-Méry, de «trahir» la colonie, en se montrant un « ami du despotisme [ministériel]», c'est-à-dire de s'opposer au mouvement autonomiste qui prévaut alors à Saint-Domingue, et un partisan de l'abolition de l'esclavage (Maurel, p. 256-257). Au début de 1791, on lui reprochera aussi ses liens avec l'abbé Ouvière qui avait pris le parti des «gens de couleur libres» (A.N., Rec. Col. II, 18, pièce 37). Cependant M. affirme, dans les A.A. de novembre 1789, que «jamais les intérêts des colonies ne seront compromis par [son] fait » et que, contrairement à ce que soutiennent «les faiseurs de systèmes et de brochures, [...] il est impossible de cultiver les Colonies autrement que par le régime actuel», c'est-à-dire le maintien de l'esclavage et le refus d'accorder des droits politiques aux «gens de couleur libres » (A. A., 1789, p. 622, 653). En 1791, la Gazette de Saint-Domingue, qu'il rédige, défend les mêmes thèses, celle du «parti colon» qui réclame un «régime intérieur» particulier aux colonies, un régime dans lequel les assemblées coloniales, et non l'Assemblée nationale, seraient notamment les seules habilitées à statuer sur «l'état des personnes» aux colonies, cela afin d'éviter que les principes de la Déclaration des Droits de l'homme y soient appliqués. En se ralliant ainsi à ces thèses, M. cède peut-être à la pression des événements et des circonstances. Il est aussi sans doute, comme beaucoup de colons qui sont par ailleurs également des «hommes des Lumières», prisonnier de convictions contradictoires, adhérant d'une part aux principes du « nouvel ordre des choses », mais continuant d'autre part à être persuadé que la conservation du statu quo aux colonies est une nécessité aussi bien économique que sociale, le seul moyen d'assurer non seulement leur prospérité, mais leur existence même. Malgré l'évolution de la situation politique aux colonies, malgré aussi l'abolition de la royauté à laquelle il était resté attaché, M., revenu en France, va continuer, tout en condamnant les excès de ceux qui «abus[ent] du mot de liberté», à soutenir et à servir la Révolution, une révolution dans laquelle il avait voulu surtout voir l'avènement de «la raison éclair[ant] enfin la terre» (G.S.D., 1791, p. 393-394. 719 ; A.A.E. ; M2, p. 36-37).

6. Activités journalistiques

Chargé en 1784 de la rédaction des Affiches américaines, à la suite de la mort de Bernard Rodier (Moreau, p. 494 ;

D.P. 1 18), M. cherche à en faire, non pas seulement une «feuille d'avis» mais aussi une «gazette» et même un «jour­nal», accordant notamment une place importante dans ses colonnes aux «nouvelles découvertes dans les Arts et les Sciences» et aux «observations sur l'Agriculture, les Manu­factures, le Commerce, l'Histoire civile, politique et naturelle de la Colonie en particulier et des Antilles en général » (Avis ; A.A., 28 août, 30 oct., 27 nov. 1784, 17 juin 1786, et passim). Avec M., les Affiches américaines redeviennent, comme le voulait leur fondateur Monceaux, à la fois un lien avec l'extérieur, et par là l'agent de la diffusion du savoir et de «l'esprit nouveau» aux colonies, et un journal vraiment « colonial », centré sur la colonie, au service de ses particularités, de ses intérêts, de ses besoins, et de son progrès. «Ce serait manquer à la justice de ne pas dire, remarquera Moreau de Saint-Méry, que personne n'a plus cherché que [M.] à répandre de l'intérêt dans cette feuille. Il n'est point de détails coloniaux qu'il n'ait sollicité ou reçu avec empressement, et il a su exciter souvent et le zèle et l'amour-propre de plusieurs personnes instruites, et s'il avait été mieux secondé en général, le public aurait encore gagné plus d'instruction. Depuis que la rédaction lui est confiée, il a rendu cette première feuille périodique de Saint-Domingue encore plus utile, par des calculs et par des vues neuves» ; une grande partie du succès de ce journal est « réellement dû[e] à son talent» (p. 495). Moreau de Saint-Méry, Barbé-Marbois, qui sert comme intendant à Saint-Domingue de 1786 à 1789, ont aussi souligné les qualités de M. imprimeur : «dans un pays où [il n'y avait] pas toutes les ressources nécessaires à la perfection de l'art typographique, [il y a] suppléé par un soin et un talent personnel qui ont rendu remarquables les produits de [ses] presses», que l'on peut comparer à ceux «de l'imprimerie du Louvre» (Barbé-Marbois, citation dans M2, p. 178, n. 1 ; Moreau, p. 353).

M. abandonne la rédaction des Affiches américaines en décembre 1790, pour publier la Gazette de Saint-Domingue, politique, civile, économique et littéraire, bi-hebd. publié au Port-au-Prince à partir du janvier 1791. A partir du n° 62, du 3 juillet 1791, la rédaction en est confiée à Huard, M. ayant alors obtenu un congé pour aller « rétablir sa santé » en France (G.S.D., 1791, p. 761, 771, 1001). Il annule son voyage à la suite de la mort de sa femme, et reprend la rédaction du journal à partir du n° 88, du 2 novembre 1791. La publication de la G.S.D. s'interrompt avec le n° 93 du 19 novembre 1791. Deux jours plus tard éclate l'insurrection des mulâtres.

Revenu en France, M. continuera à contribuer des articles à différents journaux, notamment au Moniteur (M2, p. 71).

7. Publications diverses

M. est l'auteur de nombreux poèmes, petits vers et poèmes de circonstance, publiés dans les Affiches américaines. Il a aussi écrit plusieurs pièces de théâtre, dont deux au moins ont été représentées à Saint-Domingue : La Vengeance africaine ou les Effets de la haine et de la jalousie, drame en 4 actes et en prose adapté librement de Young, dont la première eut lieu à Port-au-Prince le 22 décembre 1781 ; et La Répétition interrompue, «divertissement national en un acte, en prose et en vers, mêlé de chant, fait à l'occasion de la réunion des Trois Ordres de l'Etat, [...] représenté pour la première fois sur le Théâtre de Port-au-Prince, le Dimanche 4 octobre 1789 ». Cette dernière pièce a été imprimée en 1789, à Port-au-Prince, par M. (Fouchard, p. 265-271).

8. Bibliographie

A.N., Col. E 47, dossier Jean Louis Bourdon (Au comte de la Luzerne, 25 oct. [1788]). – A.N./S.O.M., Recueil Colonies, 2e série 18, B.M. Saint-Méry 18. – A.N./S.O.M., Gr. 38 (Greffe de Port-au-Prince), f° 118-119. – A.A.E., Correspon­dance consulaire et commerciale, Boston, vol. 3, f° 301 (Mozard au Comité de Salut public, 28 sept. 1794). – Avis à MM. les Abonnés aux Affiches américaines, s.l.n.d. [Port-au-Prince, 1785]. – Almanach général de Saint-Domingue, Port-au-Prince, 1791 – (A.A.) Affiches américaines. (G.S.D.) Gazette de Saint-Domingue. – Moreau de Saint-Méry, Description [...] de la partie française de l'isle Saint-Domingue (Philadel­phie, 1797), nouv. éd., Paris, 1984. – (Mi) Mozard L.A., Biographie de M. Nicodami [Nicodim], maître de piano et profes­seur de musique du Conservatoire de Paris, Paris, 1843. – (M2) Id., Mémoires d'une créole du Port-au-Prince, Paris, 1844. – Elicona A.L., Moreau de Saint-Méry, Paris, 1934. – Maurel B., «Une société de pensée à Saint-Domingue : le Cercle des Philadelphes au Cap-Français», Revue française d'histoire d'outre-mer, t. XLVIII, p. 171,1961, p. 234-266. – Fouchard J., Le Théâtre à Saint-Domingue, Port-au-Prince, 1955.

MONCEAUX

Auteurs

Numéro

585

Prénom

Jean

Naissance

1724

Décès

1768

Né à Charleville en 1724, Jean Monceaux (orthographié parfois Monceau), est mort au Cap, île de Saint-Domingue, le 21 août 1768 (Affiches américaines, 1768, p. 282, 322; Description, p. 493, 1526).

2. Formation

«Avocat au Parlement de Paris et au Conseil Supérieur du Cap» (ibid. Prospectus, p. 6).

6. Activités journalistiques

Fondateur et rédacteur du premier journal publié dans une colonie française, la Gazette de Saint-Domingue (D.P.i 523), hebdomadaire publié au Cap à partir du février 1764 et suivi des Affiches du Cap (D.P.i 18) que M. dirigea de 1764 à 1768.

8. Bibliographie

8. Prospectus de la Gazette de Saint-Domingue, Le Cap, 1764 (B.N., 4 Lc1217). – Affiches américaines. – Moreau de Saint-Méry, Description [...] de la partie française de l'Isle de Saint-Domingue (Philadelphie, 1797), nouv. éd., Paris, 1984.

LAMBERT

Auteurs

Numéro

446

Prénom

Nicolas

Naissance

1741

Décès

1806

Né à Paris en 1741, Pierre Nicolas Lambert est mort à l'Ile de France le 30 septembre 1806 (T, p. 32).

3. Carrière

Agé de vingt-six ans, L. arrive en 1767 à l'Ile de France sur le Saint Jean-Baptiste. Trois ans plus tard, le 7 janvier 1770, il est nommé directeur de l'imprimerie qui avait été établie en 1768 à Port-Louis, à l'initiative de l'intendant Pierre Poivre (T, p. 29-32). Imprimeur du roi et de la colonie, avec privilège exclusif, Nicolas Lambert est alors surtout chargé de l'impression des textes officiels, ordonnances, édits, règlements, arrêts, mais il va aussi imprimer les premiers livres produits dans la colonie, le Vocabulaire françois-malgache de l'abbé Challan, en 1773, le Code des Isles de France et de Bourbon de Delaleu, en 1777 (Toussain, Bibliography, p. 11, 13). A partir de janvier 1773, il publie également les Annonces, affiches et avis divers pour les colonies des Isles de France et de Bourbon, le premier journal des Mascareignes (Avis au Public, 1772 ; Avis à Mrs les Habitans de Bourbon, 1773 ; L'Administration française,p. 56). Au cours de l'année 1772, L. avait formé une «société» qui se donnait pour but, outre la publication d'une «feuille imprimée», l'établissement d'un «Bureau» chargé d'assurer la distribution du journal et «la correspondance générale des îles». Le «Bureau général des Postes et Gazettes» de l'Ile de France, dont il assure la direction, est ouvert en décembre 1772, et ses services étendus à l'Ile Bourbon au cours de l'année suivante.

A la suite semble-t-il de difficultés financières, L. cède, au début de 1783, la rédaction des Annonces à Joseph Gestat de Garembé, puis, en septembre de la même année, la direction de l'imprimerie à François Bolle, un imprimeur originaire de Strasbourg. En mars 1775, L. avait déjà cédé la direction de la poste à Grezis de Julliat qui, à partir de cette date, collabore également à la publication des Annonces (T, p. 35 ; Annonces, 1775, p. 56).

Au printemps 1795, L. est de nouveau en charge de l'imprimerie de la colonie, associé à François Bolle puis, après la mort de ce dernier en 1801, à Jacques Erny (T, p. 35-37). Au début de 1802, la perte de la commission d'«imprimeur du Gouvernement» au profit d'Antoine L'Hortal, directeur d'une seconde imprimerie établie à Port-Louis en juin 1801, oblige Lambert à revendre son imprimerie à Jérôme Baron, l'un des plus importants libraires de la colonie. Quelques mois plus tard, il la rachète, et s'associe, au cours de l'été 1802, avec Claude Boudret, le successeur de L'Hortal : les «deux Imprimeries [...] [seront] réunies en une seule, sous la dénomination d'Imprimerie de la République et de la Commune» (Petites affiches des Isles de France et de la Réunion, no 8, 29 août 1802, cité dans T, p. 40). L'association est cependant de courte durée : dès janvier 1803, Claude Boudret rachète la part de Lambert et devient seul propriétaire des deux imprimeries (ibid.). Retiré à Flacq, L. meurt en 1806, âgé de soixante-cinq ans.

4. Situation de fortune

En 1770, en tant que directeur de l'Imprimerie royale, L. reçoit un salaire annuel de 1800 £. Trois ans plus tard, ayant alors sans doute décidé de rester dans la colonie, il se fait construire une maison sur un terrain de «10 toises carrées» dont il a obtenu la concession, au centre de Port-Louis, rue de l'Hôpital, en face de l'imprimerie (T, p. 32-33). Par la suite, L. fait face, à plusieurs reprises, à des situations financières difficiles : en 1783, lorsqu'il se dessaisit de ses différentes charges ; en 1795, alors qu'il est poursuivi pour dettes au moment même où il reprend la direction de l'imprimerie (Le Mirage des îles, p. 238) ; en 1801, à la suite de la perte de l'adjudication des impressions officielles, perte qui le poussera, non sans combattre, vendant, rachetant, revendant son imprimerie en l'espace d'une année, à finalement renoncer : «L'Assemblée, par un arrêté pour moi incroiable, me prive dans un instant d'un employ que je crois mériter par 30 années de service. Agé de plus de 60 ans, essuyer des traitements aussi injustes (Pour ne pas me servir d'expressions plus fortes et mieux méritées), n'abattent point mon courage, ma conduite ne me reproche rien et j'en appelle au public pour me juger» (L., Pétition au citoyen ordonnateur, 6 déc. 1801, cité dans T, p. 127-128).

6. Activités journalistiques

Fondateur, rédacteur et imprimeur jusqu'en 1783, des Annonces, affiches et avis divers des Isles de France et de Bourbon, qui sont publiées chaque mercredi à Port-Louis, à partir du 13 janvier 1773, et qui ont continué à paraître au moins jusqu'en 1790 (D.P.130).

Redevenu en 1795 directeur de l'imprimerie, L. assure alors la publication de la Gazette de l'Isle de France, qui se modèle sur les «anciennes affiches», et du Journal des Assemblées Coloniale, Administrative et du Directoire, journal officiel de la colonie. Ces deux hebdomadaires étaient publiés depuis le 5 janvier 1792. L. imprime aussi, en 1799, le Chroniqueur colonial rédigé par François Mayeur (19 mai-12 août 1799) (Toussaint, Bibliography, p. 170-171).

8. Bibliographie

Avis au Public, A l'Isle de France,1772 ; Avis à Mrs les Habitans de Bourbon, s.l.n.d. [Port-Louis, 1773]. – Toussaint A. et Adolphe H., Bibliography of Mauritius (1502-1954), Port-Louis, 1956. – Toussaint A., Early Printing in the Mascarene Islands (1767-1810), London, 1951. – Id., L'Administration française de l'île Maurice, Port-Louis, 1965. – Id., Le Mirage des îles, Aix-en-Provence, 1977.

LACORBIERE de

Auteurs

Numéro

439

Naissance

?

Décès

?

Ecrit La Corbière, la Corbière ou Lacorbière, avec ou sans particule. Ce Lacorbière est peut-être apparenté à Gédéon-François de La Corbière, qui descendait d'une des «plus anciennes familles patriciennes de la République [de Genève] », et que deux brevets royaux datés du 6 juillet 1786 confirment dans ses charges d'arpenteur général et de grand voyer de la Martinique (A.N., C 8A 78, f° 258, C 8A 86, f° 43, et Col., E 243 ; Galiffe, II, p. 181, 192).

2. Formation

Membre associé du Cercle des Philadelphes devenu, en 1789, Société royale des Sciences et des Arts du Cap-Français (Maurel, p. 262 ; Almanach, p. 147).

5. Opinions

Acquis aux idées philosophiques, L. accorde, dans la Gazette de la Guadeloupe, une place importante aux réformes entreprises par Louis XVI, partageant ce désir et cet espoir de «régénération de la nation» qui marquent les dernières années du règne. Il prend notamment parti en faveur de l'édit de 1787 qui restitue aux protestants leurs droits civils, et adopte, sur la question de l'esclavage, une position similaire à celle de l'abbé Raynal : une suppression graduelle qui permettrait d'accorder les principes humanitaires de «l'esprit philosophique» aux réalités économiques et sociales des colonies (G.G., 1788, p. 61-64, 67-69, 76-77, 104, et passim).

6. Activités journalistiques

Rédacteur des Follicules caraïbes (D.P.1 480), hebdomadaire publié à Basse-Terre, Guadeloupe, à partir du 1er janvier 1785, puis de la Gazette de la Guadeloupe (D.P.1 510), également publiée à Basse-Terre au moins jusqu'à l'été 1789 (A.N., C 7A 41, f° 57, Lettre de l'intendant Foulquier au Ministre, 10 oct. 1785 ; G.G., 1788, p. 200).

7. Publications diverses

L. est l'auteur de plusieurs mémoires présentés au Cercle des Philadelphes (S.A.A., 1er et 22 janv. 1786).

8. Bibliographie

A.N., C 7A 41, C8A 78-86, et Col. E 243, dossier La Corbière. – (S.A.A.) Supplément aux Affiches américaines, Le Cap. – (G.G.) Gazette de la Guadeloupe. – Almanach général de Saint-Domingue, Port-au-Prince, 1791. – Galiffe J.A. et J.B.G., Notices généalogiques sur les familles genevoises, Genève, 1829-1895. – Maurel B., «Une société de pensée à Saint-Domingue : le Cercle des Philadelphes au Cap-Français», Revue française d'histoire d'outre-mer, t.XLVIII, n°171, 1961, p. 234-266.